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 Le Feu et la Glace [FF8]

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Rae
Rae
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   Posté le 22-09-2004 à 14:01:26   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

Le feu et la glace

Chapitre 1

Ma tête… J’ entends un bourdonnement, un bourdonnement terrible, qui semble m’ entourer de toutes parts, sans que j’ en connaisse l’ origine… et ma tête… elle va exploser… j’ ai mal… Où est-ce que je suis ? Je n’ arrive pas à ouvrir les yeux, comme si chaque paupière pesait des tonnes ou comme si le noir qui m’ entoure, m’ oppresse, était tellement dense que la pression m’ empêchait de les ouvrir. Je ne vois rien, j’ ai l’ impression de tomber, toujours tomber, dans un trou sans fond. Pourquoi est-ce que je ne peux pas bouger ? Comme si j’ étais complètement vide, vide de volonté, de force.
Le bourdonnement ne s’ apaise qu’ au bout de quelques minutes, ou peut-être quelques heures, je ne sais pas. Le temps… le temps passe-t-il réellement ? Un vertige me prend, devant tout ce néant, et j’ ai de nouveau peur de tomber. Que se passera-t-il quand je heurterai le sol ? Et qu’ y trouverai-je ?
Le bourdonnement a cessé petit à petit, lentement, mais se transforme en voix, des voix qui envahissent mon esprit.

_.... s’ est passé ?
_Je … je ne sais pas …je ne comprends pas, c’ est …
_Regardez, elle a bougé !

Je n’ aurais jamais pensé qu’ ouvrir les yeux, geste machinal, automatique et si naturel pourrait être aussi épuisant, mais il me demande, à cet instant, un effort surhumain. La lumière m’ aveugle tout d’ abord, je passe du noir profond à la lumière, et je papillote des yeux . Au bout de quelques minutes, la lumière diminue d’ intensité, et je distingue des formes noires qui s’ agitent devant moi.

_Eva !! Est-ce que ça va ? Eva ?

Qu’ est-ce que c’ est que ces ombres ? Elles ne cessent de bouger, de changer de forme. Depuis quand est-ce que les fantômes sont noirs ? Mais ce ne sont pas des fantômes. Des ombres… Elles rétrécissent et se muent peu à peu en visages, encore flous, que je ne parviens pas à voir clairement et à reconnaître.

_Eva !! réponds-moi ! Comment est-ce que tu te sens ?

Est-ce que c’ est à moi qu’ on parle ?? Je vois un des visages se rapprocher, et je le regarde un instant , hagarde.

_Eva ?!

Puis tout d’ un coup, tout s‘ éclaire, tout devient net. Je me rends compte que je suis allongée, car je peux voir le plafond de la serre de combat. Au-dessus de moi, des visages inquiets…

_Casey… murmuré-je péniblement en reconnaissant le visage le plus proche.

Il a l’ air soulagé et tente un timide sourire.

_Tu nous as fait une de ces peurs ! Comment est-ce que tu te sens ?
_J’ ai mal… et je suis complètement dans les vapes… Mais qu’ est-ce qui s’ est passé ?

Je me souviens juste que nous étions en entraînement dans la serre de combat avec ma classe. Nous étions en groupe. Je me suis éloignée un instant en reconnaissance en demandant à mon groupe d’ attendre mon signal avant de me rejoindre. Puis plus rien.

_Kern t’ a confondue avec un T-Rex, fait un spirituel, que je n’ aperçois pas.
_Quoi ??
_ Je-je suis désolé, bafouille le dénommé Kern, confus, en s’ avançant… je savais pas que c’ était toi … qu-quand j’ ai vu les buissons bouger, j’ ai cru qu-qu’ un T-Rex arrivait, et j’ ai préféré ti-tirer avant qu’ il nous tombe dessus, mais... je...
_Pourquoi est-ce que ça ne m’ étonne pas … marmonné-je en me passant la main sur le front.

Je me suis toujours dit qu’ il finirait par me tuer, avec sa maladresse, mieux que n’ importe lequel des soldats les plus expérimentés. Je soupire et essaie de me lever sans succès. Quelle chaleur…

_Tu ne devrais pas bouger, me gronde gentiment Casey. On a envoyé Méryl chercher le docteur, ils ne devraient plus tarder. Je vais voir ce qu’ ils fabriquent, ajouta-t-il nerveusement. Ils en mettent, un temps…

Il se lève et sort. Méryl ? Eh bien je peux toujours l’ attendre, le docteur. La connaissant, elle est probablement effondrée quelque part entre l’ infirmerie et la serre de combat, en proie à une de ces crises d’ hystérie qui surviennent souvent à ces moments où on a besoin d’ elle et qui lui ont probablement fait oublier pourquoi elle était partie. J’ ai le temps de mourir de vieillesse avant qu’ elle ne parvienne à se ressaisir et à aller chercher le docteur.

_Il vaut mieux que tu restes là, il a raison, calme-toi, dit Kern, luttant visiblement contre sa propre panique en essayant de jouer les docteurs. Elle est tombée sur la tête, elle a peut-être des séquelles, dit-il aux autres, histoire de les affoler un peu plus. Après tout, elle a oublié ce qui s’ est passé. Est-ce que tu me reconnais, Eva ?

Il se penche sur moi, les sourcils froncés ; je ne l’ ai jamais vu aussi sérieux, l’ air très inquiet et plus idiot que jamais. Je crois volontiers qu’ il regrette profondément ce qu’ il a fait, mais ce ne serait pas la première fois, et ça ne l’ empêchera pas de recommencer ses bêtises.

_Comment veux-tu que j’ oublie une andouille pareille ? grogné-je en repoussant sa tête du bras. Pousse-toi, Kern, tu m’ empêches de respirer.

Il n’ a pas l’ air de relever la remarque ( il en vu d’ autres ) et continue, sur le même ton :

_Combien est-ce que tu vois de doigts ? demande-t-il, perdant complètement la tête.
_Douze. Aide-moi à me lever au lieu de dire des âneries.

Il me donne le bras pour m’ aider, et sitôt sur mes pieds, je suis de nouveau prise d’ un vertige. Casey arrive à ce moment, essoufflé, suivi de Méryl et du Docteur Ivackas, portant sa trousse. Il stoppe net en me voyant sur mes jambes et me regarde avec de gros yeux.

_Qu’ est-ce que tu fais debout, toi ? aboie-t-il. Rallonge-toi immédiatement ! Je croyais que tu étais blessée!
_Mais ça va mieux, protesté-je faiblement en sentant de nouveau un vertige s’ emparer de moi.
_C’ est ce que je vois, fulmine-t-il en me voyant chanceler. Allonge-toi, je te dis.

A contrecoeur, je m’ exécute. De toute façon, je ne sais pas combien de temps j’ aurai tenu avant de m’ effondrer de nouveau. Autant faire croire à tout le monde que c’ est uniquement parce qu’ il me l’ a ordonné que je me rallonge. Le docteur déballe ses affaires en hâte.

_Et maintenant, est-ce que quelqu’ un peut me dire ce qui s’ est passé, ici ?

Je tourne la tête vers Méryl, secouée par les sanglots et dont le visage est inondé par les larmes. Je vois que je ne m’ étais pas trompée. Super. Si Casey n’ y était pas allé lui-même, j’ aurai toujours pu attendre.
Casey s’ est rapproché, lui aussi.

_Elle a reçu une fléchette de AV-392 par erreur.

Le coupable, qui se reconnaît, déglutit péniblement en se faisant tout petit. Je ne vois pas Kern à ce moment, mais j’ imagine très bien la tête qu’ il doit faire. Casey ne le dénoncera pas, ce n’ est pas son style. Pourtant, je sais qu’ il en meure d’ envie tellement il est fou de rage.
Le AV-392 est une substance découverte récemment, qu’ on utilise lors des entraînements. Une sorte d’ anesthésiant, contenu dans des fléchettes, que nous tirons au fusil, sur les monstres de la serre, pour nous entraîner. Ca les endort un moment, mais ça ne les tue pas. Dieu soit loué. Sinon, je veux pas savoir ce qui se serait passé pour moi.

_Quelle dose ? demande Ivackas en préparant une seringue pour l’ antidote.
_Euh... La D-12…

Ivackas manque de lâcher sa seringue et se redresse vivement.

_La D-12 ? C’ est une blague ??!
_Quoi ? Qu’ est-ce qu’ il y a ? je demande en me redressant devant son air surpris.
_Toi, rallonge-toi immédiatement et ne bouge surtout plus, m’ ordonne-t-il alors, d’ un air étrange.

Et pendant un instant, on croirait presque qu’ il panique. La première fois que je le vois comme ça. Mais c’ est qu’ il commence à me faire peur, aussi !

_Ce qu’ il y a ? s’ exclame-t-il , il y a que c’ est la dose pour T-Rex ! Bon sang, Eva, ce que tu as reçu suffit à assommer un T-rex pendant une heure !!! Je vous avais bien prévenus d’ être prudents avec ce truc !
_Mais ça va, dis-je. Je me sens plutôt bien.
_Et c’ est justement ça qui n’ est pas normal !
_Dis tout de suite que tu aurais préféré que j’ y reste !
_Tu n’ as pas l’ air de réaliser, dit-il, sérieusement. Avec ce que t’ as reçu et vu ton gabarit , tu aurais dû dormir jusqu’ à la semaine prochaine, dans le meilleur des cas !
_Dans le meilleur des cas ? demande Casey en déglutissant péniblement. Et dans le pire ?
_Au choix : arrêt cardiaque, coma… Mais certainement pas un réveil au bout de quelques minutes. Ce truc est vraiment très puissant, vous devriez le savoir, depuis le temps. Où est-ce qu’ elle a été touchée ?
_A la jambe,réponds Casey. La jambe droite.

Je comprends pourquoi j’ avais du mal à tenir sur mes jambes, maintenant.
Ivackas examine ma jambe, les sourcils froncés et en ressors une fléchette, qui pour la première fois que je la vois me donne des frissons.

_Tu as de la chance que ça n’ ai pas été plus près du cœur, murmure-t-il .Mais avec une telle dose, ça n’ aurait pas dû changer grand-chose. Je ne comprends pas …

Il range la flèche dans un sachet qu’ il met dans son sac et se tourne vers moi, l’ air perplexe.

_Ce n’ est pas possible que tu aies survécu à l’ AV-392, pas avec cette dose. La flèche devait être défectueuse.
_C’ est impossible, proteste alors Casey. C’ est moi qui ai tout préparé : les flèches, les fusils, et j’ ai tout vérifié trois fois, comme d’ habitude.

Casey est un véritable parano en ce qui concerne le matériel utilisé. Là-dessus, on peut lui faire entièrement confiance. Si quelque chose avait cloché avec quoi que ce soit, s’ il y avait eu même le plus petit défaut, il l’ aurait remarqué. Il est tellement perfectionniste que ça en devient agaçant.

_Quelqu’ un est peut-être entré pour toucher au matériel après que tu l’ aies fait, et a abimé cette fléchette sans le faire exprès.
_Je te répète que non, fait Casey, en prenant un air encore plus vexé. Je reste avec le matériel jusqu’ à ce qu’ on commence l’ entraînement, et c’ est moi qui le distribue au élèves. A chaque fois. Et on a jamais eu ce genre de problème.
_Vraiment bizarre, murmure le docteur. En tout cas, toi, tu vas aller faire un tour à l’ infirmerie, dit-il en se tournant vers moi. Il va falloir que je fasse des examens.
_Mais ça va mieux ! Je vais me reposer un peu et je serai de nouveau en pleine forme !

Peine perdue. Il secoue la tête.

_Je m’ en fiche. On ne sait jamais, l’ anesthésiant peut agir plus tard. Il vaut mieux que je t’ ai sous les yeux si ça arrive.

Il n’ y croit pas trop, ça se voit, mais il veut découvrir ce qui s’ est passé. Il ne manquait plus que ça. On a un examen demain, et le compte rendu de l’ entraînement d’ aujourd’ hui à faire à Quistis. Et comme c’ est moi le chef du groupe, c’ est moi qui suis censé le préparer. Elle va tuer Kern en apprenant ce qui s’ est passé, plus sûrement que n’ importe quelle flèche d’ AV-392. Mais il a l’ habitude, je crois, et ce sera son immunisation à lui. Comme je ne peux pas marcher, Casey et le docteur me portent jusqu’ à l’ infirmerie. Casey promet de repasser, et de prévenir mes parents, ce dont je me passerais bien. Ils vont être furieux. J’ imagine déjà la scène. Kern, qui nous avait accompagnés, s’ avance alors.

_Est-ce que je peux faire quoi que ce soit ? demande-t-il de l’ air le plus ptioyable que je lui aie jamais vu.

Ca le rend malade de se dire que c’ est de sa faute ce qui se passe ( je crois qu’ il a toujours été un peu amoureux de moi, va savoir pourquoi… n’ empêche, c’ est toujours sur moi que retombent ses bêtises, ce qui ne l’ aide pas vraiment à trouver grâce à mes yeux, il s’ en rend compte…), et il sait aussi que demain il va en prendre pour son grade. J’ ai presque pitié de lui.

_Oui, rester le plus loin possible d’ elle, fait durement Ivackas, et pendant un moment, j’ ai l’ impression qu’ il y va un peu fort.

Mais après tout, c’ est mérité. Ivackas vérifie que j’ ai tout ce qu’ il me faut.

_Si ça continue, je vais créer un abonnement spécial pour toi, me dit Ivackas, une fois que je suis installée dans l’ infirmerie. Tu es quand même une de mes plus fidèles patientes.
_Bonne idée. Je pourrais toujours amener mes affaires ici, je gagnerai du temps.
_Sérieusement, Eva, il va falloir que tu fasses un peu plus attention. Entre les fois où tu te blesses toi-même pendant les entraînements et celles où ce sont tes coéquipiers qui le font, un jour il va t’ arriver quelque chose de vraiment grave. En plus, tu monopolises mon infirmerie, grogne-t-il.
_Désolée. La prochaine fois j’ apporterai mon lit avec moi, pour laisser de la place aux autres.
_C’ est ça. Allez, je te laisse. Tu dois te reposer. Je te laisse pour l’ instant. On commencera les analyses un peu plus tard. Au fait, il y a un autre malade juste à côté qui va lui aussi passer la nuit ici, alors si tu entends du bruit, ne t’ inquiète pas. C’ est mon deuxième plus fidèle patient, après tout. C’ est presque aussi catastrophique que toi.

Alors là, j’ aimerai bien savoir qui c’est. Une autre victime de Kern ?

_Je repasse te voir demain à la première heure.

Et il me laisse. Ivackas est un chouette type. Il est jeune pour un docteur, il a 20 ans ( seulement 4 ans de plus que moi, après tout … ) et en plus c’ est vrai qu’ il est pas mal physiquement. Assez grand, cheveux et yeux noirs, la peau mate. Il n’ a pas grandit à Balamb, d’ après ce que je sais, il n’ est même pas de ce continent. Personne n’ en sais trop rien, il n’ est pas vraiment bavard. Mais papa doit le savoir, lui. Après tout, c’ est lui qui dirige la BGU. Ivackas ( parce qu’ il veut autant que possible que nous évitions de l’ appeler docteur ) prend un air sévère et bougon, comme ça, mais c’ est juste parce qu’ il s’ inquiète. Une vraie mère poule, tout le temps à nous donner des conseils, à nous dire de faire plus attention en essayant de prendre un air sévère et une voix autoritaire. Pire que mon père, et ce n’ est pas peu dire.
Ivackas remplace le docteur qui travaillait ici avant et qui est parti il y a un an. Son but, c’ est d’ avoir le moins de boulot possible, comme il le dit lui-même. Il aimerait ne pas avoir à soigner des gens. Il déteste tout ce qui est violence, combats. Mais il dit que si tout le monde est assez bête pour vouloir passer sa vie à se faire taper dessus, très bien, il est pas contrariant, lui, il s’ acharnera à soigner le monde pour lui permettre de se faire taper dessus le plus longtemps possible… Textuel.
Qu’est-ce que je déteste cette chambre… Depuis 10 ans que je viens régulièrement ici, rien n’ a changé, même la peinture sur les murs est toujours la même. C’est vrai que j’ y suis plus souvent que dans ma propre chambre au dortoir. Comme si c’ était de ma faute. Je dois la plupart de mes visites ici à Kern. La première fois, ça a été le lendemain de l’ arrivée de Kern à la BGU. Une de ces nouvelles armes fonctionnant sur le même principe que le boomerang qui a légèrement dévié de sa trajectoire et est venu heurter ma jambe. Un plâtre pendant deux mois. S’ il n’ est pas doué pour viser, ce n’ est pas la force qui lui manque. En tout cas, c’ est comme ça qu’ on a fait connaissance. Inutile de dire que de mon côté, je n’ étais pas tellement ravie.
La porte de l’ infirmerie s’ ouvre. Quelqu’ un entre et se dirige vers mon lit. C’ est Bess. Elle tique un peu en me voyant avec ces badages sur ma tête et sur ma jambe, mais elle s’ efforce de sourire. Elle a l’ habitude de me voir dans cet état, mais ça lui fait toujours un choc.

_Eva ! s’ écrit-elle. Comment est-ce que tu te sens ?
_Ca peut aller. Un peu étourdie, c’ est tout.

Elle rit. Bess rit tout le temps, et c’ est un véritable réconfort de la voir. Bess est ma meilleure amie, avec Casey. C’ est une fille studieuse, rieuse et très jolie, avec ses longs cheveux blonds bouclés. Nous avons le même age. Elle a grandi à la BGU , elle aussi et nous partageons la même chambre, au dortoir.

_Désolée, lui dis-je malicieusement, le docteur vient de partir. C’ est bête, tu es venue pour rien…

Bess s’ est découvert il y a un an un intérêt très vif pour la médecine. Elle qui prétendait depuis toute petite qu’ elle deviendrait la plus grande Seed, elle a changé d’ avis : elle sera le plus grand de tous les médecins…Elle n’ a jamais voulu l’ admettre, mais je soupçonne le docteur Ivackas d’ y être pour quelque chose, bien qu’ à son insu. Et depuis un an, elle tombe souvent malade, ou se blesse régulièrement au cours des entraînements. J’ ai presque cru qu’ elle allait me faire concurrence dans ce domaine. Sinon, le reste du temps elle passe à l’ infirmerie pour discuter avec le docteur. Uniquement de médecine , me jure-t-elle à chaque fois, et je la crois. Elle est trop timide pour lui avouer ses sentiments, et elle refuse déjà de se les avouer à elle-même. En tout cas, il faut reconnaître que Bess s’ y connaît maintenant énormément en médecine, et c’ est souvent elle qui me soigne quand je n’ ai pas envie de prévenir Ivackas. Et elle est très douée, elle fera un médécin formidable, j’ an suis sûre. Bess rougit.

_Arrête de dire des bêtises. Tu sais bien que c’ est toi que je suis venue voir. En tout cas, je constate que tu es assez en forme pour m’embêter avec ça.

Elle me tire la langue et éclate de rire.

_Et tes parents ? Ils sont au courant ?

C’ est à mon tour de grimacer.

_Non, mais ça ne devrait pas tarder. Ils sont en visite à la TGU. Casey va les contacter, je crois.
_Il faut bien qu’ ils le sachent. Allez, un peu de courage,me dit-elle en me tapotant la main. De toute façon, ce n’ est pas comme si tu l’avait fait exprès.

Elle ne comprend pas. Mes parents cherchent la moindre excuse pour m’ empêcher de devenir Seed. Et ces accidents qui m’ arrivent parfois ( comme cela pourrait arriver à tout le monde – ou presque ) sont les meilleurs qu’ ils puissent trouver. Ok, c’ est vrai que je prends pas mal de risques, mais par rapport à ce qu’ ils ont vécu, eux, j’ ai l’impression de ne rien faire. Je n’ ai jamais compris pourquoi ils faisaient ça. Papa a été un grand Seed, et il dirige maintenant la BGU. Il est célèbre dans le monde entier, un véritable héros, tout comme Quistis, et certains des autres professeurs que nous avons ici. Pourquoi vouloir m’ empêcher de faire mes preuves ?
Bess et moi discutons un moment, puis elle m’ annonce qu’ elle doit y aller, il est tard.
En effet il fait déjà nuit, mais je n’ arrive pas à dormir. Il y a toujours cette douleur à la tête qui m’ empêche de fermer l’ œil.
Tiens ? Un bruit ? On dirait que ça vient de la pièce d’ à côté. Ah, oui, ce doit être cet autre malade dont m’ a parlé Ivackas. J’ entends des bruits de draps froissés. La personne là-bas doit se retourner dans son lit de douleur. Il faudrait peut-être que j’ aille voir ? c’ est peut-être pas une très bonne idée. Je ne suis pas infirmière, et il y a plus de probabilté que j’ achève le malade plutôt que je ne parvienne à l’ aider. Tant pis, je vais quand même voir, au cas où il faudrait appeler Ivackas. Je me lève doucement et vais dans la chambre d’ à côté. Je frappe doucement à la porte, puis entre.

_Est-ce que tout va bien ? je demande en essayant de repérer la personne sur le lit.

La personne allume la lumière.
Oh non, pas lui…

_Tiens, tiens… fait le garçon allongé sur le lit, avec de multiples bandages et visiblement pas très en forme ( ce qui ne l’ empêche pas d’ arborer ce sourire en coin que je déteste tant). Eva Leonhart !

Ça y est, mon mal de tête me reprend.

_Tiens, tiens … Etan Almasy ! m’ exclamé-je sur le même ton, avec mon sourire le plus faux. La dernière personne au monde que j’ ai bien envie de voir !
_Moi aussi, je suis ravi de te revoir ; désolé si je ne me lève pas pour t’ accueillir, mais si j’ en étais capable, je n’ aurais rien à faire ici. C’ est gentil d’ être passé me voir, ça faisait longtemps.
_Pas assez. Alors, dis-je en contemplant les bandages qu’ il a sur la tête, est-ce qu’ on t’ a enfin greffé un cerveau ?
_Non. Ils ont estimé que celui-là était encore en état.
_Ah bon ? Parce que tu en avais déjà un ? désolée, je n’ avais pas remarqué…
_J’ espère que je ne t’ ai pas trop manqué. Ca fait tellement longtemps que je suis parti. Allez, je vois bien que tu es curieuse; vas-y, demande-moi ce que tu veux :Combien de villes j’ ai visité … Pourquoi est-ce que je suis dans cet état…
_Je m’ en moque éperduement.

Il attrape plusieurs boites sur la table de nuit, les dispose sur le lit et en retire des cachets. Je le regarde faire en espérant qu’ il s’ étouffe avec.

_Pourquoi je suis parti … combien de personnes est-ce que j’ ai battues… Pourquoi… continue-t-il, comme s’ il ne m’ avait pas entendue.
_Pourquoi est-ce que tu n’ es pas resté où tu étais ? je demande, agacée.
_Eh bien, je …
_Laisse tomber, je n’ en ai rien à faire. Je retourne dormir.
_Tu ne t’ ai vraiment pas améliorée question politesse. Tu pourrais au moins me demander si j’ ai besoin de quelque chose.
_Est-ce que tu veux que je t’ achève ? proposai-je alors avec une sincère bonne foi.

C’ est bien la seule chose que j’ accepterai de faire pour lui. Puisse-t-il mourir de ses blessures dans la nuit ! Mais c’ est connu, ce sont toujours les parasites qui survivent le mieux. Je sors de la chambre en claquant la porte et retourne dans ma chambre. Je suis sûre de ne plus réussir à m’ endormir, maintenant. A travers la cloison, je l’ entends tousser bruyamment, à plusieurs reprises. Je parie qu’ il le fait exprès pour m’ énerver. Ivackas va m’ entendre, demain. Il le sait bien que je ne peux pas supporter Etan. Tout le monde le sait.
C’ est Etan Almasy, bon sang ! Le fils de ce traître de Seifer, qui a tellement fait souffrir le monde entier ! Tout le monde déteste Etan, d’ ailleurs. Je ne connais personne, à la BGU qui puisse supporter ce garçon.
Mais s’ il y a une chose qui a estomaqué tout le monde il y a quelques années, ça a été que Papa l’ accepte à la BGU. Ils ont tous cru qu’ il avait perdu la tête, et franchement, je me demande aussi ce qui a bien pu lui prendre. En tout cas, tout le monde évite Etan comme la peste, ici, et pour autant que je me souvienne, on s’ est toujours détestés, lui et moi. Mais ça devait être écrit. C’ était comme ça avant même que nous ne naissions. Son père et le mien étaient ennemis. Ce sera la même chose pour nous. Mais s’ il y a une chose que je comprends encore moins, c’ est que Papa semble l’ apprécier . Comment est-ce que c’ est possible ? Il lui confie même des missions dans le monde entier , bien qu' Etan ne soit pas encore Seed, et ils discutent souvent tous les deux. Incompréhensible. Bien sûr que ça m’ a fait mal. C’ est moi qui devrait avoir droit à tout ça. Papa sait que ce que je veux le plus au monde, c’ est être Seed, comme lui. Moi, ce que je crois, c’ est que mon père aurait préféré avoir un garçon, mais il n’ a que deux filles, Lena et moi. Alors c’ est lui qu’ il va aider. Mais est-ce qu’ il se rend compte de ce qu’ il fait ? Aider le fils de Seifer ! Je n’ ai jamais vu cet homme, mais il parait que son fils lui ressemble énormément physiquement, et je sais que parfois, ma mère a un mouvement de recul quand elle l’ aperçoit quand elle ne s’ y attend pas, même si elle se reprend très vite et sourit.


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Ce n'est pas facile mais il faut être capable d'aimer ses ennemis, ne serait-ce que pour les énerver.
Rae
Rae
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   Posté le 25-09-2004 à 11:44:56   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

CHAPITRE 2

Comme prévu, j' ai passé une longue nuit blanche, grâce à mon très cher voisin, et lorsque, au matin , « à la première heure », Ivackas arrive, je suis chauffée à blanc. Il m' écoute râler patiemment, se contentant de me demander de baisser un peu le ton, à cause d' Etan, qui est juste à côté et qui est sûrement encore en train de dormir ; ce qui a pour effet direct de me faire hurler de plus belle. Je fiche complètement de savoir que je le réveille, et ça m' est à peu près égal qu' il puisse m' entendre ou non.

_Bon, est-ce que tu as fini ? me demande-t-il, une fois que je ne sais plus de quel malheur de la terre l' accuser.
_Oui, grogné-je. Mais j' ai l' impression que tu n' as pas écouté un mot de ce que j' ai dit.
_C' est possible ; maintenant, c' est à moi de parler. Tout d' abord, je ne t' ai pas dit qu' il était à côté parce que je savais comment tu réagirais et que je devais te garder ici tout de même. Et je n' allais pas non plus jeter Etan dehors…
_M…
_Oui, je sais, ça ne t' aurait posé aucun problème, à toi. Mais j' ai une bonne nouvelle : comme tu sembles être en pleine forme, tu vas pouvoir regagner ta chambre. Je vais faire les examens nécessaires, et tu pourras y aller.

Il tire une seringue de son sac et un produit.

_Qu' est-ce que c' est que ça, encore ?
_Je dois te prélever du sang, pour les analyses, me répond-il.
_Tu crois pas que j' ai eu assez de piqures comme ça depuis hier ?
_Eva, c' est important.
_Très bien, dis-je du ton de l' agneau sacrificiel en tendant mon bras.

Pendant qu' il me prélève 10 000 litres de sang, il me raconte ce qu' il va en faire, toutes les procédures à accomplir, toutes les étapes de la recherches, et pendant un moment je me demande s' il parle toujours français.

_Dis, tu comptes m' en laisser un peu ?
_J' en suis qu' au deuxième flacon, Eva. Tu ne risque pas de finir anémiée, ne t' en fais pas. Allez, ça ira. Ce sera un peu juste pour toutes les recherches que je dois faire , mais bon. On aura les résultats ce soir, je viendrai te voir à ce moment-là. Casey va venir te chercher et te ramener à ta chambre. Et je ne veux pas que tu en bouge, c' est entendu ?

Compte là-dessus, mon vieux.

_Eva, tu m' as bien compris ??!
_Oui, soupiré-je, je suis pas stupide.
_Stupide, non . Mais entêtée, par contre …

C' est pas faux .

_Tu ne bouges pas de ton lit , c' est un ordre! Compris ?
_Oui, Ivackas.

Oh que oui, je le comprends, mais c' est pas sûr que je le fasse ! ^^

_Je me suis mal exprimé. Est-ce que tu vas le faire ?
_Mais oui, c' est bon…
_Promets !
_Ivac…

Ma parole, il lit dans les pensées, maintenant ?

_Promets, ou je te ramène directement dans ta chambre d' infirmerie !
_Très bien, c' est promis…

Bon, c' est vrai que je lui ai déjà fait ce coup-là… Il a l' habitude, il me connaît…

_Tu peux y aller.

Il me donne un produit à l' odeur écoeurante à boire, qui est censé me redonner des forces. Dés que le docteur a le dos tourné , je jette son médicament dans un des pots de fleurs. Casey arrive à ce moment-là et je me dépêche de sortir avant qu' Ivackas ne change d' avis.

_Est-ce que ça va ? me demande Casey.
_Je suis un peu fatiguée, Ivackas m' a prélevé des litres de sang…
_Et les résultats ?
_Ce soir.
_Tu as peur ?
_De quoi ?
_Oh, arrête !

Mine de rien , il me connaît bien, Casey, il sait bien ce que je pense. Ca peut paraître idiot, d' avoir peur de ces maudits résultats. Avoir peur alors que mon problème, c' est que je guéris facilement, que des blessures qui devraient me tuer, ne me font pas plus mal que des égratignures ? Ce que je peux être stupide…

_Laisse-moi tranquille, je grogne.

Il sourit, il voit qu' il a tapé en plein dans le mille. Il me prend la main et la serre fort et pendant un moment, la peur s' en va.

_T' as pas passé une bonne nuit, toi ! Qu' est-ce qui se passe ?
_Etan était à l' infirmerie , aussi.
_Aïe ! Vous vous êtes encore disputés ?
_Comme d'hab. Ca ne change pas . Je peux pas le supporter, il est vraiment insupportable. Je me suis demandé si je n' allais pas en profiter pour le jeter dehors. Heureusement qu' Ivackas a bien voulu que je sorte, j' aurais fini par l' étrangler, je crois .

Nous traversons les couloirs. Ils sont pleins de monde, et voir toutes ces personnes marcher dans tous les sens me donne le vertige . Casey doit me tenir plus fermement. J' aurais dû le boire ce maudit médicament . Nous croisons plusieurs élèves de notre classe, qui viennent me demander comment je me sens . Je n' ai même pas la force de leur répondre . Nous croisons aussi Kern. Il m' offre un bouquet de fleurs en s' excusant encore une fois. Bouquet qui, une fois que nous avons dépassé le champ de vision de celui qui me l' a offert, passe par la première fenêtre que nous trouvons. La dernière fois qu' il m' a offert des fleurs pour s' excuser de m' avoir envoyé à l' infirmerie, il les avait cueillies dans le jardin de la BGU , et il y avait des guêpes cachées à l' intérieur. J' ai pas fait attention quand je les ai prises. Résultat : retour direct à l' infirmerie moins d' un quart d' heure après en être sortie. Alors merci bien.
On arrive dans le dortoir et je me mets immédiatement au lit . J' ai l' impression de ne plus avoir de forces. J' aurais vraiment dû le boire, son fichu produit. Casey me borde comme si j' étais une petite fille, puis me laisse sans que je m' en rende compte. Je suis complètement dans les vapes . Je ne tarde pas à m' endormir.
Je me réveille au bout de quelques heures, plutôt en forme. Et je m' aperçois d' une chose à laquelle je n' avais pas fait attention tout à l' heure . Ma chambre est remplie de cadeaux. Une boîte de mes gâteaux préférés de la part de Casey, un bouquin de la part des professeurs, un magazine sur mon groupe préféré de la part de Bess, etc… Je les adore.
Un bruit attire soudain mon attention. On croirait qu' un troupeau de T-rex cours dans le couloir et se rapproche de ma chambre, de plus en plus. La porte s' ouvre à toute volée. Mais ce n' est pas un T-rex . Pire que ça . C' est ma sœur, Lena .

_EVAAAA ! s' écrie-t-elle en se jetant à mon cou.
_Mmmf … Lena … arrête… tu m' étouffe…

Je me demande si elle sait qu' elle est rentrée parce que je suis censée être gravement blessée… Seigneur, elle a beau n' avoir six ans, elle ne manque pas de force …

_Oh, pardon !

Elle s' assoit à côté de moi, le visage grave.

_ J' ai eu tellement peur ! Maman a dit que tu étais blessée ! C' est pas grave , j' espère ?

Elle a les yeux pleins de larmes, maintenant.

_Mais oui, ça va . Si je peux survivre en vivant avec toi, je vois pas ce qui pourrais me tuer.

Elle rit, rassurée. J' aperçois alors Maman, qui se trouve sur le pas de la porte, à nous observer. Elle me sourit.

_Est-ce que ça va , ma chérie ? demande-t- en entrant.
_Je viens de survivre à une tentative d' assassinat de plus il y a à peine trente secondes, ris-je.
_Lena, laisse ta sœur tranquille, elle a besoin de se reposer .
_Oh, ça va en fait . Ca aurait pu être pire. Ivackas ne comprend pas comment j' ai pu m' en sortir à aussi bon compte, d' ailleurs. Et moi non plus. C' est bizarre, tu ne trouves pas ? Depuis toute petite, j' arrive à survivreà toutes sortes d' accidents dans ce genre sans le moindre problème …
_Tu peux remercier ton ange gardien, sourit Maman. Parce qu' il en a du boulot, avec toi.

Je ris. Maman est tellement jolie ! Elle a une superbe chevelure d' un noir profond , de grands yeux noirs brillants et un sourire magnifique. J' aurais vraiment aimé lui ressembler. Moi, je ressemble plutôt à mon père . Tout le monde le dit. J' ai ses yeux bleus, des cheveux chatains foncés, et son sale caractère, à ce qu' il parait . Pas vraiment grande. Vraiment banale, quoi . Grand-père Laguna dit que je ressemble à ma grand-mère, Raine . Je préfère nettement cette comparaison. Tiens , mais …

_Où est Papa ? je demande.
_Heu , il est …
_A l' infirmerie !! s' écrie Lena. Il est allé voir…
_Lena, tais-toi, tu veux , l' interrompt Maman.
_A l' infirmerie ? Mais qu' est-ce qu' il fait là-bas , je …

Ma voix se coupe, j' ai comme une grosse boule dans la gorge. Maman fait sortir Lena de ma chambre, malgré ses protestations.

_Ma chérie , me fait doucement Maman, je t' en prie ne réagis pas comme ça, il est juste…
_...allé voir Etan, c' est ça ??

J' aurais dû m' en douter. Il est allé voir ce garçon directement, à peine arrivé , et moi, il …

_Eva …
_Non, mais ne t' en fais pas , il n' y a aucun problème , dis-je , la voix tremblante de colère. Sa propre fille a été blessée, mais il s' en moque ; lui, c' est Etan qu' il va voir !! Nooon , il n' y a aucun problème pour moi . Pourquoi ? Ca t' en pose un , à toi ??

Je deviens complètement hystérique, là, mais c' est plus fort que moi .

_Eva, il voulait juste parler au docteur …

J' ai l' impression que je n' arrive plus à respirer et les mots ont de plus en plus de mal à sortir ;j' ai … mal à la gorge ... non ... je ne dois pas pleurer …Reprends-toi, ma fille . Du calme , du calme. Respirer… Maman se lève et se dirige vers la porte.

_Tu es épuisée , je vais te laisser te reposer , je crois que tu ne sais plus ce que tu dis, me dit -elle doucement .
_Oh que si je sais ! Je ne dis que la vérité depuis tout à l ‘heure, tu le sais très bien ! mais vas-y, va le voir ! et dis-lui bien que surtout, c' est pas la peine qu' il se presse de venir me voir . Je suis pas encore mourante. Présente-lui mes excuses.
_Je suis vraiment désolée que tu penses une chose pareille de ton père, Eva, dit-elle tristement avant de sortir et de refermer la porte.

Des larmes de rage coulent sans que je puissent les arrêter . Je … j' ai toujours su qu' il préférait Etan , mais là , je sais pas … j' ai pas pu me contrôler .. c' est pas comme si ça me faisait quelque chose, je m' en fiche après tout . Je … mais … Je crois que je vais dormir …
Comme si ça ne suffisait pas , la porte se rouvre à nouveau, sur une Quistis éberluée .

_Mais qu' est-ce qui se passe , ici ? Je viens de voir ta mère sortir, complètement bouleversée ! Qu' est-ce qu' il y a ??
_Ri… rien du tout, hoqueté-je, alors que je sanglote comme jamais.
_Eva. Je veux savoir .
_Laisse-moi tranquille…
_Eva, qu' est-ce que tu as dit à ta mère ?
_Juste la vérité. Ce n' est pas de ma faute si elle ne veut pas l' admettre.
_C' est à propos d' Etan , c'est ça ?
_Mais qu' est-ce que vous avez tous avec ce garçon !!!

C' est quand même pas croyable ! Pourquoi est-ce qu' il est toujours question de lui ?

_Tu as vu ton père ?

Je lui envoie un regard foudroyant, elle capte tout de suite le message .

_Bon, je n' insiste pas. Je venais prendre des nouvelles, mais je vois que ce n' est pas le moment .

J' arrive à grande peine à reprendre le contrôle de moi-même . Elle me parle de tout et de n' importe quoi, pour me faire penser à autre chose , et au bout d'un moment , ça finit par marcher plus ou moins, je suis plus calme. Elle me parle de Selphie, plus débordante d' énergie que jamais, qui ne devrait plus tarder à éccoucher, maintenant, de nouveaux orphelins arrivés à l' orphelinat dont Edea s' occupe toujours , après toutes ces anées, seule maintenant, puisque Cid est décédé il y a deux ans.
Quistis est un professeur formidable. Elle se démène vraiment pour les élèves. C' est un peu une mère, pour tous les élèves de la BGU , et après maman, c' est la personne que j' admire le plus. Mais elle doit repartir ; il est tard et elle doit préparer des cours pour demain..
On frappe à la porte. Décidément , ils se sont tous donné le mot ou quoi ?? La porte s' ouvre et Ivackas entre. Tiens, je l' avais oublié, celui-là.

_Bonsoir.
_Les résultats ? je demande .
_Heu oui.
_Et ça n' a rien donné ?
_Eh bien … non.

Tu m' étonnes.

_Alors, docteur, qu' est-ce que vous recommandez, maintenant ?
_Tu d…
_Alors là je t' arrête tout de suite, c' est hors de question.
_Mais je n' ai même pas fini ma phrase !
_Oui, mais je sais ce que tu vas dire.
_Alors, pourquoi est-ce que tu me l' as demandé ?
_Je suis fatiguée, Ivackas . Ca a juste ralenti ma réaction. Je n' irai pas voir le professeur Geyser.

Ca fait des années qu' il me fatigue avec son Grand Professeur Geyser, le génie, la légende . En fait , c' est rien de plus qu' un vieux dingue. Mais Ivackas l' admire , que dis-je, l' adule, pour tous les grands travaux qu' il a menés.

_C' est la seule solution. Il n' y a que lui qui puisse découvrir ce qui se passe.
_Il est complètement sénile !
_Ne parle pas comme ça de lui ! c' est un très grand savant, je te signale! Il saurait sûrement résoudre ce mystère.
_C' est non.
_J' ai parlé à ton père.

Et voilà.

_Il est d' accord .

J' aurais dû m' en douter.

_J' arrive pas à croire que tu m' aies fait ça !
_Enfin, c'est pour ton bien !
_Et ça ne compte pas si je ne suis pas d' accord ?
_Non. Tu as rendez-vous dans deux jours.
_Tu me le paieras.
_D' accord . Autre chose ?
_Je suis tout le temps fatiguée . Ca va durer combien de temps, encore ?
_Je t' avais dit de boire le médicament .
_Qu' est-ce qui te fais croire que je ne l' ai pas fait ?
_Mon géranium crevé.
_Il est crevé , et tu voulais que je boive ça ??
_Eva, ce produit n' est généralement pas fait pour les plantes. Il faudrait que tu comprennes que si je te dis ou je te donne quelque chose, c'et pour ton bien . De toute façon, d' ici demain, tu iras mieux. Tu pourras te lever . Mais pas question de retourner en cours ou aux entraînements avant une semaine.
_Une semaine ? t' es fou ! Je ne peux pas rester une semaine sans aller aux cours !!
_Il faudra bien.
_T' es marrant, c' est pas toi qui doit tout rattraper , après !
_Qu' est ce que tu veux que je te dise. Il faut ce qu' il faut.
_Mais qu' est-ce que je vais faire en attendant ?
_J' en sais rien . Mets-toi au tricot . Fais-toi un joli pull. Allez, il faut que j' y aille.

Il sort. Je t' en ficherai, moi des tricots.
Rae
Rae
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   Posté le 25-09-2004 à 11:57:52   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

CHAPITRE 3

Je passe deux jours abominables, où la BGU entière semble s' être succédée dans ma chambre pour vérifier que je ne fais pas n' importe quoi. Même mon père, le grand, le puissant et très occupé Squall Leonhart a daigné se déplacer pour prendre des nouvelles. Deux fois, même. Je suis flattée. Mais comme il n' avait pas grand-chose à me dire et semblait à des milliers de kilomètres , et que de mon côté j' étais persuadée qu' il n' avait qu' une envie, s' en aller le plus vite possible, la conversation n' a pas été très gaie. Je lui en veux à mort pour ce rendez-vous qu' il a pris pour moi avec le docteur Geyser à Lunatic Pandora Laboratory, mais nous n' en parlons pas. Il est juste venu comme ça et essaie de discuter sans en avoir vraiment envie. Pour dire qu' il est venu, quoi. Lui, je parie qu' il a parlé avec Maman. De toute façon, il me laisse vite. Il est trèèèèès occupé, comme toujours, le boulot, tu sais ce que c' est… Non, en fait, il ne donne pas d' excuse, c' est vrai. C' est comme ça, c' est tout; il a mieux à faire, je suppose.
Pour l' instant Bess est avec moi. Elle se prépare, elle doit sortir. Et moi, il faut que je reste, parce qu' on viendra me chercher d' une minute à l' autre pour partir. Assise sur mon lit, je la regarde se pomponner. Je sais déjà où elle se rend.

_Tu as besoin de quelque chose ? me demande-t-elle. Je vais voir Ivackas, il faut que je lui apporte un dossier.
_Non, merci, bougonné-je,trop énervée pour penser à me moquer d' elle.
_Un message à lui transmettre ?
_Dis-lui que je le hais.
_OK ; autre chose ?
_Que je le maudis.
_D' ac. C' est tout ?
_ Demande-lui s'il n' a plus de ses cachets miracles contre la douleur. J' ai tout le temps mal à la tête…
_Ok. Allez, ne boude pas, je suis sûre que tout va bien, sourit-elle, se voulant rassurante.

Elle m' envoie une bise de la main et s' en va. Je m'accoude à la fenêtre en soupirant. J' espère qu' elle a raison, comme toujours. Je me sens d' une humeur excécrable. Il va se passer quelque chose, aujourd' hui, et je ne suis pas sûre de vouloir découvrir ce que c' est. Tout à coup, un ombre passe devant et mes yeux et je sens deux mains sur mon visage.

_Devine qui c' est ?? fait une voix que je connais bien.
_Zell !

Il me libère et me laisse me retourner.

_Alors, comment ça va, ma belle ? demande-t- il en me serrant contre lui.
_Ca pourrait être mieux. Quand est-ce que tu es arrivé ? lui demandé-je.
_Il y a quelques minutes, je suis venu directement te voir.
_C' est gentil. Pitié, pitié, pitié, dis-moi que tu es venu m' emmener loin d' ici, que tu vas me cacher sur une île déserte et que personne ne nous retrouvera jamais… le supplié-je.
_C' est presque ça. C' est moi qui doit te conduire à Lunatic Pandora.
_Espèce de traître.
_Désolé, ce sont les ordres du grand chef. Mais il ne m' a pas dit pourquoi. Qu' est-ce qui se passe ?
_Je dois aller voir Geyser.
_Il est encore vivant, celui-là ?
_Comme tu dis.
_Tu as encore eu un accident, c' est ça ?
_Euh… oui, mais ça va mieux, t' inquiète. Mais ils se sont tous ligués contre moi, Papa, Maman, Ivackas…
_C' est juste qu' ils se font du souci, tu sais.
_Tu parles …
_Allez, ne boude pas, jeune fille, fait-il, en m' ébouriffant les cheveux comme il avait l' habitude de le faire quand j' étais petite. Tonton Zell est là !
_Très drôle.

Zell est quelqu' un qui ne peut pas rester en place. Il y quelques années, il a appris à piloter, et maintenant, on ne le voit quasiment plus à la BGU. Ca a commencé quand sa femme est morte, il y a quatre ans. Il n' en parle pas et il a toujours l' air joyeux, mais on sait tous qu' il a énormément souffert, il l' aimait plus que tout. Maintenant, Papa l' envoie en mission dans le monde entier, et Zell, qui a toujours été trop indiscipliné pour être professeur, fait pourtant un très bon intermédiaire, et résout avec succès de nombreux problèmes politiques un peu partout.
Je suis contente qu' il soit revenu, ça doit faire des semaines qu' il est parti, il m' a vraiment manqué. Et c' est vrai que je le considère comme un oncle. Ici , tout le monde l' adore, pour les élèves, c' est plus un copain qu' autre chose, car malgré son âge, il semble à peine plus mûr que la plupart d' entre nous… On discute pendant un moment ( trop court ! ) de tout et de rien, puis il se lève.

_C' est pas tout, mais je dois aller préparer le vaisseau, moi.
_Il n' y aurait pas un moyen de te soudoyer pour te convaincre du contraire, je suppose ? demandé-je sans grand espoir.
_Aucune chance, rit-il.

Il me fais un clin d' œil, et me laisse à mes pensées noires.
Peut-être que je pourrais m' échapper. M' enfuir d' ici et aller vivre ailleurs. J' en ai assez que tout le monde veuille m' empêcher d' être ce que je voudrais être, m' empêcher de faire ce que je veux, comme s' ils savaient mieux que moi ce dont j' ai besoin. Je veux être Seed, le plus grand Seed. Mes parents disent que je sais pas ce que c' est ; qu' il faut être prêt à renoncer à soi, à ce qu' on est réellement pour se plier à la règle ; c' est vrai que de ce côté, je suis plutôt mal partie… Mais s' ils disent ça, c' est qu' ils ne veulent pas que je fasse mes preuves, j' en suis sûre. Seigneur, quelle honte ! J' ai des parents célèbres, des héros dans le monde entier, et tout le monde m' empêche de faire quoi que ce soit pour m' en montrer digne. Ils sont en train de m' étouffer et ils ne s' en rendent pas compte. Partir d' ici, oui. Si je ne peux pas être ce que je veux ici, je le serais ailleurs, de toute façon. C' est moi qui déciderai de ma vie. Allez, ça doit pas être très compliqué. Avoir une nouvelle vie. La liberté. Tout ce dont j' ai toujours rêvé. Il suffirait de…
Même pas la peine d' y penser, ma vieille. Quoi que tu fasses, on te retrouvera. De toute façon je ne sais même pas si j' aurais réellement le courage de le faire. Je tiens trop à la BGU, à mes amis et à mon confort, je ne pourrais jamais les quitter. C' est pathétique. Le plus gros obstacle à ma liberté, en fait, c' est moi-même, pas la peine de se mentir.
Un quart d' heure plus tard, branle bas de combat dans les couloirs, ils viennent à dix pour m' amener jusqu' à l' Hydre, comme s' ils redoutaient que je ne m' enfuie. Je m' attends presque à les voir brandir une camisole de force, mais finalement ça n' a pas l' air d' être dans leur intention.
Tiens, Papa et Maman sont du voyage ! Ca alors. Ils ne doivent rien avoir de mieux à faire aujourd' hui. Ils m' attendent à côté de l' entrée du vaisseau. Lena n' est pas là, par contre. Maman s' approche de moi, sourit et me prend la main. Bon sang, je n' ai plus dix ans, qu' est-ce qu' il lui prend ?
Nous montons dans l' Hydre et nous nous installons. Ce vaisseau n' est pas le vrai Hydre, bien sûr. L' original est une antiquité, maintenant. Celui dans lequel nous nous trouvons est en fait une copie de celui que mes parents ont utilisé il y a vingt ans. Des ingénieurs travaillant à une autre Université l' ont construite sur le même modèle, en l' améliorant. Et le résultat et grandiose. C' est le vaiseau parfait pour parcourir le monde. Zell le bichonne comme si c' était la huitième merveille du monde.
Le voyage est ennuyeux à mourir, même si mes parents essaient par tous les moyens de me faire oublier le but du voyage et de se montrer rassurants.
On arrive au laboratoire au bout de ce qui me semble être très siècles. C' est la première fois que je viens ici et c' est plus grand que tout ce que je m' étais imaginé. Et du coup, c' est aussi terriblement intimidant. Le batiment est immense, d' un style plutôt moderne malgré son ancienneté. Lunatic Pandora est aujourd' hui à la pointe de la technologie, on y fait des recherches très importantes, toutes menées par de très grands et respectés scientifiques venant du monde entier. Et aujourd' hui, le cobaye, ce sera moi. Une envie quasi irrésistible de prendre mes jambes à mon cou me prend soudain.
Papa est le premier à entrer. Il doit bien connaître l' endroit, il entre sans hésitation. Tout le monde a l' air de le reconnaître et le salue en souriant. Nous allons directement voir le professeur. Lui, je l' ai déjà rencontré auparavant, parce qu' il était venu en visite à la BGU. La première fois, j' étais toute petite (je devais avoir 4 ou 5 ans ) et il m' a fait tellement peur que je lui ai vomi dessus alors qu' il ne faisait que m' ausculter. Les autres fois, je me suis contentée de me cacher dans la BGU pour qu'on ne m' oblige pas à le voir. Et je ne me montrais que lorsque que j' étais sûre que lui n' était plus là. Si seulement aujourd' hui ça pouvait être l' inverse.
Mais non. Il est là, à son bureau. Il se lève ( ce qui ne l' empêche pas d' être plus petit que mon père de quelques têtes) avec de grandes démonstrations de joie que je trouve ridicules. Mes parents le saluent, et on en vient directement au problème : moi, évidemment. Quand le professeur bigleux pose ses yeux sur moi, je sens mon estomac se nouer, et je n' espère qu' une chose, c' est de ne surtout pas rendre mon petit déjeuner. Il me fait m' asseoir et commence les quelques examens de base. Non je ne suis pas malade, oui, mes réflexes sont bons… Oui, je peux respirer plus fort… Puis il se tourne vers mes parents.

_Bon, za m' a l' air bon, tout za, zozote-t-il. Et la petite n' a pas de G-Forze, bien zûr ? Parze que le test auquel nous zallons brozéder ne peut se faire que sur une personne zans G-Force, parze que nous ne savons pas encore quels pourraient être les zeffets.
_Non, elle n'a pas de G-Force, fait mon père.

Evidemment que je n'en ai pas, je se suis pas encore Seed, on passe l' examen dans deux semaines, et nous allons avoir nos G-Forces deux jours avant. Et ce sera le plus beau jour de ma vie !

_ Très bien, très bien, continue-t-il, s' adressant à mes parents, comme si je n' étais pas là ou que j' étais trop stupide pour comprendre. Nous zallons donc procéder au test. La jeune fille doit zaller dans zette pièce que vous voyez. ( il nous montre une grande salle , qui se trouve juste en face de nous et dont nous ne sommes séparés que par un immense mur de ce qui me semble être du verre,
mais qui est en réalité, nous apprend avec un enthousiasme et une fierté mal contenus le graaand professeur, un alliage du plus résistant métal que leur technologie a réussi à rendre aussi transparent que du cristal) et l' intérieur est digne d' un film de science fiction, avec ses murs immaculés, le fauteuil se trouvant pile au milieu de la pièce et divers machines se trouvant autour. Je peux même m' imaginer l' odeur du désinfectant. ) Elle sera complètement isolée et nous ferons les zexamens depuis zette console que vous voyez.

Bref , eux ils vont rester tranquillement assis ici, pendant que moi je me trouverai dans cette cage de verre comme un animal de laboratoire. Maman n' a pas l' air très convaincue non plus, et elle lance un regard inquiet à mon père.

_Vous êtes sûr que tout ceci est nécessaire ? demande-t-il, les sourcils froncés.

Le professeur lui renvoie un regard exagérément offensé, et assure, jure ses grands dieux qu' il n' y a pas plus fiable. Et qu' après tout,c' est lui qui avait demandé son aide, et qu' il pouvait toujours changer d' avis . C' est qu' il se vexe, le bonhomme ! Je trouverai presque la situation comique si elle n' était pas aussi critique pour moi. Mon père me jette un regard hésitant, puis il se tourne vers ma mère. Dis non, pitié, dis non …

_Très bien, dis finalement Maman, faites tout ce qui sera nécessaire. Nous vous tous faisons confiance.

NON ! Je lui fais pas confiance, moi ! Dites-donc ! Ca compte pas, ce que je pense, moi ?!! Y' en aura pas un qui aura l' idée de me demander mon avis ??
Mais je reste là, abasourdie, sans parvenir à sortir un son. Et quand l' assistante du professeur vient me chercher pour me préparer, je la suis comme un zombie, sans même pouvoir prononcer un seul mot. Elle me conduit dans la chambre d' isolement, et depuis le siège où je m' allonge, je peux les voir, tous, en face de moi. Mais je ne les regarde pas.
Même Maman ; même Maman a voulu qu' on me fasse ça. Je savais que ce qui pouvait m' arriver importait peu à Papa , mais Maman … Ca , je ne l' aurais jamais pensé. Sans que je m' en aperçoive, l' assistante est sortie . J' entend juste un clic qui montre qu' ils ont verrouillé la pièce. Mais … C' est quoi, ces trucs ??! Des sortes de bras métalliques s' approchent de moi, j' ai l' impression d' être en plein cauchemard. Je ne peux pas bouger, je me rends compte que je suis attachée au fauteuil. Les paroles de l' assistante me reviennent maintenant à l' esprit ; c' est pour, au cas où je m' endormirais, pour éviter que je ne tombe ou de ne bouge pendant qu' ils feront leurs analyses. Ca ne me rassure pas, j' aimerais autant pouvoir bouger si j' en ai envie. Le fait est que je suis morte de trouille, qu' est-ce qu' ils vont me faire , au juste ? Et après , ils s' étonnent que je supporte pas les médecins !
Je tente par tous les moyens de ravaler mes larmes, il ne faut surtout pas qu' ils me voient pleurer. Mais j' ai l' impression que les murs se referment sur moi. J' ai la tête qui tourne , et on dirait que le pièce devient de plus en plus petite… Je… il fait … froid ...

***********************************
_Qu' est ce qui se passe ??!
_Je … Je ne comprends pas… bafouilla le professeur en tapant frénétiquement sur le clavier.

On ne voyait plus la jeune fille. Quelque chose semblait s' être déposé sur les murs transparents et rendait tout flou, on n' y voyait plus rien… On aurait dit de … oui, de la glace. Une fine couche de glace s' était déposée sur le mur et le rendait totalement opaque. Et des bruits étranges provenaient de l' intérieur, des bruits d' objets métalliques projetés contre les murs, mêlé à un bruit de puissant souffle de vent, comme si une véritable tempête avait lieu à l' intérieur. Mais ça ne pouvait pas être Eva. Elle était attachée.

_Arrêtez tout ! Ouvrez les portes ! Hurla Squall.
_Mais... Mais … jee ne peux pas … la procédure a commencée , on ne peux plus ouvrir ! bégaya le professeur..
_Ouvrez cette porte toute suite ! laissez- moi voir ma fille ! Cria encore Squall, bouillonnant de colère..
_Mais je vous dis qu z' est impozible ! La pièce est verrouillée, et jee n' ai aucun moyen de l' ouvrir ! Quelque chose bloque tout le système.

Squall se dirigea vers la porte en bousculant les assistants paniqués. Il se jeta désespérément contre elle a plusieurs reprises pour la défoncer, sans succès, mais il n' abandonna pas.

_EVA !! hurla-t-il en cognant de toutes ses forces . EVAAA ! Est-ce que tu m' entends ? Réponds !!!

Puis soudain tout cessa. Le bruit dans la salle cessa. Squall recula et alla rejoindre le docteur Geyser.

_Qu' est-ce ce qu' il y a encore ? demanda-t-il.
_Je … je ne sais pas , je…

Tout d' un coup, le mur redevint transparent, la glace avait diparu. Ils purent apercevoir la jeune fille, toujours attachée au fauteuil, mais inconsciente. Et devant elle se trouvait…

_Qu' est-ce que c' est que ça ?? demanda Squall.

Un être étrange se tenait debout, face à eux, flottant au dessus du sol. On aurait dit une jeune fille, mais elle avait de longs cheveux d' un bleu nuit, la peau très claire , bleue elle aussi, et des pierres blanches et brillantes semblaient y être incrustées. Et elle semblait en colère. D' immenses cristaux de glace scintillants remplissaient toute la salle et entouraient le fauteuil où se trouvait Eva. Squall allait de nouveau se diriger vers la porte quand Linoa le retint par le bras. Il crut qu' elle allait avoir un malaise, et à ce moment là, un vent froid empli la pièce. Squall observa sa femme, surpris. Pourquoi invoquait-elle Shiva ?

_Attend… murmura Linoa à son mari.

Shiva se dirigea en flottant dans les airs vers le mur transparent, vers l' être qui se trouvait avec Eva. Ils n' étaient séparés que par ce mur. Les deux êtres restèrent un moment à s' observer mutuellement, immobiles. Tout le monde retenait son souffle dans la pièce. Puis, lentemant, Shiva posa une main sur le mur ; la créature posa la sienne, au même endroit que Shiva , qui se tourna alors vers Linoa.

_C' est … Shiva est sa mère … murmura Linoa, stupéfaite.
_Quoi ??

A ce moment, la porte s' ouvrit, et les assistants, Squall et Linoa se précipitèrent à l' intérieur auprès d' Eva. La créature restait là à les observer, froidement, mais, inquiets pour la jeune fille, ils n' y prêtaient pas attention.
Ils détachèrent Eva, qui repris conscience au bout de quelques minutes.


*********************************

Quand j' ouvre les yeux, je vois dix têtes qui m' observent. Qu' est-ce qui se passe, encore ?

_Eva ! s' écrie ma mère. Oh, ma chérie !

Elle sanglote. Mais qu' est-ce qui lui arrive ? Avant que j' ai pu dire quoi que ce soit, Papa se penche sur moi et me serre dans ses bras. Alors là je rêve… Ou je suis tombée dans un monde parallèle, je sais pas. Il met un moment avant de bien vouloir me lâcher.

_Qu' est-ce qui vous arrive ? je leur demande.
_ Tu … tu ne sais pas ?
_Non. Quoi ?

Je me redresse. Je suis toujours dans le fauteuil, mais détachée. Ils ont tous des têtes à faire peur. Et … la salle est dévastée.

_Qu' est-ce qui s' est passé, ici ?

Ils se lancent des regards perplexes. Mais qu' est-ce qu' ils ont, à la fin ? J' ai dû tomber dans les vapes, et il s' est passé quelque chose. En tout cas ces horribles trucs métalliques ne sont plus, ils gisent en miettes sur le sol … Mais qu' st-ce qui a fait ça ?? Puis j' aperçois … Qu' est-ce que c' est au juste ? Une … créature étrange, ressemblant bizarrement à Shiva, le G-Force de ma mère. Elle est grande, fine, a la peau bleutée et de grands yeux noirs perçants. Ses longs cheveux bleu nuit retombent le long de son dos, et elle semble flotter dans les airs. Elle a de nombreux bracelets d' argent aux poignets et au chevilles. Elle s' approche de moi en me fixant, puis me prend la main et la serre doucement. Sa main est froide, mais ce n' est pas un froid désagréable. Un sentiment bizarre m' envahit… de la sécurité, du bien être … Je ne l' ai jamais vue , mais … Il me semble pourtant l' avoir toujours connue, ce n' est pas une étrangère…Elle me fixe intensément, et il me semble presque l' entendre parler, alors qu' elle n' a pas ouvert la bouche. Sheba
Puis elle disparaît. C' était qui ?? Tout le monde me dévisage, inquiet, et je mets des heures à leur faire comprendre que tout va bien. Je voudrais bien qu' on m' explique ce qui s' est passé, par contre …
Ils me font sortir, et m' installent dans une petite pièce pour que je me repose, pendant que mes parents vont parler au professeur, juste à côté . Ils ne doivent pas se douter que je peux les entendre.

_Comment va la jeune fille ? demande-t-il .
_Est-ce que vous pourriez nous expliquer ce qui s' est passé ? demande mon père.
_Je fous avais prévenu ! Fit le professeur. Elle ne devait pas avoir de G-Forze !
_Un G-Force ? C' était un G-Force, ce truc ??!
_Za me zemble clair pourtant ! De toute façon, nous avons relevé une activitémagique très intenze, de la même fréquence qu' un G-Force, ce qui confirme ce que je viens de vous dire…
_Mais enfin… Eva n' a jamais eu de G-Force à ma connaissance, et je ne vois pas comment elle a pu capturer celui-là.
_Fous defriez peut-être demander à fotre épouse… Elle semble savoir mieux que nous ce gui se passe.
_Linoa ? Qu' est-ce qui s' est passé tout à l' heure ? Pourquoi est-ce que tu as invoqué Shiva ?
_Je ne l' ai pas invoquée ! Elle est venue toute seule, sans que je puisse faire quoi que ce soit ! Et … ça a été vraiment étrange, comme si à ce moment là, je pouvais lire dans ses pensées.
_Tu as dit que la créature qui se trouvait avec Eva était la « fille » de Shiva.
_C' est ce que Shiva a dit. Enfin, elle ne l' a pas réellement dit, mais j' ai ressenti ses sentiments. C' est sa fille.
_Comment est-ce possible ?? demande mon père.
_Mmmh… Quand fotre femme était enzeinte, il y avait beaucoup de pressions sur vos épaules à tous les deux. Za a été une très mauvaise période pour vous, avec tout ze qui z' est passé, les problèmes avec les pouvoirs de votre femme... Je ne zuis évidemment sûr de rien, mais je crois que c' est tout ce stress, toute cette peur pour votre enfant et la volonté de le protéger qui a créé ce G-Force. Grâce à vos pouvoirs de sorcière, vous avez pu le créer, à partir de Shiva ; et le G-force est né en même temps que votre fille, et est resté en elle.
_C' est possible, murmure, Maman.
_Et ce qui s' est passé tout à l' heure, c' était une sorte de réaction de défense, vous pensez ?
_Probablement. Maintenant, il z' agit d' en apprendre plus sur ce G-Force, nous devons faire un scan, pour connaître ses caractéristiques, savoir s' il n' est pas dangereux.

Papa râle, dit que j' ai subit assez d' examens pour aujourd' hui, mais finit par reconnaître que c' est nécessaire. Ils m' appellent donc. Heureusement, un scan, ça n' a rien de très effrayant, on en a fini en moins d' une minute. Le professeur et ses assistants se retirent un instant pour analyser les résultats, mais ils reviennent vite.

_Bon, fait l' assistante, en nous montrant les papiers. Il s' agit d' un G-Force maitrisant la magie des glaces , comme on peut s' en douter, puisqu' il a été créé à partir de Shiva. Et il peut utiliser l' eau, le vent. Mais il possède aussi des pouvoirs de protection : bouclier, aussi bien contre la magie que contre les coups physiques, ce qui répond à la question qui vous menait ici.

Oui, ça explique en effet comment j' ai pu survivre à tous ces accidents… c' était mon G-force qui me protégeait, en réalité . Ca me rassure tout de même. Je n' ai pas de « super pouvoir » bizarre , je ne suis pas anormale, au moins. C' est juste un G-Force. C' est Sheba. C'est son nom que j' ai entendu tout à l' heure, c'est elle qui m' a parlé, j' en suis sûre.

_Ce G-Force est fabuleux, et ses pouvoirs sont immenses. C' est réellement fascinant, dire que c' est vous qui l' avez créé ! finit l' assistante en s' adressant, admirative, à ma mère. C' est vraiment incroyable ce que peut faire l' amour d' une mère pour protéger ses enfants, rit-elle.

C' est Maman qui, voulant me protéger, a inconsciemment créé ce G-Force… En effet, c' est vraiment incroyable, je n' en reviens pas…
Donc, Sheba possède la magie des glaces, de l' eau, de la défense. Wow, ça fait beaucoup d' un coup ! Moi qui attendais avec impatience le jour où j' aurais enfin un G-Force ! Alors que j' en ai depuis que je suis dans le ventre de ma mère ! Ca , c' est de l' ironie. Et je n' ai plus qu' une hâte, soudain : m' entrainer avec Sheba, voir de quoi elle est capable. Je suis sûre qu' on arrivera à faire des trucs grandioses ! Et je deviendrai une très grande Seed, maintenant, j' en suis sûre ! Il ne me manquait que le G-Force parfait ! Et ça y est, je l' ai !
Puisque nous avons découvert ce que nous étions venus chercher, nous repartons, inutile de s' attarder. Moi, ça me va très bien, j' ai hâte de sortir d' ici et puis mon père a du travail à la BGU. C' est dommage, parce que du coup, nous n' aurons pas le temps d' aller passer voir grand-père, à Esthar. Nous devons rentrer directement.
Le voyage se fait en silence. Personne ne sait quoi dire. Je ne reviens toujours pas du geste que Papa a eu, tout à l' heure. Il avait l' air … inquiet? J' aurais jamais cru une chose pareille. Je jette un regard discret vers lui ; il est assis dans son coin, en train de réfléchir à je ne sais quoi, le visage impassible. Je crois qu' on a tous eu la trouille de notre vie. Ca suffira pour aujourd' hui. A chaque jour suffit sa peine.
Rae
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   Posté le 25-09-2004 à 12:04:10   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

CHAPITRE 4

Nous sommes convenus, mes parents et moi, sur le chemin du retour, que nous ne parlerions de ça à personne. D' une part parce que ça ne les regarde pas, et d' autre parce que ça ne ferait que créer des problèmes inutilement.
A peine arrivée, à la BGU, tout le monde me demande les résultats, histoire de savoir si je suis mourante, et si ma chambre sera bientôt libre, je suppose. Comme je ne m' arrête même pas pour répondre, ça chuchote dans tous les coins et ça me regarde comme une bête curieuse, mais c' est le cadet de mes soucis. Je dois faire face à un problème autrement plus important. J' ai faim. Je me dirige vers la cafétéria, ignorant royalement les cris désespérés de Meryl, qui m' appelle depuis dix minutes de l' autre bout du couloir, en faisant de grands gestes de la main. Ca attendra. J' accélère le pas et j' arrive à la semer tout à fait.
J' entre dans la cafétéria; j' ai de la chance, il n' y a pas beaucoup de monde, la queue n' est pas très longue. Je demande un gâteau au chocolat et vais m' installer dans un coin à l' écart, pour profiter d' un instant de solitude et repenser tranquillement à tout ce qui s' est passé aujourd'hui.
Instant de solitude qui ne dure pas très longtemps. Méryl arrive, toute essoufflée et rouge comme une tomate d' avoir trop couru. Je me tasse sur ma chaise, en priant pour qu' elle ne me voie pas, mais cette fille doit avoir un sixième sens ou un radar, je sais pas : à peine entrée elle se dirige directement vers ma table. Pas moyen d' être en paix quinze seconde.

_Eva, ça fait une heure que je t' appelle ! T' aurais pu m' attendre ! fulmine-t-elle.
_Désolée, je t' avais pas entendue.

Ce mensonge est gros comme une montagne, je ne vois pas comment on pourrait de pas l' entendre quand sa voix résonne dans tout l' immeuble, mais elle le gobe. Elle s' assoit sans que je le lui aie demandé et entre immédiatement dans le vif du sujet.
En fait, elle voulait juste me parler du bal qui aura lieu samedi parce que c' est elle qui l' organise, avec quelques autres idiotes de dernière année, mais elle manque de bras ; elle veut savoir si ça m' intéresse. Tu peux toujours courir, ma fille. Je le lui dis évidemment un peu plus gentiment. Mais elle insiste, et s' il y a une chose qui m' énerve, c' est bien ça. Elle a vraiment mal choisi son moment pour venir m' embêter. Je finis par carrément l' envoyer balader. Tant pis pour elle, elle l' a cherché.
Je compte même pas y aller, à son fichu bal, de toute façon. Comme si j' avais que ça à faire. Aller gigoter devant tout le monde sur une piste de danse … pffff… Par contre, la soirée du bal est le moment rêvé si on veut être un peu tranquille dans la serre de combat pour pouvoir s' entraîner sans être embêté, ce qui n' arrive pas souvent; en plus comme tout le monde est occupé à s' amuser, elle reste ouverte plus longtemps.
Vexée, et voyant que je fais plus grand cas de mon gâteau que d' elle, Méryl s' en va chercher d' autres victimes. Quand elle n' est pas en pleine crise d' hystérie, c' est une vraie sangsue, celle-là.
J' ai expliqué moi-même à Ivackas le fin mot de toute l' histoire, je lui ai parlé de Sheba, et tout, et il n' en revenait pas. Mais il est rassuré, du coup et content de connaître enfin la vérité. Il me jette même un regard triomphant : « Tu vois, j' avais raison de t' envoyer voir le professeur Geyser ! ». Impossible de lui faire comprendre que le professeur n' y est pour rien, on passe une heure à se battre à ce sujet, et je finis par abandonner.
Au bout de quelques jours, on m' autorise enfin à retourner en cours, les gens ont à peu près oublié toute cette histoire et ils me laissent tranquilles. Mais j' ai un sacré retard à rattraper, notamment sur mon entraînement physique, et il faut que je mette les bouchées doubles si je veux être en forme. D' autant plus qu' il y a autre chose que je veux faire : m' entraîner avec Sheba. Mais parents me l' on défendu avant quinze jours, histoire de me laisser le temps de me remettre. Trois jours ne sont pas passés que je m' y mets. Les débuts sont laborieux, je n' ai jamais invoqué de G-Force, et j' ai remarqué chez Sheba une certaine tendance à n' apparaître que quand elle le veut bien. En plus, j' ai un peu de mal à la contrôler, elle a vraiment une puissance phénoménale. Bilan : deux vitres cassées, un mur légèrement fendu… Tout ça sera évidemment à cacher au plus vite. Etant donné que je ne suis pas censée m' entrainer, je suis venue le faire de nuit, quand tout le monde dormait, afin de n' être vue par personne. Mais Sheba et moi finissons par nous entendre, et elle commence à m' écouter.

_Tu crois qu' Ivackas va m' inviter pour le bal ? me demande pour la centième fois Bess.
_Oui, j' en suis certaine…

Bess déprime en ce moment, elle angoisse à cause de ce fichu bal, elle a peur qu' Ivackas ne veuille pas y venir - ou pire, qu' il invite quelqu' un d' autre. Et toutes les filles de la BGU sont dans cet état-là. Je vous jure … Les garçons, c' est pas mieux, d' ailleurs. Eux, ils restent tous timides dans leur coin, pétrifiés à l' idée que la fille qu' ils voudraient inviter ait déjà un cavalier. J' ai reçu une demande anonyme de Kern ( comme si je ne reconnaissait pas son écriture ! Il signe « un admirateur secret » et écrit que si je veux le connaître, j' aurais qu' à l' attendre le soir du bal à côté de l' ascenseur et qu' il portera une rose… non mais je vous jure !! je me demande où il a bien pu trouver ça …), une d' un autre garçon de la classe, et je les ai refusées toutes les deux. Casey, qui ne sait pas trop qui inviter m' a vaguement proposé de l' accompagner, mais je lui ai expliqué que je ne comptais pas y venir, et il a compris. C' est la même chose tous les ans. Bref, les élèves de la BGU ne vivent plus depuis une semaine. Pour ma part, je me concentrer sur l' examen qui aura lieu vendredi.

_Eva, ton manque absolu de romantisme est vraiment désespérant… soupire Bess.

Je finis par la convaincre de se préparer, parce que les cours vont commencer dans une minute, et à ce stade-là on va arriver en retard. La chambre est dans un état indescriptible, avec tout un tas de mouchoirs qui traînent partout, et tous ses vêtements jetés sur le lit. On sort du dortoir en courant, et on file à toute vitesse vers la salle de cours. J' ai beau être la fille du directeur, le règlement ne s' applique pas moins à moi. Bess et moi, nous nous installons au fond de la salle ; nous avons de la chance, ce n' est qu' à ce moment qu' arrive l' instructrice. C' est Maura Ettpin qui nous fait cours. C' est une ancienne élève de Trabia, qui est finalement venue enseigner ici. Sympa , sans plus. La trentaine. C' est un bon instructeur, ses cours sont biens, elle les rends très vivants, et les élèves les adorent en général. Son domaine de prédilection, c' est l' histoire. Et moi, j' ai horreur de ça. Bess est trop occupée à déprimer pour suivre réellement le cours, mais Casey, assis juste devant nous est passionné, visiblement. Je laisse mon regard errer dans la classe. Je me demande qui sera reçu à l' examen Seed, cette année. Kern ? Trop maladroit, trop bête, trop peureux. Méryl ? Trop émotive, aucune diplomatie. Maura ? Trop mauvaise langue, hypocrite. Théo ? Aucune discipline, trop gamin… Et moi ? A peu près tout ça à la fois, je crois. Sauf la peur. Une belle bande bande de recalés en perspective. Par contre, je crois qu' il n' y a aucun souci à se faire pour Casey. Plus quelques autres qui devraient pas trop mal s' en sortir. Bess, elle veut devenir médecin, je ne crois pas qu' elle se présentera à l' examen. Quand à moi… Ma foi, je ferai de mon mieux, et j' y arriverai, c' est sûr.
A la fin des cours, on doit se rendre à la salle de combat, pour rejoindre Quistis pour un entrainement. C' est le cours que je préfère ; on fait des simulations de situations de combat, on apprend des tactiques, à travailler en équipe. Casey, Bess et moi, nous nous entrainons souvent, et nous sommes les meilleurs. Quistis réunit les élèves devant elle avant de commencer le topo.
Puis le porte s' ouvre de nouveau et quelqu' un entre. Super. C' est Etan. Il arrive tranquillement , comme si de rien n' était, marmonne un vague désolé et vient nous rejoindre. Quisitis lui lance un regard courroucé, puis continue. Si elle ne dit rien, c' est parce qu' il n' assiste quasiment jamais aux cours, alors du moment qu' il vient, elle essaie de ne pas faire trop de remarques.

_Bon, on va faire des groupes trois, comme la dernière fois. Je rappelle rapidement les règles : vous vous disperserez dans la serre. Chaque groupe devra affronter les autres en essayant d' en éliminer les membres. Le dernier groupe auquel il restera des membres aura des bonus pour son prochain test.

C' est dans la poche.

_N' oubliez pas, recommande-t-elle encore , vous devez couvrir vos coéquipiers ! C' est en travaillant en équipe que vous survivrez !

Il ne s' agit évidemment pas de « vrai combat », c' est juste un entrainement ; nos armes ne lancent en fait que de la peinture rouge , pour qu' on puisse remarquer ceux qui se seraient fait toucher en combat réel. Il suffit de savoir rester silencieux et bien caché tout en essayant de trouver et surprendre les autres. C' est tout bête, quoi. Et je sais déjà quelle est la première personne que je vais éliminer. Bess, Casey et moi, nous nous mettons ensemble, comme toujours, et nous partons de notre côté ; tous les autres groupes en font autant. Il parait qu' au départ, la serre de combat était beaucoup plus petite que ça, ce n' est qu' il y a quelques années que mon père a décidé de l' agrandir, quand il a vu que le nombre d ‘ élèves augmentait. Maintenant, en tout cas, c' est immense, et c' est l' endroit de tout la BGU que je préfère ( et où je passe le plus de temps. J' y suis presque aussi souvent qu' à l' infirmerie, c' est pour dire…).
Je m' y attendais un peu, dix minutes ne sont pas écoulées que Kern est éliminé, je le vois passer, tout penaud, par le sentier qui ramène à l' entrée de la serre. D' autres élèves le suivent de près dont, Méryl, qui s' est fait remarquer grâce à sa discrétion naturelle ( on a eu droit à un éternuement retentissant) et éliminer sur le champ. J' arrive à en éliminer sept , Casey huit et Bess cinq. On forme une bonne équipe. J' ai manqué de me faire toucher, mais je ne sais pas par qui, je n' ai pas eu le temps de repérer qui m' avait vu.
Tiens, ça bouge par là-bas. Je fais signe à mes coéquipiers, et on avance prudemment. Super, ils nous tournent le dos, je vais les avoir. Casey, Bess et moi nous nous préparons et PAM ! PAM ! PAM! Et une équipe en moins, une ! Consternés et déçus, les nouveaux éliminés quittent leur cachette et vont rejoindre Quistis et les autres. Cela fait un peu moins d' une heure que nous avons commencé, et il ne doit pas rester grand monde. Casey me touche le bras pour m' appeler. Il me montre du doigt une autre équipe où il ne reste plus que deux membres ; deux secondes plus tard, il n' en reste aucun ! Quelques minutes plus tard, c' est au tour de Bess de repérer un élève, qui lui est tout seul. Eliminé. Ce qui m' énerve, c'est que je n' arrive pas à repérer Etan. J' ai vu ses deux équipiers se rendre, mais lui, aucune trace.
Tout un coup, une bombe de peinture tombe juste à côté de Bess. Casey nous tire par le bras pour que nous nous mettions à l' abri, mais immédiatement après, il se fait toucher, et comme par hasard, la même bombe éclabousse aussi Bess. Moi je n' ai rien. Celui qui a fait ça va me le payer. Mes amis me laissent en me souhaitant bonne chance tandis que moi, j' essaie de me planquer le plus possible derrière une caisse. Impossible de repérer la personne qui leur a tiré dessus. Tiens, ça a bougé là-bas. Je m' avance en rampant. Toi, mon vieux, tu vas pas faire long feu… Je suis tout près , à quelques mètres . Puis il disparaît de ma vue, il est passé derrière un muret. Bon sang, mais où est-ce qu' il est passé ??! je m' avance avec précaution à sa suite. Raaah … je le vois toujours pas.

_Toujours faire attention à ses arrières, Eva! Est-ce que ça t' arrrive d' écouter les cours de défense ? fait une voix dans mon dos.

Oh, c' est pas vrai, mais qu' est-ce que j' ai fait pour mériter ça ?!! Je me retourne lentetement, mais je sais déjà qui c' est.
Etan. Il est passé par l' endroit où je me trouve, il a contourné le mur et a fait le tour pour me surprendre par derrière. Il arbore son petit sourire triomphant, et a son arme pointée sur moi. Il doit jubiler. Il n' a qu' a presser la gachette, et je suis éliminée. Mais ça ne suffit pas, il faut qu' il me fasse mariner, afin de bien montrer sa supériorité.

_Alors, comment est-ce que ça va ?? demande-t-il, comme si nous étions en récréation.

Il sort tranquillement un chewing gum de sa poche et en prends un.

_Tu en veux un ? demande-t-il en me tendant la paquet.
_Va te faire v …
_Oh oh, restons polis, je te prie.

Mais il a pas fini de se foutre de moi ?

_Ils sont bons, tu sais, c' est au citron.
_Bon, c' est pour aujourd' hui ou pour demain ?!! Tire, bon sang, qu' on en finisse !
_C' est vrai qu' il fait chaud , aujourd' hui, mais bon il faut faire avec …
_T' as fini de te ficher de moi ! Tire !!
_Et tu sais que c' est bientôt le bal . Est-ce que tu y vas ?
_Ce ne sont pas tes affaires.
_Non, bien sûr que non, ce n' est pas ton genre…
_Mais de quoi je me mêle !!
_Et puis, pour ça , il faudrait que tu aies un cavalier, et je ne crois pas qu' il y ait un seul garçon assez cinglé ici pour être volontaire . Sauf peut-être Kern …

Il n' évite que de justesse ma chaussure, qui va taper contre le mur derrière lui.

_Raté, rit-il. Et tu vas lancer l' autre, maintenant ? Personnellement, je ne suis pas sûr que ce soit une très bonne idée, tu sais, tu vas avoir mal au pieds pour rentrer, il y a plein de caillous par terre.

Ca , c' est bien le dernier de mes problèmes. J' enlève ma chaussure et m' apprête à la lui balancer dans la figure quand … deux coups sont tirés. J' écarquille les yeux, stupéfaite . Je suis couverte de peinture rouge, mais … Etan aussi. Ahuri, il me regarde sans comprendre. Qui a tiré, alors ? Deux rires retentissent à quelques pas de nous nous font comprendre qu' on vient de se faire avoir.

_Et deux de moins ! rit Greg, un élève de notre classe, en brandissant son arme. Wooooohooo !!!

Quelle idiote ! A cause de cet imbécile d' Etan, je ne faisais absolument plus attention,et je me suis énervée. Pas étonnant qu' on se soit fait repérer !! Greg me lance ma chaussure en riant et nous souhaite un bon retour, toujours avec son rire de dindon. Lui, par contre, il n' arrive pas à éviter ma chaussure et se la prends en pleine nuque. Ca lui apprendra. Sur le chemin du retour( après que j' aie de nouveau récupéré ma chaussure), Etan et moi nous nous traitons de tous les noms. Il est persuadé que tout est de ma faute, qu' il ne se serait jamais fait attraper si je n' avais pas été là. Comme si ça m' intéressait… En tout cas, je suis bien contente parce que lui aussi s' est fait éliminer.

_T' avais besoin de hurler comme ça, aussi ? râle-t-il, furieux.
_Fallait pas me chercher. Tout ça c' est de ta faute.
_Quoi ??!
_Oui, tu voulais absolument profiter de ton petit quart d' heure de gloire , hein ? « Ooooh, c' est mOa le plus fooOoort , j' ai réussi à battre Eva » ! Quelle andouille !
_Andouille toi-même ! Je te signale qu' un peu plus et je t' avais ! Mais il a fallu que toi, tu ameutes tout le monde !
_A cause de qui, à ton avis ??!
_Parce que c' est moi qui t' ai poussé à hurler comme une harpie, peut-être ??! hurle-t- il lui-même, excédé.

De toute façon, moi, j' aurais été éliminée par Etan, même si Greg et son coéquipier n' avaient pas été là, et à la limite, je préfère encore avoir été éliminée par ce crétin de Greg que par ce débile prétentieux d' Etan. Bref, on est toujours en train de se disputer quand on rejoint toute la classe. Quistis sonne alors la fin de l' entrainement, puisque le seul groupe qui reste, c' est celui de Greg. Je suis dégoûtée. Je hais Etan Almasy.
Les cours sont finis pour le reste de la journée et tout le monde retourne au dortoir prendre une douche et se changer. Je hais Etan Almasy.
Lorsque nous retournons vers le dortoir, vers 21H00, couvre-feu oblige, nous croisons Maman et Lena, qui vont à l' étage. C' est là que se trouve l' appartement de Papa et Maman, il faut passer par un couloir spécial dont seule la famille a l' accès, évidemment. J' aurais pu vivre là-haut, moi aussi, mais j' ai toujours préféré le dortoir, depuis toute petite, pour être avec mes amis.
Le vendredi tant attendu arrive enfin. Bess s' est remise à respirer : Ivackas s' est enfin décidé à l' inviter, et elle m' avoue qu' elle avait bien cru qu' elle n' irait pas au bal cette année. Pourtant, je sais qu' elle a reçu des dizaines de demandes.
Le test physique qui compose une des parties de l' examen pour devenir Seed a lieu en extérieur. Bah, nous ne sommes pas loin, en fait : juste à l' ouest de la BGU, dans la forêt. C' est le même type d' exercice que la dernière fois, dans la serre. Le moment de prendre ma revanche. Quistis nous donne ses dernières instructions. Ne pas trop nous éloigner, prendre garde aux différents monstres, c' est pour ça qu' en plus des armes à peinture, nous avons aussi nos armes habituelles. Quistis forme les différents groupes. Puis vient mon tour.

_ Eva … Tu seras avec Greg et Méryl.

Je manque de suffoquer.

_Comment ça ?? Je peux pas être avec eux !
_Et pourtant si. Tu trouves quelque chose à y redire ?
_Mais enfin … C' est avec Casey que je suis normalement, tu le sais !
_Aujourd' hui, ce sera Greg et Méryl .
_Tu peux pas me faire ça ! Tu veux ma mort ou quoi ?
_Eva, le professeur, ici, c' est moi. Va rejoindre ton équipe.


J' en reviens pas qu' elle me fasse ça. Casey m' envoie un regard d' encouragement, et c' est comme si je l' entendais : Si elle fait ça, c' est qu' elle a une bonne raison… Ca aurait pu être pire, t' aurais pu être avec Kern... Casey est la raison même, et il a sûrement raison. Quoique là, a priori, c' est moi qui vient de me faire ces réflexions à moi-même. C' est peut-être le début de la sagesse, qui sait.
Quistis le place dans un autre groupe.

_Et Kern, pour l' amour du ciel, finit-elle, tache de ne tuer personne aujourd' hui. J' aimerais vraiment que le journée se finisse ailleurs qu' à l' infirmerie, pour une fois. Et les autres, n' oubliez pas : quand la cloche retentira, vous devrez tous revenir !

Tout à fait d' accord. Nous nous éparpillons ensuite dans la forêt, mais ce n' est pas comme d' habitude, Méryl et Greg sont vraiment imprudents, et à cause de leur vigilance déficiante, je manque d' être éliminée trois fois ( mais à chaque fois, la balle de peinture s' écrase contre un arbre ) et Méryl ne tarde pas à être éliminée elle-même. Au reste, ça ne me change pas beaucoup, elle me gênait plus qu' elle ne m' aidait. Au moins, je n' ai plus à me préoccuper d' elle.
Greg et moi continuons à avancer, et nous parvenons péniblement à éliminer six élèves, et nous devons aussi éliminer plusieurs monstres. Puis un bruit assourdissant attire notre attention. Je lève les yeux au ciel. A travers les feuilles, je vois un vaisseau.

_On dirait un vaisseau d' Esthar… fait Greg.

Tiens, c' est vrai, je ne l' avais pas reconnu. En tout cas, il se dirige vers la BGU. C' est probablement mon grand-père qui vient voir son fils. Nous poursuivons notre chemin en silence.

_C' est bizarre, fait Greg après un moment. Ce vaisseau … Ce n' est pas celui que le président utilise pour venir, d' habitude.

Stupéfaite, je m' arrête. Mais oui ! C' est pour ça que je ne l' avais pas reconnu. Généralement, il utilise un vaisseau beaucoup plus discret. Celui-là, il sert à transporter des troupes, normalement. Troublée, je me remet en marche. Greg est devant, il ne m' a pas attendue, et je dois accélérer le pas pour le rattraper. Mais c' est trop tard. Cet idiot a oublié de se mettre à couvert, et il se fait immédiatement repérer – et éliminer. J' ai juste le temps de me cacher derrière un arbre, en tentant de repérer l' ennemi. Personne, évidemment. Prudemment, je me déplace. J' arrive à éliminer Kern, quelques minutes plus tard. Petite victoire. Ce qui serait le mieux, c' est que j' arrive à avoir Etan. Mais vu que le terrain est plus grand, l' exercice est évidemment plus difficile. Puis une sonnerie se fait entendre. Zut, déjà fini… Sur le retour, je ne croise personne pendant un bon moment. Puis, je commence à apercevoir la BGU. Il y a de l' agitation. Je ne vois pas très bien à cause des arbres, mais on dirait qu' il y a plein de personnes qui courent dans tous les sens.
Je m' approche un peu plus vite, et je vois que je m' étais pas trompée : il y a des soldats d' Esthar qui courent un peu partout et … ils sont armés ?
Je rêve ? Ils se battent contre des élèves de la BGU, et je vois plusieurs blessés sur le sol. Mais c' est pas possible ? Qu' est-ce que c' est que cette histoire ?! Empoignant mon arme, je m' apprête à courir les rejoindre, quand… Je sens une main se poser fermement sur ma bouche, et un bras venant de derrière moi passer autour de ma taille et me tirer en arrière. Je me débats, sans succès, tandis qu' on me tire en arrière, pour m' éloigner de la BGU…
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   Posté le 06-10-2004 à 14:32:01   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

Chapitre 5

J' essaie de me débattre, mais en vain. Je suis tenue trop fortement, et on me tire sur comme ça sur plusieurs mètres. A ce moment, toutes les leçons de défense, tous les cours d' auto-défense donnés en cachette par Zell sont oubliés. Dans la panique, j' ai laché le fusil à peinture. J' ai encore mon arme , mais je ne peux pas l' utiliser. Le seul réflexe à peu près normal qui me vient est de mordre la main qui me retient. L' agresseur me relache alors en poussant un cri étouffé, et tellement brutalement que je perds l' équilibre. Il ne me faut alors que quelques secondes pour recouvrer totalement mes esprits. Je me ressaisis, et empoigne mon arme, que je braque sur lui.

_Etan ?!

Il est accroupi, et se tient le bras.

_Mais t' es cinglée ! Pourquoi tu m' as mordu ?!!
_Mais enfin … Je peux savoir ce que tu faisais ??!
_Bon sang, je saigne, maintenant !!

En effet, il a la main en sang. J' y suis allée plus fort que je l' aurais cru. Bien fait.

_Tu vas me répondre, oui ?! Qu' est-ce que tu comptais faire, au juste ?
_Baisse d' un ton, tu veux ? Ils vont nous entendre. Faut pas aller là-bas, souffle-t-il, en faisant un signe de la tête en direction de la BGU.

On entend des cris, et des bruits de combats.

_Qu' est-ce qui se passe ?
_Je crois que c' est clair, non ? Esthar attaque la BGU !
_Mon grand-père n' attaquerait jamais la BGU !!
_Qui te parle de ton grand-père ? J' ai dit Esthar.
_Laguna est le président d' Esthar !
_Je suis au courant, merci. Mais ça ne veut pas dire qu' il est pour quelque chose dans ce qui se passe.

Je le regarde, interloquée. Qu' est-ce qu' il veut dire ? Si Laguna n' est pas responsable de cette attaque… ça veut dire qu' il ne dirige plus Esthar. Et s' il ne dirige plus Esthar… est-ce qu' il lui serait arrivé quelque chose, à lui aussi ? Une déflagration, un peu plus loin, me ramène à la réalité.

_Viens, il faut aller aider les élèves.
_Eva, explique-moi ce que toi, tu pourras faire, si ton père, et tous les professeurs réunis n' ont pas réussi à battre les soldats !
_Alors viens avec moi ! Je sais que tu as un G-Force, et moi aussi ! On y arrivera !
_Ils sont des milliers ! Faut aller chercher de l' aide, c' est le seul moyen d' aider.
_On ne peux pas les laisser et partir !!
_C' est la meilleure chose à faire, crois moi.

Quel crétin ! Il ne bougera pas. Il va falloir que je me débrouille seule !

_Moi, j' y vais ! Ce n' est pas parce que toi tu préfères t' enfuir que je vais abandonner la BGU.

Il blêmit sous l' insulte, puis explose :

_Très bien , vas-y !! Je me demande pourquoi je me fatigue ! Vas-y, vas te jeter dans la gueule du loup ! Qu' est-ce que tu crois ? Ils n' attendent que ça, que les derniers petits élèves stupides et bornés qui se croient les plus forts viennent gentiment se jeter dans leur bras ! Désolé, j' avais pas compris que ce que tu voulais, c' était leur faciliter la tache !!

Sans même prendre le temps de répondre, je lui tourne le dos et me dirige vers la BGU. Il a la trouille, c' est tout. Quel lache. Il abandonnerait la BGU ! Il est bien comme son père. Un traitre. Je me demande à quoi je m' attendais, après tout ; comme s' il aurait pu nous aider... Peu importe. Moi j' y vais. Il faut que je sache ce qui se passe. J' entends des bruits de pas qui s' éloignent, derrière moi. Etan s' en va lui aussi, apparemment, mais dans la direction inverse de la mienne. Non, Esthar ne peut pas être en train d' attaquer, c' est pas possible ! Il y a erreur.
Le batiment est en vue. Une petite troupe de soldats arrive de mon côté. Ils m' aperçoivent, et se dirigent vers moi. C' est le moment de demander des renseignements. Avant que j' aie eu le temps de dire un mot, ils pointent leur fusil sur moi, et me tirent dessus. Non mais je rêve, c' est quoi leur problème ? J' ai juste le temps de sauter derrière un arbre pour me mettre à l' abri. Les balles fusent, à à peine quelques centimètres de moi. Bon sang, il font pas semblant, c' est pas passé loin ! Je charge mon arme, puis me tourne pour leur tirer dessus. J' arrive à en éliminer quelques-uns ; les autres se replient. Un bruit rauque, sur ma droite, attire mon attention. J' entends une sorte de râle. Je cherche des yeux d' où ça peut bien venir. Puis j' aperçois quelque chose, à quelques mètres de moi. Vérifiant une dernière fois si les soldats ne sont pas dans les parages, je me dirige vers l' endroit d' où viennent les bruits. Bon sang, ce sont des élèves de la BGU… Je les connais pas, mais je les ai croisés plusieurs fois.
Ils sont trois, et sont allongés sur le sol. Deux d' entre eux ne bougent plus. J' essaie de prendre leur pouls. Rien. Ils sont… oh, c' est pas vrai… Le troisième a du mal à respirer. Il a plein de blessures, le sang n' arrête pas de couler de partout, et j' ai beau m' acharner, j' arrive à pas à l' arrêter. Mais qu' est-ce que je peux bien faire ? Ne pas paniquer, ne pas paniquer. J' ai bien une trousse de secours, mais rien qui puisse suffire. Je lance un soin + à tout hasard, mais ça reste sans effet. Il y a trop de blessures. L' élève essaie de me dire quelque chose, mais suffoque, et tousse. Il lève difficilement le bras pour me désigner quelque chose. Puis sa main retombe, inerte. Merde, lui aussi... Je regarde les corps ensanglantés, désemparée et impuissante.
Quelque chose bouge devant. Je lève lentement les yeux, mais je sais déjà ce qui m' attends. Les soldats. Je les avais oubliés, ceux-là. Ils arrivent. Qu' ils viennent. Je me lève pour leur faire face, tremblante de rage. Ils vont regretter ce qu' ils ont fait, ça je peux le jurer. Ils vont le payer. Mais il n' y a pas des soldats que devant moi. Il me faut quelques secondes pour comprendre qu' en fait, je suis encerclée. Ils sont beaucoup plus nombreux que tout à l' heure, plusieurs dizaines, je dirais. Et ils me tiennent en joue. Je crois qu' à ce moment, ceux qui ont croisé mon regard ont pu voir des flammes y danser, parce qu' ils ont un mouvement d' hésitation et de recul. Mais ça ne dure pas longtemps, ils se remettent en place.
Le vent se lève. Un vent glacial, presque pétrifiant, qui pénètre jusqu' aux os. Il se fait de plus en plus violent, et tourne autour de nous. Ils vont payer ce qu' ils ont fait à la BGU. Des soldats, inquiets, regardent tout autour. Les bourrasques se font de plus en plus violentes ; c' est une véritable tempête, à présent. C' est le moment , je tire sur plusieurs soldats qui se trouvent à ma droite. Ils s' effondrent, ce qui me permet de m' échapper sur le côté et d' éviter plusieurs tirs. Les soldats voient avec stupéfaction quelques unes de leurs balles retomber sur le sol , alors qu' elles étaient sur le point de m' atteindre. Ils aperçoivent alors une sorte de bulle bleu clair géante qui m' entoure. Ils reprennent vite leurs esprits, mais j' ai tout de même le temps d' en abattre un dizaine. Je ne sais pas comment c' est possible, mais il y en a toujours d' autres qui arrivent, toujours plus nombreux, et ils doivent bien être une centaine, à présent. J' invoque Sheba, mais elle n' arrive pas non plus à m' en débarrasser. C' est comme si, plus j' en abattais, plus il en arrivait, et au bout d' un quart d' heure, il sont bien plus d' une centaine à m' entourer, à se resserrer autour de moi. Sheba ne tiendra pas longtemps, et je sens que je perds pied. Mes attaques deviennent de plus en plus inefficaces, et Sheba peine à maintenir le bouclier. Elle est de plus en plus faible et va bientôt partir. J' arrive toujours à repousser les attaques des soldats, mais je suis épuisée, j' ai l' impression que ça ne finira jamais, et je ne sais pas combien de temps je vais tenir.
Puis un grand souffle brûlant nous jette tous à terre. Je tombe lourdement en arrière, et les soldats sont eux aussi repoussés. Et nous apercevons alors au-dessus de nous un monstre, une sorte d' aigle géant , réellement effrayant, aux ailes enflammées. Il est noir, comme carbonisé, et pourtant il est bien vivant, et vole, en poussant de longs cris stridents. C'est la chose la plus effrayante que j' ai jamais vu, on le dirait sortit tout droit de l' enfer. Il fait une chaleur insupportable, j' étouffe. Nous restons tous pétrifiés, les soldats tout comme moi. Certains soldats se lèvent et s' enfuient en criant. L' aigle relève alors la tête et pousse un long cri, puis la rebaisse, et, ouvrant le bec, lance des flammes. Les soldats courent, et certains sont brûlés.
C' est alors que je sens quelqu' un m' attraper par le bras.

_Viens , me souffle Etan , faut pas trainer.

Mais la seule chose que je vous, c' est le monstre, je suis incapable de réagir, comme déconnectée de la réalité devant cette horreur. Etan me tire alors à m' arracher le bras pour me forcer à me lever, et nous nous mettons à courir. Je ne crois pas avoir jamais couru ainsi de ma vie. Nous courons, courons, à en perdre haleine, nous nous enfonçons dans la forêt pour nous éloigner de tout. Quelques soldats arrivent à nous rattrapper, et nous attaquent. Etan sort sa gunblade et les repousse. J' essaie de me battre, machinalement, et nous arrivons laborieusement à nous débarrassser d' eux. Mais Etan a reçu un coup dans le dos, et nous nous remettons à courir avec beaucoup de difficultés, avant que de nouveaux soldats ne surgissent. J' avance comme un automate, sans vraiment comprendre. Je ne saurais pas dire au bout de combien de temps nous nous sommes arrêtés, pour reprendre notre souffle. En tout cas, nous sommes assez loin pour ne plus voir la BGU, et ne plus entendre de bruit. Muets, sans doute à cause de l' horreur des évènements, nous restons stupidement debout à nous regarder, osant à peine respirer.

_Pourquoi est-ce que tu es revenu ?

J' ai dit la première chose qui m' est passée par la tête, sans réfléchir. Etan me regarde sans comprendre. Une vague de fureur m' envahit soudain. Etan … Non, je ne peux tout de même pas avoir été sauvée par lui ??! J' aurais une dette envers lui ??

_J' y serait arrivée toute seule ! Pourquoi tu es intervenu ??!
_Mais …
_Je n' avais pas besoin de ton aide !! j' y serais arrivée !! Je les avais !!
_Attends, tu plaisantes, là ? T' es gonflée ! Ils t' auraient mise en pièce, reconnais-le ! C' est quand même pas croyable ; je te sauve, et c' est tout ce que tu trouves à me dire ?
_ Je ne t' avais rien demandé !
_Ben c' est pas la gratitude qui t' étouffe !!
_Je…

Un haut-le-cœur me prend. Je vais derrière un arbre et vomit . J' ai l' impression de me vider de mes forces en même temps que de mon repas. Une fois que je suis sûre qu' il n' y a plus rien, je retourne vers Etan. Il est adossé à un arbre, les yeux fermés, et il est très pale. Je me laisse tomber à côté, en silence, et je m' allonge. Je peux voir le ciel. Il est beau, bleu, immense, comme toujours. Alors qu' est-ce qui a bien pu clocher aujourd' hui, bon sang ? Quand je ferme les yeux, je revois défiler tout ce qui s' est passé ces dernières heures. Ces élèves morts. Les soldats que j' ai abattus. Heureusement que je n' ai plus rien sur l' estomac. Etan s' agite à côté. Je rouvre les yeux. Il a sorti une gourde de son sac et boit. Il me tend ensuite la gourde. Je lui fait non de la tête.

_Prends. T'en a besoin. T' es toute pale.
_ Et toi, tu t' es vu ?! J' ai dit non. Ca ira.
_Comme tu veux.

Nous restons encore quelques minutes silencieux. Je repense encore une fois à ce qui s' est passé. Etan y pense probablement aussi, à supposer qu' il soit capable de réfléchir. Normalement, à cette heure-ci, j' aurais dû être Seed. J' aurais été à la cafétéria fêter ça. Avec Casey et Bess. Les larmes me montent aux yeux. Il ne faut pas qu' Etan me voit pleurer. Bon sang , et si … et si eux aussi ils étaient … Et mes parents ?? Lena ? Et qu' est-ce qui a bien pu pousser Esthar à attaquer ? Les questions se bousculent dans ma tête.
Etan se penche pour attraper quelque chose dans son sac et grimace de douleur en poussant un gémissement. Sa blessure ! Il retire sa veste, et quand il la prend pour l' inspecter, il y a une grande déchirure au niveau de l' omoplate, et la veste est tachée de sang. Il dépose sa veste sur le côté, et prend sa gourde pour essayer de nettoyer sa blessure, mais il a beau se contorsionner, il en met partout, sauf là où il faut. Vraiment pitoyable. Ca me ferait marrer, dans d' autres circonstances. Je me lève.

_Quel nul… Laisse moi-faire.
_Euh… Non, je crois que je vais me débrouiller.
_Je vais le faire, je te dis. Bess m' a déjà montrer comment faire.

C' est elle qui me soignait quand je n' avais pas envie de prévenir Ivackas ; et vu que ça arrivait souvent, je pouvais voir comment elle faisait, et je dois dire que j' ai acquis une solide expérience dans ce domaine, même si ce n' étaient jamais des blessures très graves.
Pas vraiment rassuré, Etan décide me tend la bouteille. Et se tourne. Il relève son T-shirt. La blessure n' est pas belle à voir. Il y a plein de sang qui a coulé. Je commence à en avoir marre, de cette couleur.

_AÏE ! rale-t-il , alors que j' ai à peine touché à sa blessure.
_Ce que tu peux être douillet ! Arrête un peu de pleurnicher !!
_Je ne pleurniche pas ! c' est pas de ma faute si t' es aussi délicate qu' un dinosaure !!
_ Tu sais ce qu' il te dit, le dinosaure ?? ( et pour le coup j' appuie exprès sur la plaie, pour lui apprendre )
_MAIS AÏEEUUU !!

Une fois la plaie nettoyée, je me rends compte que pourtant la blessure n' est pas si profonde. Juste quelques centimètres. Pas de quoi raler comme si on lui avait arraché le bras. Il n' arrête pas de grimacer de douleur et de grosses gouttes de sueur coulent sur son front. Quel cinéma ! Pour une blessure pareille… Je sors les pansements de mon sac, et je le soigne. Voilà. Mais j' aperçois sur son dos d' autres blessures étranges, plus anciennes. Bizarre.

_Et voilà le travail ! fais-je en donnant une légère tape à l' endroit où se trouve le pansement.

Juste une petite vengeance. J' ai dit que je le soignerait, il mourra pas, mais s' il peut tout de même souffrir, c' est l' idéal.

_Aïeu !

Il remet son T-shirt et sa veste, et nous nous rasseyons en silence.

_Le monstre, tout à l' heure, c' était quoi ?
_Mon G-force.
_Un G-force, ça ? J' ai jamais rien vu d' aussi horrible ! Comment tu l' as…

Etan se lève précipitamment.

_Il faut y aller. On a pas intérêt à trainer.

Je prends mon sac, et je me lève. Il a raison, pour une fois. Il faut aller chercher de l' aide. Direction Balamb, là-bas, on trouvera un téléphone et …

_Mais où est-ce que tu vas ? me demande Etan.
_Ben … à Balamb !
_T' es folle ? Alors dis-moi, à ton avis, quel est le prochain endroit où les Esthariens vont se rendre une fois qu' ils en auront fini avec la BGU ?
_Euh…
_Une petite devinette : quel est l' endroit où se rendent les élèves, quand ils ne sont pas à la BGU ? Balamb !! Si tu vas là-bas, en rien de temps, ils vont encercler la ville et tu seras prise ! Bravo ! Ca valait le coup que je te sorte de là-bas, si c' est pour retourner directement de leur côté !
_Et qu' est-ce qui te fait dire qu' ils iront à Balamb, d' abord ?

Etan n' a pas le temps de répondre. Un grand tremblement de terre se fait sentir. Qu' est-ce qui se passe, encore ? Les vaisseaux esthariens passent au-dessus de nous, se dirigeant – comme pour donner raison à Etan – vers Balamb. Et ce qui suit est encore plus incroyable : c' est la BGU qui suit les vaisseaux de guerre ! Je n' en reviens pas ; je savais que la BGU était en réalité un immense vaisseau, mais j' aurais jamais imaginé la voir un jour passer au-dessus de ma tête.
En tout cas, il est clair maintenant que Balamb n' est pas la meilleure option. Etan et moi nous nous regardons. Heureusement pour lui, il s' abstient de tout commentaire.

_Alors on va à Esthar…

Etan lève les yeux et les bras au ciel. On dirait qu' il a perdu la tête. Qu' est-ce que j' ai dit, encore ?

_Dis, tu étais bien avec moi quand on s' est fait attaquer ?? Tu as bien vu aussi que c' était des Esthariens, les ennemis ??! Alors explique-moi pourquoi tu voudrais qu' on aille directement chez eux ??
_Il faut que je sache ce qui se passe ! Et ce qui est arrivé à mon grand-père !!
_OK, et comment tu comptes t' y prendre ? Débarquer là-bas et dire, « salut, je viens voir mon grand-père, oui oui, le président ». Et qu' est-ce qui te fait penser qu' ils vont gentiment t' amener à lui ?
_T' as quelque chose de mieux à proposer ?
_La procédure d' urgence de la BGU prévoit que l' on prévienne les universités alliées. En l' occurrence, celle de Trabia.
_ C' est à des jours de marche, et il y a la mer à traverser ! Et on n' a aucun moyen de transport ! On arrivera trop tard !
_Et toi tu croyais y aller comment à Esthar ? Contrairement à toi, j' ai réfléchit à une solution. On va passer chez des gens que je connais, des amis.
_Des amis ? fais-je , surprise, tu as des amis, toi ?
_Oui, répond-t-il, agacé. S' il y a des gens assez dingues pour te supporter, c' est que tout est permis . Donc, on ira chez eux, c' est sur la route. On devrait arriver demain, dans la journée, et là, ils nous aiderons.

Je n' ai pas de meilleure idée, et je suis complètement perdue, alors ça ou autre chose… Nous nous mettons en route, nous nous dirigeons vers le nord. Je m' aperçois alors à quelle point je peux être démunie : je n' ai jamais voyagé, à part en jet, ou quelques fois à pied, mais je n' ai jamais dépassé Balamb, ce qui fait que je serais incapable de décider par où passer. Alors qu' Etan a souvent voyagé à travers le monde, ces dernières années, et il sait visiblement ce qu'il fait. Je déteste cette sensation de dépendre de lui ; comme de qui que ce soit, d' ailleurs, mais le fait que ce soit lui rend la chose encore plus pénible, c' est certain. Je ne dirige rien. Il est le seul à savoir un temps soit peu quoi faire. Nous avons passé un accord tacite, nous voyageons en silence ; c' est ça où les disputes, et nous ne sommes ni l' un ni l' autre assez en forme. En tout cas, il a perdu son sourire arrogant. En même temps, je trouve ça plutôt inquiétant. Il a tout le temps les sourcils froncés, l' air impénétrable. Pour que lui réagisse comme ça, il faut vraiment que la situation soit critique.
Nous restons dans la forêt, pour nous camoufler. Les quelques monstres que nos croisons sont vite expédiés. Avec ce que nous avons vécu, nous n' avons pas besoin d' autre prétexte pour nous défouler sur eux.
Il commence à faire nuit, il va falloir trouver un endroit où dormir. En pleine forêt. Ca promet.. Nous nous arrêtons dans un endroit tranquille, Etan allume un feu, grâce à un Brasier. C' est vrai qu' il commence à faire frais. Je n' ai ni tente, ni sac de couchage. Tout ce que j' ai, c' est une de ces couvertures qui prend très peu de place mais est censée tenir très chaud. En fait, c' est tellement léger que ça réchauffe à peine. Mais c' est vrai que ça prend pas beaucoup de place ; c' est pour ça que je l' avais choisie au départ; le genre de truc qui semble pratique jusqu' à ce qu' on en ait besoin. Je m' assoit sur un rocher pour analyser la situation. Je n' ai pas de carte, pas de boussole, pas de vêtements de rechange, pas de nourriture, et je n' ai pas un gil sur moi, parce que je suis stupide. Mais comment je vais bien pouvoir faire ?

_Rapproche-toi, si tu veux, le feu est prêt.
_Je n' ai pas froid.
_Allez, viens. J' ai pas grand-chose, mais il me reste des biscuits. Ce sera mieux que rien.
_Non merci, dis-je, le plus sèchement possible.

Je gèle. J' ai faim. J' ai soif. J' ai sommeil. J' ai peur. Mais je préfèrerais me faire couper en morceau que d' accepter quoi que ce soit de sa part.

_Comme tu veux. Mais je te préviens, on arrivera pas chez mes amis avant demain après-midi, et on aura rien d' autre manger d' ici là.
_Juste un morceau, alors.

Je dévore ces malheureux biscuits comme si je n' avais jamais rien mangé de meilleur, tellement je meurs de faim, tout en me demandant à quoi peuvent bien ressembler ses fameux « amis ». Est-ce que ce sont des gens aussi horribles et insupportables que lui ? Qui pourrait être assez fou pour se dire être son ami ?
Nous sommes entourés par les ténèbres, et à part le feu et ce qu' il éclaire, nous ne voyons rien. Tout est paisible, il n' y a aucun bruit. A croire que nous sommes les seuls êtres vivants dans toute la forêt. Nous sommes assis autour du feu, à contempler les flammes dansantes, sans vraiment les voir, comme hypnotisés. Je pense à mes parents, à ma sœur, à mes amis, à mon grand-père. Comment vont-ils ? Cette horrible boule qui devient familière, depuis quelque temps, se forme de nouveau de ma gorge. Penser à autre chose. Penser à ce qu' il faut faire pour les sauver. Dire qu' aujourd' hui j' aurais pu être Seed !! En plus de tout le reste, ils m' ont empêché de devenir Seed ! Si j' avais un soldat en face moi, je ne donnerais pas cher de sa peau. Mes paupières deviennent lourdes. Je prends ma couverture, et la resserre autour de moi. En face de moi, Etan fait de même. Il est très proche du feu, comme s' il voulait entrer dedans. L' air soucieux, il contemple les flammes, et avance de temps en temps sa main, comme pour en saisir une. Et il grimace de temps en temps, comme si la douleur le reprenait.
A cette heure-ci, le bal aurait dû commencer. Bess aurait été en train de danser, avec Ivackas. C' aurait été la plus belle soirée de sa vie.
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   Posté le 02-02-2005 à 07:52:53   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

Chapitre 6

_Tu veux que je te dise ce que je pense ?
_Non.
_Eh bien je vais te le dire quand même !! m' énervé-je, en glissant pour la énième fois sur une pierre.

Ce matin, j' ai été réveillée alors que le soleil était à peine levée, et après avoir passé la pire nuit de ma vie par le type que je déteste le plus au monde et qui me conduit Dieu sait où à travers les montagnes. En fait, je suis quasiment certaine qu' il a réussit à nous perdre. Impossible de se repérer, avec tous ces rochers. Le ciel a encore l' insolence d' être plus bleu que jamais et je le prend pour une insulte personnelle. Ensuite, un monstre, en m' attaquant, a cassé mon arme, donc je n‘ ai plus rien pour me défendre. En plus, je n' ai rien avalé depuis la veille, je meurs de faim, et ça fait des heures qu' on marche, on réussi à passer de l' autre côté de la montagne, mais il n' y a aucune maison en vue. Alors pas la peine de se demander pourquoi je suis d' une humeur massacrante. Il a pas intérêt à me chercher.

_Je pense qu' on n' aurait jamais dû partir ! On aurait dû rester voir s' il n' y avait pas de survivants !! Les Esthariens sont partis, on ne risquait plus rien !

Etan ne m' écoute même pas, il continue à marcher d' un pas mécanique. Je hausse le ton.

_Je pense qu' on aurait dû passer à Balamb. Quand bien même les soldats y seraient, ce n' est pas écrit sur notre front, que nous sommes de la BGU, que je sache. On aurait pu contacter Trabia immédiatement et…

Etan a stoppé tellement soudainement que je lui rentre presque dedans.

_Eva, tais-toi un instant .
_Non, je ne me tairai pas !! Non mais, pour qui est-ce que tu …
_Tais-toi, je te dis !!
_Je...

Il me plaque la main sur la bouche pour m' empêcher de parler. Je suis sur le point de lui envoyer une gifle, quand je distingue un bruit étrange, qui se rapproche, de plus en plus. Nous cherchons du regard. Soudain, une grande forme noire fend le ciel. Etan me pousse derrière un gros rocher, où il se jette lui-même. Je retombe à moitié assommée, mais tout de même assez lucide pour comprendre de quoi il s' agit: un vaisseau Estharien. Il passe au-dessus de nos têtes plusieurs fois, en décrivant de grands cercles. C' est bien notre veine, avec un temps pareil, on doit être aussi repérable qu' un éléphant dans un parterre de marguerites.
La vaisseau finit par repartir au bout de ce qu' il me semble être une éternité. Mais nous restons tout de même quelques minutes de plus, dissimulés derrière le rocher. Le souffle court, nous tendons l' oreille. Plus aucun bruit. Nous nous relevons prudemment. Etan se tourne vers moi et me fusille du regard.

_Ca, dit-il sèchement en faisant un signe de la tête vers l' endroit où a disparu le vaisseau, ça explique pourquoi on n' est pas restés là-bas. Tu croyais quoi ? Qu' ils allaient sagement partir sans vérifier s' il restait des soldats qui pourraient s' enfuir et aller aider les autres? Ca ( il agite les pans de sa veste ), ça explique pourquoi on est pas allés à Balamb. C' est peut-être pas écrit sur ton front que tu es de la BGU, mais sur ton badge, si. Alors la meilleure chose que nous ayons à faire est de nous cacher dans la montagne.

Et il se remet en marche.
Comment ai-je pu oublier ce maudit uniforme ??! J' avais supplié mon père de ne pas m' obliger à porter cette jupe – horriblement courte – et de me laisser porter un pantalon . Mais «le règlement, c' est le règlement ». Pourtant, je ne connais rien de moins pratique que ces jupes, quand on part en mission.
Comme je ne trouve rien d' intelligent à répliquer, nous reprenons rapidement la route. En silence.
Mais au bout de deux heures, je dois demander grâce, et je me laisse tomber sur le sol, éreintée. Mon cerveau a de plus en plus de mal à garder le contrôle sur mes jambes. Il semble que ce soit plutôt l' estomac qui domine. Et pour l' instant, il refuse de coopérer. Mais ce n' est rien à côté d' Etan. Il ressemble à un véritable zombie. Il a le teint grisâtre, le visage trempé de sueur et semble être au bord de la nausée. Il serait temps que nous arrivions. Il s' assoit sans bruit et ferme les yeux.
J' ai essayé de m' imaginer ses fameux « amis ». Pour vivre ici, faut vraiment vouloir être coupé du reste du monde. Et pour être ami avec Etan, faut carrément être cinglé, alors je me fait un peu de souci à propos de ce qu' on va trouver une fois arrivés. Chez qui est-ce que je vais tomber ?
Il faut bien se remettre en marche, et nous continuons. Je n' ai aucune envie de passer la nuit ici, alors il vaut mieux se dépêcher, d' autant que le soleil commence à se coucher et qu' avec le manque de visibilité, l' avancée devient laborieuse.
Nous finissons par apercevoir des lumières, puis une maison. Ouf ! J' en peux plus, moi. Nous approchons. Il y a une femme dehors, qui arrose des plantes, apparemment. Comme il fait sombre, on ne voit pas très bien. Elle tourne la tête en nous entendant arriver.

_Etan ? Qu' est-ce que tu fais ici ? demande-t-elle , apparemment stupéfaite.
_Ben , je vois que ça te fait plaisir, tente-t-il de plaisanter, mais on sent la lassitude dans sa voix.
_Ne dis pas de bêtises, sourit-elle. Tu sais bien que je suis très contente de te voir. Seulement, ça fait à peine une semaine que tu es venu ici… Qu' est-ce qui se passe ?
_C' est une longue histoire , je t' expliquerai…

Elle pose son arrosoir pour venir vers nous, et elle pose son main sur Etan pour le mener à l' intérieur. Mais à son contact, elle sursaute, comme si elle avait reçu une décharge électrique. Je la voit froncer les sourcils en l' observant.

_Etan ! Tu as …
_Euh … je … je t' expliquerai plus tard, bredouille-t-il, en faisant un signe de la tête vers moi.

Elle semble alors m' apercevoir.

_Oh !
_Kassandra, je te présente Eva.
_Je suis vraiment navrée, dit-elle en me faisant un grand sourire, je ne savais pas qu' Etan avait amené une amie !

Je suis sur le point de lui dire que ce n' est en effet pas le cas, mais je me sens vraiment trop lasse pour protester. Elle s' avance vers moi pour me faire la bise, mais, à mon contact, elle sursaute encore. Et cette fois, c' est moi qu' elle dévisage, puis elle lance un regard surpris à Etan.

_Je … euh … t' expliquerai plus tard …
_Très bien. Alors …Entrez, vous devez être épuisés.

Je te le fais pas dire. Elle nous précède et entre dans la maison. J' en profite pour demander à Etan ce qu' il lui est arrivé, à son amie.

_Euh … je … je t' e …
_ « Je t' expliquerai plus tard », complété-je. Ok.

Nous entrons. La maison n' est pas très grande, mais il fait chaud, et on est à l' abri. Kassandra s' affaire dans la cuisine.

_Vous devez mourir de faim, dit-elle. Asseyez-vous.

Cette fille lit dans mes pensées ! Je m' assois à table avec soulagement. Kassandra arrive quelques minutes plus tard, avec des plats. C' est le meilleur repas que j' ai jamais fait . Je suis peut-être influencée par le fait que je n' aie rien mangé depuis la veille, mais il faut reconnaître que Kassandra est un vrai cordon bleu, et ça suffit à lui faire gagner ma plus grande estime. J' ai du mal à croire qu' elle puise être amie avec Etan. Elle est assez grande, très fine, elle a de très longs cheveux dorés tressés. Pour autant que je puisse juger de la beauté féminine, oui, je dirais qu' elle est vraiment jolie. Avec son grand sourire, sa démarche légère et sa gentillesse, j' ai du mal à l' imaginer en grand bandit devant vivre dans la montagne pour se cacher de la police. Je me demande pourquoi elle vit ici. Et comment Etan et elle ont pu devenir amis ?

_Où est Gary ?
_En ville. C' est dommage que tu ne l' aies pas vu, il est parti très tôt ce matin. Il ne devrait plus tarder, maintenant. Tiens, bois ça, Etan. Eva, tu veux encore un peu de salade ?

Je me suis tellement goinfrée que je ne peux plus rien avaler. Je n' ai plus qu' une envie, maintenant : dormir. Cassie débarrasse la table et se dirige vers une des chambres.

_Alors, qu' est-ce qui se passe , avec Kassandra ? Pourquoi elle me regardait comme ça, tout à l' heure ? je demande.

Etan paraît un peu mal à l' aise.

_C' est que … Eh bien … Kassandra est un peu … voyante.
_Comment ça « un peu voyante » ??

Il vérifie que Kassandra n' arrive pas, puis chuchote.

_Ben … tu sais ce que c' est une voyante, non ? Des fois, elle voit des choses…

Elle voit des choses ??! Je suis pas sûre de comprendre.

_Tu essaies de me dire qu' elle est folle ?
_Mais non ! s' agace-t-il ( il baisse de nouveau la voix ) Elle voit des choses, parfois . Je veux dire … en touchant une personne, elle peut voir quelque chose qui lui est arrivée, ou qu' il va lui arriver…
_Tu te moques de moi ??
_Pourquoi tu me demandes si une fois que je te réponds tu ne me crois pas ?
_Parce que ta réponse est débile !
_ Je ne vois pas ce que ça a de si dur à croire ! Ta mère est une sorcière non ? Kassandra aussi, c' est tout. Et ça lui donne le pouvoir de lire dans le futur ou dans le passé.

Une sorcière ? Je n' en reviens pas. Pour le coup, je ne sais plus quoi dire.
Evidemment, je me doutais bien que ma mère n' était pas la seule sorcière, mais… Soudain, je sens un peu plus méfiante. Je suis chez une sorcière. Et le moins que l' on puisse dire, c'est qu' on ne peut pas vraiment se fier à elles. Ma mère, elle n' a jamais vraiment manifesté de pouvoir spécial comme la possibilité de voir l' avenir, ou le passé, ce qui fait que si je n' avais pas su qu' elle était une une sorcière, rien n' aurait pu l' indiquer, et ça ne m' inquiétait pas plus que ça.

_Ta mère est une bonne sorcière non ? dit Etan en se penchant vers moi. Ce n' est pas parce que c' est une sorcière qu' elle est dangereuse. Tu n' as rien à craindre de Kassandra non plus.

J' espère qu' il a raison. Elle revient à ce moment là, les bras chargés de draps et de linge. Eta prendra la chambre de Gary, qui apparemment ne rentrer pas cette nuit, et moi la sienne.

_ Je suis désolée, fait-elle, genée, ce n' est pas très grand ici…
_Je peux dormir dans le salon, il n' y a pas de problème, proposé-je, me sentant coupable, devant une telle gentillesse, d' avoir pu me méfier d' elle.
_Non, ça ira. Tiens, prends ces draps. C' est par là. Tu veux sûrement prendre un bon bain avant d' y aller. Je vais te montrer la salle de bain.

J' espère que ce n' est pas un moyen poli de me dire que je pue (même si c' est sûrement vrai, après tout ce par quoi nous sommes passés) mais j' accepte avec plaisir. Et ça fait un bien fou. Kassandra m' a déposé des vêtements pour dormir. Enfin propre, je m' apprête à sortir, mais je les entends discuter, et, pour je ne sais quelle raison, je ne sors pas, mais reste derrière la porte, que j' entrouvre, juste assez pour les voir sans être vue.

_Mais qu' est-ce que tu voulais que je fasse d' autre ? Ils étaient probablement des centaines.
_Bien sûr, mais tu sais bien que tu ne dois pas …
_Qu' est-ce que j' aurais dû faire ? Les laisser l' attraper ?
_Non bien sûr que non, ce n' est pas ce que je voulais dire…
_Excuse-moi, soupire-t-il au bout d' un instant. Je sais que tu t' inquiètes seulement. Mais avec tout ce qui s' est passé ces derniers jours, j' ai l' impression d' être en plein cauchemar.
_Je comprends. Mais je veux juste dire … Fais attention à toi. Je suis heureuse qu' Eva soit là, au moins tu n' es pas seul.
_Tu plaisantes ? Il aurait cent fois mieux valu que je sois seul. C' est une vraie calamité, cette fille.
_Alors pourquoi l' as-tu aidée dans ce cas ? demande-t-elle en souriant.
_Ce n' est pas une raison pour la laisser se faire tuer… et puis …Quand j' étais petit, son père n' a pas hésité à m' accepter à la BGU quand le mien le lui à demandé, malgré ce qui s' était passé entre eux. Il n' a pas hésité une seconde. Personne d' autre n' aurait voulu.. Alors, protéger sa fille, c' est le moins que je puisse faire. Même si elle ne me facilite pas vraiment la tache, grimace-t-il. Je crois même qu' après ça, c' est lui qui aura une sacrée dette envers moi !

Non mais quel toupet !

_Oh, arrête !
_Je te jure ! C' est une vraie plaie ! Elle me déteste.
_Je suis sûre qu' elle t' aime bien, c' est juste que ...
_Eva ? On parle bien de la même personne ? ( il a un petit rire ). Ce qu' elle aimerait, c' est m' arracher la tête, la planter au bout d' une pique et parader avec. Elle me déteste, je te dis.
_Et évidemment, toi , tu ne la provoques pas du tout.
_Bien sûr que non ! Enfin … Bon, d' accord, des fois oui. Mais j' y peux rien. Elle est tellement insupportable qu' il faut bien que je me défoule un peu.
_Mais tu lui as sauvé la vie. Ca devrait arranger vos relations, non ?
_Tu rigoles ? Lui sauver la vie, c' était la meilleure chose à faire si je voulais m' assurer de sa haine éternelle ! Tu ne la connais pas, Kassandra, crois-moi. Cette fille a un ego surdimensionné. Se dire qu' elle me doit quoi que ce soit, à moi, Etan Almasy, ça ne va certainement pas arranger les choses.

Elle se lève en hochant la tête. J' entends un bruit de casseroles. Puis elle se rassied près d' Etan en lui tendant un verre. Il le prend silencieusement, et le vide. Elle porte une nouvelle fois son regard sur l' horloge, nerveuse.

_Il ne va pas tarder, lui dit Etan, ne t' inquiètes pas.
_Où comptes-tu aller, une fois reparti d' ici ? demande-t-elle, sans doute histoire de changer de conversation.
_Il faut que je trouve un moyen de quitter l' île, sans me faire repérer, et sans passer par Balamb. Tu as une idée ?

Dit comme ça, la réponse semble évidente. Balamb est le seul moyen de quitter l' île !

_Désolée, c' est à Gary qu' il faut demander, je ne sais pas du tout.
_Pas grave. Mais il faudrait qu' il arrive vite. On n' a pas intérêt à traîner.
_Et où est-ce que tu vas aller ?
_On doit essayer de se rendre à Trabia, pour demander de l' aide. En supposant que tout va bien là-bas, soupire Etan. Je n' ai aucune idée de ce qu' on y trouvera, ni s' ils sont déjà au courant des évènements. L' objectif, pour l' instant, c' est de réussir à partir d' ici vivants. Ensuite, on avisera.
_Pas génial, comme plan.

C' est exactement ce que j' étais en train de me dire.

_Peut-être, mais on' a rien de plus précis. Pourquoi est-ce que Gary est partit en ville ? demande Etan au bout de quelques minutes de silence.
_Pour vendre des fleurs, des fruits… mais … Ca commence vraiment à m' inquiéter, tu sais . Il devrait déjà être rentré… Ecoute, tu as l' air épuisé. Va prendre un bain dès qu' Eva a fini, et couche-toi. Tu as l' air d' en avoir besoin.
_Je n' ai pas fermé l' œil, la nuit dernière. Comme on était en pleine forêt, il fallait bien veiller à ne pas nous faire attaquer en plein sommeil. Je vais un instant dans la chambre. Tu me réveilles quand Gary arrive ?
_Si tu veux. Bonne nuit.

Leur conversation me trotte dans la tête pendant plusieurs minutes. La question se pose en effet : comment quitter cet endroit ? Il faut obligatoirement passer par Balamb. Maintenant que les travaux à la gare sont finis, ce serait simple comme bonjour de se rendre à Trabia en train. Oui, ce serait simple si Esthar ne l' occupait pas.
Alors, à part rejoindre la rive à la nage, je vois pas.
Ce qu'Etan a dit sur mon père aussi… Je me rends compte que je n' avais jamais vraiment su dans quelles circonstances Etan était arrivé à la BGU, ni ce qu' était devenu son père. Pourquoi Seifer a-t-il demandé à mon père de s' occuper d' Etan ?
Une fois qu' il est parti, je sors. Kassandra me demande si je veux venir prendre l' air avec elle. Pourquoi pas ? je suis encore très lasse, mais un peur d' air frais ne pourrais que me faire du bien. Nous faisons quelques pas dehors.

_Etan t' a dit, je suppose ?
_Quoi ?
_Que je suis une sorcière.
_Ah ? fais-je, étonnée qu' elle en parle aussi facilement. Oui, il me l' a dit…
_Ne t' en fais, ce n' est pas un secret, ça ne me pose pas de problème que tu le saches, rit –elle. Mais ce n' est pas facile de le dire à tout le monde …
_Est-ce que… C' est pour ça que vous vivez ici ?
_Ma mère était sorcière à l' époque où il y a eu toute cette histoire avec Ultimécia et Adel. Nous n' étions plus en sécurité là où nous vivions. Les voisins avaient peur. Je les comprends, remarque. Il devait y avoir un tel climat de terreur. Ils s' en. prenaient à nous. Alors nous sommes venus nous installer ici, et après la mort de ma mère, et nous sommes restés, mon frère et moi. Etant donné que mes dons s' amplifiaient, nous avons jugé plus prudents de rester à l' écart.

Je ne sais pas vraiment quoi dire. Je préfère la laisser parler.

_ Ne t' en fais pas, s' il y a un moyen de sortir tout ça, vous y arriverez, j' en suis sûre… me dit-elle au bout de quelques minutes de silence. Vous avez tous les deux beaucoup e force en vous. Mais pour ça, il faudra que vous appreniez à vous faire confiance, tous les deux. Vous ne pourrez dépasser tout ça qu' en unissant vos efforts.

Facile à dire. On parle du fils de Seifer Almasy, là, quand même. Seifer le traître. Celui qui s' est rangé du côté d' Adel.

_C' est une prédiction ? demandé-je en repensant à sa réaction, la première fois que nous nous sommes vues.

Kassandra s' arrête se tourne et m' observe, le visage grave.

_Tu ne crois pas vraiment à ces choses-là, n' est-ce pas ? Non, ce n' est pas une prédiction. Il n' y a pas besoin d' être devin ou sorcier pour savoir que vous allez vivre des choses difficiles. Et vous ne pourrez à ce moment là compter que l' un sur l' autre. Seuls, vous ne vous en sortirez pas. Je me doute de ce que tu dois ressentir à l' égard d' Etan. Mais dis-moi, crois-tu sincèrement qu' Etan est pour quoi que ce soit dans des faits qui se sont passés il y a plus de vingt ans, avant même sa naissance et la tienne ? Eva, tu vis dans un passé qui n' est même pas le tien. Etan n' est pas son père, et tu n' as pas à remplir le rôle de tes parents. Si tu es honnêtes avec toi-même, est-ce que tu as réellement une raison de détester Etan, ou bien est-ce que c' est son père que tu vois ? Tu n' as jamais vu Seifer pourtant, je me trompe ? Tu veux te charger d' une bataille qu' il n' est pas à toi de mener. Tu sais, je ne dis pas ça pour te blesser, mais je pense que tu ne rends pas compte toi-même; je voulais juste te dire ce que je vois ...

Pour le coup, je ne sais pas quoi dire... Bien sûr que c' est Etan que je déteste. Il est tellement ... arrogant, prétentieux ... insupportable ...

_Qu' est-ce que tu as eu, comme vision, la première fois que tu m' as vue ?

Elle me regarde attentivement pendant plusieurs minutes, se demandant sans doute si elle doit me répondre, mais elle se doute aussi que j' aurais un peu de mal à répondre à sa question.

_Beaucoup de force, du courage. De la volonté. De la souffrance.

Elle me fixe du regard, et soudain, j' ai un peu peur. Pas d' elle, non, mais de ce qu' elle a pu voir. S' introduire comme ça dans l' esprit des gens, c' est tellement… Enfin, c' est gênant, quoi… Je ne suis plus très sûre de vouloir l' entendre.
Une silhouette se détache du paysage, derrière Kassandra. Des soldats, ici ? Voyant mon expression , Kassandra se retourna.

_Gary ! s' écrie-t-elle en se précipitant vers le nouvel arrivant.

Pendant un instant, j' ai vraiment cru que c' était fini… Comme il se rapproche de la maison, je peux mieux le voir. Il est grand, très grand, brun, et il est aussi mat de peau que Kassandra peut être blanche.
Etan, alerté par le cri, arrive, les cheveux hirsutes, les vêtements en désordre, et se précipite hors de la maison. Il sort visiblement du bain. Gary , qui aperçoit Etan se précipite vers lui sans faire attention à sa sœur.

_Etan, dieu soit loué, tu es ici ! j' ai entendu parler de l' attaque de la BGU ! Ensuite, les esthariens sont arrivés, ils ont encerclé la ville. Plus moyen de sortir de Balamb. Il m' a fallu faire la queue des heures, et leur donner des explications interminables avant qu' ils ne me donnent l' autorisation de partir. Et j' ai vu des images à télé, Etan, c' est terrible !
_Qu' est-ce qu' ils ont dit ? demande Etan.
_Juste assez pour nous faire paniquer, rien de précis. C' est vraiment embrouillé. Personne n' a compris.
_Ils ne parlaient pas des blessés ?? Ils ont dit si certains élèves ont pu s' échapper ? demandé-je.

Il sursaute en m' entendant. Il ne m' avait pas remarquée, apparemment.

_C' est qui, ça ?? s' exclame-t-il.

« Ca » ?? Non mais …

_C' est une autre élève de la BGU, intervient Kassandra. Eva.
_Ah… Bonjour. Mais , alors, comment êtes-vous arrivés ici ? Comment est-ce que vous avez fait pour leur échapper ?
_C' est une longue histoire…

Nous rentrons, nous installons à table, et lui expliquons en quelques mots ce qui s' est passé hier.

_Il faut pas que vous trainiez ici, conclut Gary, dans un souffle.
_Le problème, c' est qu' on a besoin d' un moyen sûr.

Il réfléchit .

_Il y aurait bien une solution.
_Sans passer par Balamb ?
_Sans passer par Balamb. Ce n' est pas non plus l' idéal, mais ce n' est pas le moment de faire le difficile. Il vous faudra vraiment faire preuve de vigilance.

Il nous parle alors d' un vieux garagiste, qui vit plus à l' est, dans les montagnes. Tout le monde sait que ce n' est qu' un arnaqueur, mais il a des vaisseaux, et organise des voyages. Il y a une chance pour qu' il nous aide, mais on a intérêt à se méfier.
Comme il n' y a pas de temps à perdre, nous décidons de partir immédiatement. Il nous faut évidemment des vêtements. Pour Etan, ce n' est pas un problème, comme il passe souvent ici, il a des vêtements à lui ici. Pour moi, c' est plus compliqué. Kassandra propose de me prêter des vêtements, ce qui est gentil de sa part, mais le problème, c' est que son style est légèrement différent du mien : longues robes, des jupes ; ça lui va peut-être très bien à elle, mais moi… Et ce n' est pas non plus l' idéal pour un voyage. Finalement, à mon grand soulagement, elle me tend un pantalon en jean, un haut noir, qu' elle n' a jamais portés, et qu' elle avoue même ne pas bien savoir pourquoi elle les avait achetés. En tout cas, pour moi, c' est parfait. Il me faut aussi une nouvelle arme, et là encore ça pose problème. Il n' y a que des armes de combat en corps à corps : dagues, épées. Moi, ma spécialité, c' est plutôt le tir.

_Parce qu' elle adore jeter tout ce qui lui tombe sous la main à la tête des autres, dit Etan à Kassandra. Spécialement à la mienne, d' ailleurs.

A défaut de mieux, je prends une arme à double lame qui me plait bien. Il y a une poignée assez fine et noire, et de chaque côté part une lame en argent, joliment travaillée et brillante. Cassie remplit nos sacs de provisions, nous donne un peu d' argent, nous disons au revoir et nous partons.
Je me sens d' attaque, au moins. Et Etan aussi, apparemment. Nous marchons aussi vite qu' il nous l' est permis avec tous ces rochers, et ce vent infernal. Si jamais je glisse, ce que j' aimerais autant éviter, je tombe à la mer ; et si par miracle je ne me fracasse pas contre les rochers, je n' aurai plus qu' à rejoindre la rive à la nage ; ça serait pas triste. Le soleil est haut dans le ciel, maintenant, nous marchons, marchons, mais j' ai l' impression de faire du sur place. Notre progression est ralentie par tous les rochers que nous devons escalader. Dieu merci, il n' y a pas de monstres, il ne manquerait plus que ça. Risquer de se faire jeter à la mer par ces fichues bestioles. Le relief ne doit pas leur convenir non plus, je suppose, et c' est pas moi qui m' en plaindrais. En plus, on ne peut pas dire que le paysage évolue beaucoup : la mer à gauche, la montagne à droite, rochers devant et derrière, ça devient lassant à la longue. Pour rendre le tout plus attrayant, Etan semble avoir retrouvé sa langue, et s' est lancé dans un vague monologue qu' il tente vainement de transformer en dialogue, mais je ne suis pas d' humeur à discutailler gentiment avec lui. Surtout qu' hier, quand moi je tentais de parler il ne répondait pas. Il marche avec la lune, ce garçon-là, ma parole !
Rien n' indique que nous avancions vers une région habitée. Ni panneau, ni route. Je commence à me demander s' il y a réellement quelqu' un qui vit ici quand nous apercevons un vieil écriteau «Chez Jeff » . Quelle originalité.

_Je crois qu' on y est.

Nous entrons par une sorte de vieux portail en ferraille, et nous nous comprenons pourquoi même en se plaçant face à la montagne, on ne peut en aucun cas remarquer cet endroit : l' endroit semble avoir été creusé dans la roche, et comme l' entrée est sur le côté, elle est parfaitement invisible depuis la mer. C' est un immense hangar, où sont posés de grands vaisseaux. Il y a une autre ouverture en face. Mais il n' y a pas âme qui vive. Nous avançons, il y a un bureau dans le coin. Personne.

_DES CLIENTS !! fait une voix derrière nous.

Etan et moi sursautons, et nous nous retournons. Un vieux bonhomme, nous fait face. Il est en bleu de travail, le visage et les mains pleins de cabouis, et qu' il essuie avec un chiffon encore plus sale. Il a un grand sourire qui lui fend le visage en deux.

_Alors, le jeunes ! Que puis-je faire pour vous ?

Nous lui expliquons que nous cherchons un vaisseau pour partir, est-ce qu' il lui serait possible de nous emmener ? Il prend un air désolé.

_Vraiment navré, mes pilotes sont tous partis, et il m' est impossible de quitter le hangar, dit-il, comme si des centaines de clients devaient arriver d' une minute à l' autre dans son trou perdu.
_Et combien de pilotes avez-vous ? je demande, intriquée par ce «tous mes pilotes » ( qui pourrait bien vouloir vivre ici ?)
_Euh … deux. Mais ils doivent aller à l' autre bout de la planète et ne seront pas arrivés avant plusieurs jours …

C' est bien notre chance.

_Mais si vous voulez, s' empresse-t-il de dire, je peux vous vendre un vaisseau. J' en ai des très bien . Quasiment neufs.
_Vous ne loueriez pas par hasard ?
_Non, désolé, j' ai déjà eu de mauvaises surprises. Des vaisseaux loués que je n' ai jamais revus. Depuis, je vends ou rien. Mais je peux vous faire un prix, allez. Combien pouvez-vous mettre ?

Kassandra a beau nous avoir donner de l' argent, et même si cet homme nous fait cinquante pour cent sur le prix de son plus petit et plus lent vaisseau, ça ne suffirait pas à payer le quart de la moitié de ce que ça coûterait. Etan le sait.

_Euh… deux mille gils.

Jeff grimace.

_Alors là, fait-il sèchement, désolé, mais je ne peux rien pour vous.
_Ecoutez, je suis désolé, mais c' est tout ce que nous avons, mais si vous acceptez de nous le louer, nous pourrions…
_Je vous ai dit que c' était hors de question, passez votre chemin.
_C' est vraiment important, il faut absolument que nous ayons un vaisseau , monsieur !

A mon avis, il se fatigue pour rien, le seul moyen de régler ça, ce serait par la force. Et pourtant, Jeff stoppe un instant, alors qu' il s' apprêtait à retourner dans son bureau. Il se retourne et nous observe.

_A bien y réfléchir… Peut-être que j' aurais quelque chose pour vous, finalement … Suivez-moi.

Il file à toute allure vers l' arrière du hangar. Etan et moi soupirons de soulagement. Il suffisait d' insister, voilà tout. Il nous mène alors à l' intérieur de son bureau.

_Bon, je vais vous faire un prix ; mais vraiment parce que c' est vous, nous dit-il d' un air las, comme si cela lui demandait un effort urhumain. Je vous demanderai 1500 gils. Admettez que je fais un sacré effort.

En effet, c' est inespéré ! A ce prix là, on ne pourrait même pas acheter un vélo d' occasion en bon état …

_ Evidemment, ce n' est pas un vaisseau neuf, et il n' est pas non plus très moderne. Ne vous attendez pas à ce qu' il atteigne une vitesse phénoménale…
_Bien entendu, fait Etan, soulagé, qui ne s' attendait de toute façon pas à quelque chose dans ce genre.

Comme nous sommes déjà dans le bureau, nous payons, puis Jeff nous conduit auprès du vaisseau. Malgré ses petites jambes, il va à une allure telle que nous devons quasiment courir pour pouvoir le suivre. Nous traversons le hangar, passons devant quelques vaisseaux, puis nous sortons par le grand portail de derrière. Ici aussi, il y a quelques vaisseaux, mais pas vraiment en bon état. Je commence à avoir un mauvais pressentiment .

_Bon, voilà, vous pouvez y aller, nous dit-il.

Je regarde partout. Je ne vois rien, moi…

_Où ça ? demande Etan.
_Mais, enfin ! Ici, devant vous .

Devant, tout ce que je vois, c' est une sorte de petite colline. J' ai un très mauvais pressentiment. Il se dirige vers elle et pose la main dessus.

_Me dites pas que vous avez besoin de lunettes, en plus. Parce que là, je peux rien pour vous, ricane-t-il.

Etan se tourne vers moi, les yeux écarquillés.

_Très drôle, fais-je. Ecoutez, on est vraiment pressés, alors si …
_Si vous êtes pressés, alors je vous conseille de faire bouger ce truc. C' est votre vaisseau.

Il passe rapidement la main sur la butte, fait remuer un peu de poussière. On aperçoit en effet la carcasse d' un vaisseau.

_Voilà, dit Jeff, alors maintenant, je vous prierai de bouger cet engin d' ici. Ca encombre.
_Vous plaisantez ?!
_Pas du tout. Vous avez payé, il est à vous, vous l' emmenez, j' en veux plus.

Le pressentiment est confirmé. Il rigole pas. En regardant mieux, on voit en effet qu' il s' agit du haut d' un vaisseau, mais il doit être là depuis si longtemps que la terre s' est accumulée autour et au-dessus, et ça ne ressemble plus qu' à une petite colline.

_Mais c' est une ruine ! Vous n' êtes pas sérieux ?!
_ Pas du tout ! Tous mes vaisseaux fonctionnent parfaitement ! s' offense le bonhomme, comme si nous venions de mettre en doute l' efficacité de son meilleur vaisseau.
_Ah, oui ? Même celui-là ?
_Même celui-là, parfaitement ! Il suffit juste de…Trouver comment …

Il commence à s' éloigner, mais Etan l' arrête.

_ Attendez, c' est pas possible, rendez-nous l' argent, on trouvera un autre moyen.

L' autre hoche la tête.

_Désolé. « Ni échangeable, ni remboursable ».
C' est de l' arnaque !
C' est écrit juste ici, fait l' escroc en chef en dégageant une grande pancarte qui était recouvert d' une bache crasseuse, et où ces quatre mots sont en effet inscrits en grosses lettres.

Encore aurait-il fallu que nous puissions la voir. Les allusions au talent d' arnaqueur de Jeff me reviennent, et il est probable qu' à Etan aussi.

_Donc, si vous en voulez, prenez-le, et si vous n' en voulez pas, partez, je n' ai pas que ça à faire, moi.
_Vous savez bien qu' il ne décollera jamais ! Vous nous avez pris 1500 gils pour ça !
_Jeune homme, à ce prix-là, vous n' auriez même pas un vélo en bon état. Trouvez comment le mettre en route, il marchera sûrement. Moi j' ai jamais compris comment ça fonctionnait…

Parti, le sourire. Il nous tourne le dos, et s' en va. Cette ordure va le regretter. Etan me retient par le bras.

_Laisse tomber, souffle-t-il. Fait pas d' histoire. Il est dans son tort, mais il serait capable d' appeler la police, et la dernière chose dont on a besoin, c' est que la flotte d' Esthar vienne alors qu' on est coincés ici. Viens plutôt m' aider à comprendre comment ça fonctionne…
_De toute façon on est coincés ici ! Ce machin ne décollera jamais ! Même lui ne sais pas comment ça marche .
_Evidemment qu' il n' en sait rien, c' est un crétin. Viens.

Je comprends pas ce qu' il espère faire de ce truc… C' est une ruine. Tout d' abord, nous passons des heures à déblayer tout ça. On finit par apercevoir nettement l' appareil, mais c' est pas joli-joli. Vu d' ici, impossible de dire la taille de l' appareil: il semble être enfoncé dans le sol, ce qui ne présage rien de bon quand à la raison pour laquelle il est ici. Et elle est où la porte d' entrée?? Il manquerait plus qu' elle ne soit en dessous. Quoi qu' il en soit, je vois mal comment on pourrait faire démarrer cet engin, vu l' état dans lequel il se trouve.

_Tu sais piloter ? demandé-je à Etan .
_Il paraît que j' apprends vite, fait-il, incertain.

Ca, ça veut dire non.

_Et toi ?
_Zell m' a bien laissé les commandes, une fois, mais c' était il y a longtemps, et je ne suis pas sûre qu' elles étaient vraiment enclenchées.

Y'a plus qu' à prier pour que cette machine ait un pilotage automatique vraiment efficace. Jeff ne semble pas disposé à nous aider. Il s' est enfermé dans son bureau. Inutile d' attendre quoi que ce quoi de cet escroc. Nous cherchons tout le reste de la journée, mais le soleil se couche vite, et on y voit de moins en moins. Il faut se rendre à l' évidence: Etan et moi allons devoir passer la nuit ici.
Nous nous adossons contre le vaisseau, pour nous abriter du vent, maudissant intérieurement Jeff et ses fichues machines. Etan est allés jeter un coup d' œil aux autres vaisseaux, et il n' y a pas moyen de les mettre en route, Jeff a dû prendre ses précautions.

_Alors, Etan, tu en as encore beaucoup des idées brillantes comme celle-là ?
_Ne commence pas.
_Je commence si je veux. Tu vois dans quelle situation on est, un peu ? On est bloqués ici avec un type qui peut appeler les autorités d' un instant à l' autre !
_On trouvera un moyen de faire décoller le vaisseau .
_Arrête de dire n' importe quoi ! On a plus de chances de partir d' ici en portant le vaisseau sur notre dos que de réussir à le faire décoller.
_Je te dis qu' on y arrivera. Calme-toi un peu.
_Je suis TRES calme ! m' énervé-je en le fusillant du regard.

Il soupire.

_Ecoute, ça peut pas continuer.
_Quoi ?
_Les disputes, tout le temps, pour un oui ou pour un non.
_Moi, ça me va très bien.
_On n' arrivera à rien comme ça. Les ennemis sont suffisamment nombreux et difficiles à battre, on va pas en rajouter non plus.
_Et qu' est-ce que tu proposes ?
_Une trève. On arrête de se battre tant que cette histoire n' est pas résolue.
_Alors espérons que ce sera vite fait, je ne sais pas combien de temps je tiendrai…
_Ecoute, tu pourrais faire un effort , s' agace-t-il. Je ne te parle pas de devenir amis. Juste de stopper les hostilités un moment. Pense à la BGU. Tu peux bien faire ça pour eux, non ? Est-ce que c' est trop demander ?

Ce qu' il peut m' énerver… Maintenant il se donne de grands airs de noblesse d' âme, comme s' il était le seul à s' inquiéter. Faire une trève… Ca ne me tuerais pas, je suppose ; ça doit être envisageable ; difficile, mais envisageable. Suffit d' oublier que c' est Etan. Quelque chose me revient en tête, pourtant, quelque chose qui fait qu' une voix dans ma tête me crie qu' aucune forme de paix ne sera jamais possible avec lui.

_Pourquoi est-ce que mon père est venu te voir , à l' infirmerie, le jour de son retour ?

Etan, qui commençait à s' endormir, rouvre un oeil.

_Comment ça, le jour de son retour ?
_Quant il est revenu de la fac de Trabia.
_Je ne l' ai pas vu ce jour-là.
_Il est venu à l' infirmerie.
_Eh bien peut-être, mais je ne l' ai pas vu, moi, dit-il en ramenant la couverture sur lui et en me tournant le dos pour se rendormir tranquillement.

J' ai l' impression de recevoir un coup en pleine poitrine.

_Tu mens.

Il sursaute et se retourne pour me faire face.

_Pardon ??!
_Tu mens. Je sais qu' il est venu te voir.
_Tu as pas fini de me traiter de menteur dès que j' ouvre la bouche ? Pourquoi est-ce que je te raconterais des histoires?? Si ça te fais plaisir de penser qu' il est venu me voir, tu peux croire ce que tu veux, après tout, c' est ton problème. Mais moi je te dis que je l' ai vu une fois que je suis sortit de l' infirmerie, et c' était quatre jours après son arrivée. Maintenant, tu en fais ce que tu veux, mais laisse-moi dormir.

Et il se recouche.

Il n' était pas à l' infirmerie pour voir Etan. Il n' était pas là pour lui. Hébétée, je ne peux que remuer cette phrase dans ma tête pendant plusieurs minutes. Est-ce que ce que Maman disait était vrai ? C' était vraiment à mon sujet ? Dire que j' ai quitté mon père en pensant que…

Je pleure souvent, ces derniers temps… Heureusement , Etan dort, et je n' ai pas besoin d' essuyer les larmes qui coulent sur mes joues.
Rae
Rae
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   Posté le 19-05-2005 à 22:07:31   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

CHAPITRE 7

A la lumière du jour, le lendemain, la situation semble moins désastreuse que la veille. Nous avons réussi à déblayer la partie supérieure du vaisseau, il ne reste plus que le bas à faire ; et s’ il n’ est pas en excellent état, c’ est tout de même moins catastrophique que ce que je pensais. L’ avant est enfoncé, mais il s’ agit probablement que de la coque, il se peut très bien que l’ intérieur n’ ait pas subit de dégâts. La coque est un peu endommagée par endroits, aussi , il faudrait juste renforcer tout ça.
Par contre, la porte, elle , est toujours introuvable. Nous continuons de creuser pour dégager l’ appareil, et je commence à craindre qu’ il ne soit profondément enterré.
Voilà que je me mets à rêver debout comme Etan… Quand bien même nous arriverions à dégager le vaisseau, il faudrait d’ un : qu’ il soit encore en état de voler ; et de deux : que nous arrivions à le contrôler; et les deux me paraissent aussi improbables l’ un que l’ autre. Il s’ est mis à pleuvoir, pour couronner le tout, et ça fait une heure que je patauge dans la boue.

- Eva, viens voir ça !! me crie Etan au bout de quelques minutes.

Qu’ est-ce qu’ il veut encore ?
Je le rejoins de l’ autre côté de l’ appareil. Il me fait signe de jeter un œil.
Plus haut, j’ aperçois un immense logo peint en rouge. ZombaTransports . Ca me dit quelque chose…

- Tu sais ce que c’ est ? me demande Etan.

Ca me revient !

- Zomba Transports ! Formidable. Vraiment formidable !

Je suis prise d’ un fou rire nerveux. C’ est vraiment le bouquet.

- Qu’ est-ce qui se passe ? demande Etan en me regardant comme si j’ avais perdu la tête.
- Rien, à part que si jamais on arrive à faire décoller cette horreur, on aura plus qu’ à prier pour que personne ne trouve bizarre de voir voler le vaisseau d’ une compagnie qui a disparu depuis des années !
- Zomba transport, je me souviens. C’ est une compagnie marchande, c’ est ça ? Dans ce cas là, il y a une bonne nouvelle : ce sont les plus simples à piloter, pas besoin d’ être un génie pour ça. Même à toi, ça devrait pas te poser de problème.
- Très drôle. Je suppose qu’ il y a aussi une mauvaise nouvelle ?
- La mauvaise… C’ est que si c’ est si simple à piloter, c’ est parce que ce n’ est ni très puissant, ni très rapide. C’ est pour transporter de la marchandise, ils n’ ont pas besoin d’ atteindre des vitesses astronomiques…
- D’ autant plus avec celui-là qui est cloué au sol ! Et de toute façon, aucun de nous deux ne sait piloter !
- Tu m’ as dit que tu l’ avais déjà fait, la dernière fois…
- UNE fois ! je répète, excédée.
- Ce qui fait de toi la plus qualifiée de nous deux.
- Sur quelle planète tu vis ?? Il a beau être le moins complexe, c’ est tout de même un vaisseau, ça se conduit pas comme une voiture !

C’ est à croire qu’ il le fait exprès.

- Tu comptes rester là ou tu vas m’ aider ? demande-t-il en me voyant jeter la pelle avec mauvaise humeur.
- Tu ne vois pas que c’ est inutile ? Ca ne marchera pas. On n’ arrive même pas à trouver l’ entrée, comment tu veux qu’ on le fasse décoller ?
- Si tu restes ici, c’ est certain qu’ on ne va pas avancer. Ecoute, je suis sûr que si on arrive au bout de tout ça on va trouver une solution.
- Et moi, je ne crois pas aux miracles, je lui lance en m’ asseyant contre le mur de terre qu’ il reste encore à déblayer avant d’ atteindre la coque.

Je suis surtout complètement crevée.
Il se remet à creuser à côté de moi. En silence, Dieu merci. Quand il en aura marre, il m’ écoutera peut-être. Il rêve, celui-là, je ne comprends toujours pas ce qu’ il cherche à tirer de cet engin. Il faut trouver un moyen de retourner à Balamb sans se faire voir. Ca prendra encore des jours, le temps d’ arriver là-bas… Il faut aussi espérer que…
Tout a coup, le mur de terre derrière moi s’ effondre, et je perds l’ équilibre, m’ enfonçant dans le vide. Je roule sur moi-même sans pouvoir m’ arrêter sur une petite pente, et j’ arrive sur une surface plate où j’ atterris sur le dos.
Je rouvre les yeux. Il fait noir tout autour de moi, sauf une petite ouverture par laquelle j’ ai dû passer et qui fait entrer un peu de lumière ; ça se trouve à quelques mètres de moi et j’ aperçois la tête d’ Etan.

- Est-ce que ça va ?? me crie-t-il.

J’ ai le dos en compote, à part ça tout est parfait.

- Je crois que j’ ai trouvé l’ entrée, fais-je en me relevant avec difficulté.

J’ y vois vraiment rien. Etan déblaye un peu plus le passage, puis repasse sa tête par l’ ouverture.

- Où est-ce que tu es ? je ne te vois pas !
- Moi non plus, si tu veux savoir …
- Bon, attends un instant, je reviens.

Il disparaît un moment, puis réapparait en brandissant une petite lampe de poche.

- Plus à droite. Ma droite ! un peu plus bas…

Il me trouve enfin et me plante la lumière dans les yeux.

- Ok, attrape !

Il me lance la lampe, disparaît à nouveau, envoie les sacs et saute, une autre lampe à la main. Ces lampes ne sont pas très puissantes, mais au moins on voit où on met les pieds. Pas de doute, on est bien à l’ intérieur du vaisseau. Il y a des tas de caisses en bois empilées un peu n’ importe comment, beaucoup de terre — celle qui devait maintenir la porte ouverte — et une porte, au fond. Il nous faut déplacer et escalader plusieurs caisses avant de l’ atteindre.
Elle s’ ouvre avec difficulté mais nous en venons à bout et nous engouffrons dans un long couloir. Il y a plusieurs portes, des échelles un peu partout... Par où aller ?

- Tout droit. Ca va bien nous mener quelque part, propose Etan en haussant les épaules. Objectif : trouver quelque chose qui ressemble à une salle de commandes.

Et ça , c’ est un candidat au Seed…

S’ enfoncer dans le noir avec deux malheureuses lampes de poches et Etan pour seule compagnie a quelque chose de plutôt angoissant.

- On se croirait dans un tombeau, chuchote Etan en ouvrant plusieurs portes.
- La ferme.

Je m’ imagine déjà des zombies surgissant des portes, des monstres prêts à nous sauter dessus. Les monstres, ça ne me dérange pas, mais c’ est le fait qu’ ils puissent venir de n’ importe où comme ça qui me rends nerveuse.
Ce vaisseau a l’ air immense, vu de l’ intérieur. Vu les échelles qui mènent au niveau inférieur, le vaisseau doit bien être enterré. J’ ouvre plusieurs portes, au hasard. Je crains de plus en plus une mauvaise surprise, même s’ il est évident que si nous avons eu tant de mal à entrer, personne n’ a pu le faire avant nous. Pas de trace de squelette, en tout cas, c’ est plutôt bon signe. J’ ai l’ impression de devenir complètement parano et le moindre bruit me fait sursauter.
C’ est un cul de sac. On se retrouve face à un mur. Bon… Demi tour. Plus loin, on grimpe à une échelle en acier fixée au mur. On débouche dans un nouveau couloir. Il y a des tas de papiers qui traînent un peu partout. Nous entrons dans différentes petites pièces, la cuisine. Nous faisons demi-tour. Je ne sais même plus de quel côté est censé être l’ avant de l’ appareil.
Nous arrivons dans un grande salle. Il y a un tableau de commande avec plein de boutons, des sièges. Ca doit être ici. Etan me tend sa lampe pour que je l’ éclaire, et il s’ affaire sur les claviers. Rien ne répond.

- Etan, ce n’ est pas en tapant dessus comme ça que tu vas réussir à l’ allumer.
- Eva, ce n’ est pas en te contentant de me regarder faire que ça va fonctionner. Aide-moi au lieu de rester plantée là.
- Je t’ ai déjà dit que je n’ y connaissais rien !
- Doit bien y avoir un truc qui fonctionne tout de même dit-il en tapant frénétiquement sur toutes les touches à la fois.

Je me m’ approche néanmoins du tableau de commande. Réfléchissons. Je n’ ai piloté qu’ une fois, mais j’ ai souvent vu Zell le faire. Sur quel bouton appuyait-il, pour mettre en marche le vaisseau déjà ? Non, c’ était un levier. Je me penche sur le clavier et souffle un bon coup pour faire sortir la poussière. Il y a des inscriptions à côté des différents boutons . Ah , light ! C’ est déjà ça. J’ appuie, et quelques secondes plus tard, tout le vaisseau se met à trembler bruyamment. Etan se tourne vers moi.

- Qu’ est-ce qui se passe ? me demande-t-il.

La salle s’ éclaire.

- Tu vois ! s’ exclame-t-il. Je savais bien que ça fonctionnerait !

Tout s’ éteint immédiatement. Je retiens – dans un effort surhumain – un commentaire cinglant, et Etan se repenche sur la console sans un mot.
Rien ne bouge , même en appuyant à nouveau sur le bouton. Je lui laisse sa lampe et je vais inspecter le reste de la salle en attendant qu’ il ait finit de s’ acharner inutilement.
L’ intérieur est plutôt en bon état, malgré un certain désordre. Je me demande ce qu’ il s’ est passé pour que qu’ il finisse ici. Je trouve une carte affichée sur un de mur. C’ est le plan du vaisseau. Je passe sur la vitre un vêtement qui trainait par terre pour enlever la poussière.
Apparemment, il y a cinq grandes pièces pour stocker les marchandises, et nous avons dû entrer par celle en bas à gauche. Et il semble que la salle des machines se trouve juste en dessous de celle où nous nous trouvons en ce moment. Pendant que l’ autre idiot s’ acharne toujours sur les commandes pour essayer de rétablir le courant, je cherche des yeux la porte qui mène à l’ étage en dessous. Il y a une trappe, là-bas. Je l’ ouvre sans trop de difficultés. C’ est bien là. Etan s’ approche.

- La salle des machines ?
- Oui. Ce sera tout de même plus utile de voir ce qui ne marche pas dans le moteur avant de détruire totalement les commandes.

Nous descendons l’ échelle, et regardons les machines avec les lampes.

- Le moteur est plus grand que moi… soupire Etan. Comment savoir ce qui ne marche pas ? fait Etan.
- Laisse.

Il se tourne vers moi, étonné.

- Je croyais que tu n’ y connaissais rien ?
- J’ ai dit que je n’ avais piloté qu’ une fois, mais j’ ai souvent aidé Zell a entretenir le moteur de l’ Hydre.
- Ca n’ a pas grand chose à voir, fait-il remarquer en regardant la machine qui doit bien avoir trois fois l’ age de l’ Hydre.
- On verra bien. Eclaire-moi, c’ est tout ce que te demande.

Nous explorons rapidement la salle des machines. Le générateur d’ énergie fonctionne, ce n’ est donc pas un problème. C’ est incroyable, si le reste de l’ appareil n’est pas endommagé, il se pourrait très bien qu’ il vole, en fait… Il ne me faut pas longtemps avant de comprendre ce qui ne va pas. La pièce qui est censée transmettre l’ énergie à tout le reste de l’ appareil est cassé. La ventilation est complètement bouchée, depuis le temps, et on risque un surchauffage si on ne fait rien, mais le problème est vite résolu. Il y a d’ autres pièces cassées, ça devrait être facile à remplacer si …

- Et où est-ce que tu comptes trouver les pièces ? demande Etan, une fois que je lui expose la situation.
- Je vais les emprunter.
- Jeff ne voudra jamais !
- Je n’ avais pas l’ intention de lui demander son avis.
- Tu ne vas pas voler les pièces, quand même ?!
- Je vais me gêner !

Etan considère la questions quelques secondes avant d’ admettre :

- Oh et puis, t’ as raison…

Au vu des évènements et du personnages, je ne m’ embarrasserai pas de ce genre de scrupules …
Nous sortons de l’ appareil – en nous perdant deux fois de suite -, nous nous glissons dans le hangar, ouvrons les moteurs d’ autres appareils restés là, et empruntons les pièces dont nous avons besoin. Elles ne sont pas prévues pour ce modèle de moteur qui est beaucoup plus ancien, mais j’ arrive à les assembler. Maintenant, si quelque chose ne marche pas, je ne peux pas faire mieux. Etan a aussi reformé de son mieux le devant du vaisseau et consolidé la coque de l’ appareil, histoire qu’ il ne tombe pas en morceaux pendant le vol.
Nous remontons dans la salle de contrôle. Etan prend une longue inspiration avant d’ appuyer sur le bouton. L’ appareil se met à trembler, et nous attendons pétrifiés pendant une minute ou deux. La lumière s’allume.

- Ca marche, sourit Etan. Le reste va aller, maintenant. Beau boulot. Allez, en place. Votre fauteuil n’ attend que vous, Capitaine fait-il en me montrant le siège du pilote.

Je me sens palir.

- Je t’ aurais prévenu, je maugréé en m’ asseyant. Quand on s’ écrasera en plein océan, tu ne pourras pas dire que c’ est de ma faute…

J’ ai des sueurs froides rien qu’ à m’ imaginer commander ce vaisseau. Je nous voit déjà tomber à pic et nous écraser… Du calme, respire. Il a dit que c’ était facile à piloter… le plus simple des vaisseaux…
Quelle andouille ! Qu’ est-ce qu’ il raconte ?? Un vaisseau, facile à piloter ??! Qu’ est-ce qu’ il en sait ??
J’ essaie désespérément de rassembler mes esprits, et de me souvenir de ce que j’ ai fait la dernière fois. Il y a bien quelques trucs qui me reviennent, mais…
Etan va s’ asseoir à côté, mais je sais bien qu’ il ne me sera d’ aucun secours si quelque chose ne va pas. Maintenant, c’ est à moi d’ assurer.
Je fais une courte prière avant de me lancer ; j’ actionne prudemment le levier, et je sens le vaisseau vibrer.
Je me concentre sur ce qui se passe devant moi. Je relève encore un peu la commande, et cette fois, nous décollons vraiment, en soulevant un immense nuage de poussière. La terre tombe du toit du vaisseau et glisse sur le pare-brise, avant de tomber plus bas. Le vaisseau tangue légèrement; je bloque le levier et active prudemment une autre manette qui doit, si je me souviens bien, nous faire avancer. Le vaisseau s’ élève dans les airs, et j’ ai l’ impression que parcourir ces quelques mètres prend des siècles. Nous arrivons au dessus de la mer. C’ est le moment de vérité. Etan déglutit péniblement et s’ agrippe à son siège en tentant de faire comme si de rien n’ était.
Contrairement à ce que je craignais, nous ne tombons pas à pic, mais restons au même niveau , et ça procure un sentiment étrange. Je CONDUIS ce vaisseau !
Soulagée, je continue à avancer et Etan semble s’ être remis à respirer. J’ arrive à accélérer. Nous commençons à nous détendre. Je vérifie la destination, c’ est bien vers Trabia. Ca ne doit pas être bien loin, de toute façon, on devrait vite atteindre la rive, et après, on verra bien.

- Eva, il y a quelque chose qui nous suit, fait Etan d’ une voix blanche.
- Quoi ? Tu es sûr??

Il me montre le radar, mais j’ ai tellement peur qu’ on s’ écrase si je relache ma concentration sur le pilotage que je n’ arrive pas à bien voir ; et puis je n’ ai jamais appris à utiliser un radar…

- Où ça ?? je m’ énerve. Comment on voit les distances sur ce truc ??
- Euh … j’ en sais rien, mais en tout cas ça se rapproche.
- Mais c’ est qui ?
- Je sais pas, je peux pas voir derrière le vaisseau. Il est où le rétroviseur ?
- Etan, j’ ai beau ne pas m’ y connaître beaucoup en vaisseau, je peux t’ affirmer que tu n’ en trouveras pas.
- Alors je vais voir.
- Où ça ? Où est-ce que tu vas ??
- Attends- moi ici.

Très drôle.
Il se détache et sort. Je l’ entends courir dans le couloir, et je tente de conserver mon sang-froid, tant bien que mal. Il revient cinq minutes plus tard.

- Des Esthariens, souffle-t-il en se rasseyant.

A son ton, je comprends qu’ il s’ y attendait. Des Esthariens. Merde, merde, merde.

- Accélère. On n’ a rien pour se défendre, et je doute que le vaisseau tienne longtemps le coup s’ ils nous attaquent.
- Parce que tu crois vraiment qu’ on pourra les semer ? Tu te rappelles dans quoi on est ?
- Accélère quand même.
- Qu’ est-ce que tu crois que je fais ? Je suis déjà à fond !
- Déjà ?

Il se penche sur le panneau de contrôle, les sourcils froncés.

- On est trop lourds, ça nous ralentit murmure-t-il. On aurait dû vider les salles de réserve.
- Ca nous aurait pris des jours à vider tout ça ! On n’ avait pas le temps. Lourd ou pas, c’ est pas avec cet appareil qu’ on serait passés inaperçus. Pense plutôt à ce qu’ il faut faire maintenant .
- Si tu as une idée, elle est la bienvenue.
- Tu crois qu’ ils savent qui on est?
- Je ne sais pas , mais en tout cas, ils ne nous ont pas encore attaqué, c’ est plutôt bon signe… C’ est quoi, ce bruit ?

Une grande sirène se fait entendre. Sur le radar, la forme se rapproche dangereusement de notre vaisseau, jusqu’ à le dépasser légèrement. On aperçoit les pilotes par le pare-brise, et apparemment, ils veulent regarder à l’ intérieur du notre. Etan et moi nous nous tassons sur nos sièges. On est fichus. Ils nous font signe d’ allumer la radio. Ils sont marrants, il y a longtemps qu’ elle fonctionne plus… Ils se penchent vers leur panneau de contrôle, et une voix forte se fait entendre.

- Veuillez arrêter votre vaisseau. Nous allons procéder à un contrôle.
- On est mal, murmure Etan, nerveux. S’ ils ne savent pas déjà que le vaisseau n’ est pas censé voler, ils vont comprendre quand ils nous demanderont ses papiers et notre autorisation de vol. Continue.

Je réussis à repasser devant – parce que leur vaisseau n’ est pas à fond - mais ils nous collent.

- On arrivera jamais à les semer et ils ne nous lacheront pas . On a quelque chose pour se défendre ?
- Etan, on est sur un vaisseau marchand, pas de guerre.

Puis j’ ai une idée.

- Les G-Forces ! Il faut que l’ un de nous deux aille à l’ arrière, ouvre une des portes et fasse appel à son G-Force, pour éviter qu’ il n’ apparaisse dans le vaisseau et nous fasse exploser nous.
- Très bien, je t’ attends ici.
- Ok, par l’ un de nous deux, j’ entendais toi. Je ne peux pas encore me dédoubler, et je suis en train de conduire, figure-toi. Je croyais que tu ne savais pas piloter ?
- Non mais … Ton G-Force serait plus efficace que le mien hésite-t-il.

Mais qu’ est-ce qui lui prend ? Son G-force fait tout à fait l’ affaire, il le sait bien ! Il cache quelque chose. Je ne crois pas que ce soit qu’ il ait peur, il est à peu près aussi rentre-dedans que moi, il n’ a jamais été effrayé par un combat. Et il sait bien que je ne peux pas lacher les commandes. Tout à coup, une grande secousse se fait sentir. Le vaisseau chute de quelques mètres avant que j’ arrive à reprendre le contrôle. Ces malades nous tirent dessus ! Etan se lève alors et sort de la cabine en courant. Pas trop tôt.
Les Esthariens nous tirent de nouveau dessus et je perds le contrôle de l’ appareil. Bon sang, on va s’ écraser, si ça continue ! J’ arrive à remonter légèrement l’ appareil.
Un voyant lumineux rouge s’ allume devant moi. Une des portes est ouverte, celle du côté droit, là où se trouve le vaisseau estharien. Le ciel prend des couleurs orangées sur ma droite, et j’ entends une explosion. Le vaisseau estharien disparaît du radar, et quelques minutes plus tard, Etan arrive dans la cabine, en sueur, et s’ affale sur son siège.

- Voilà. C’ est fait.
- Y’ a un autre problème. Je sais pas ce qu’ ils ont touché mais on continue à perdre de la hauteur…
- … Mais on gagne en rapidité ? remarque-t-il, ahuri, en regardant le compteur.
- Ca , c’ est parce qu’ on est en train de s’ écraser.
- Fait ton possible pour nous maintenir en hauteur, je reviens, je vais essayer quelque chose .
- Quoi ? Qu’ est-ce que tu …

Il sort de nouveau.

C’ est pas bon, pas bon du tout. On descend trop vite. Il aura fallu ça pour gagner de la vitesse, je m’ en serais passée, en fin de compte. Et le vaisseau à tendance à pencher sur la droite, ce qiu nous dévie de notre trajectoire. Je n’ arrive pas à rétablir l’ équilibre, les commandes tirent trop. Tous les voyants lumineux clignotent furieusement sur le panneau de contrôle à ma gauche. Question à 10 000 gils : est ce-qu’ il est plus dangereux de s’ écraser sur la terre ou dans l’ eau ? C’ est les seules options qu’ il me reste. Mais que fiche Etan ?
Oh non … Je m’ aperçois soudain qu’ une falaise se trouve devant nous.
Certains voyants lumineux s’ arrêtent de clignoter. Je tire de toutes mes forces sur le levier pour nous faire remonter au dernier moment, mais le bas de l’ appareil heurte un rocher dans un grand fracas. Le vaisseau, ralenti, se met à glisser sur le côté, et cette fois nous tombons dans le vide.
Une grande lumière blanche envahit la cabine juste avant que nous nous écrasions, et je me sens soulevée de mon siège au même moment où on entend un grand fracas.
Lorsque j’ ouvre les yeux, je flotte au-dessus de mon siège. Toute la cabine au dessus de moi est complètement détruite, il y a plein d’ éclats de glace un peu partout. Et devant moi, Sheba. Je n’ arrive pas à y croire. Je suis encore vivante. Elle m’ a sauvé. Mais elle n’ est pas comme d’ habitude. Elle paraît … Plus pale, presque transparente. Qu’ est-ce qui se passe ?
Elle me fait descendre. J’ ai un peu le vertige. Tout est complètement détruit. Sheba a tout fait exploser autour d’ elle , comme d’ habitude; la pièce est un vrai carnage. Je me demande qui de la chute ou Sheba a fait le plus de dégâts. Mais je ne m’ en plaindrai pas. Le vaisseau est couché sur le côté droit.
Elle sort de la pièce lentement et s’ engage dans le couloir, se retourne vers moi et remue les lèvres avant de disparaître.

-Etan ?!

Mais où est-il passé ? Tout est silencieux … Et si …
Je me dépêche de sortir, en m’ aidant des sièges pour grimper vers la porte. Je sors de la cabine et vais dans le couloir. De quel côté il est allé ? J’ ai déjà du mal à m’ y repérer normalement, mais là… Il me faut faire attention à ne pas tomber par une des portes. Je l’ appelle , mais pas de réponse. C’ est pas vrai... Il est forcément allé vers l’ arrière , mais est-ce qu’ il est descendu , resté au même niveau, ou monté ? et dans quelle pièce est-il ? S’ il est encore vivant, je tue ce crétin de mes propres mains !
Je me glisse par l’ endroit où se trouve l’ échelle, et Sheba apparaît à nouveau ; elle se déplace en flottant avec légèreté dans le couloir en l’ illuminant, elle me montre une porte puis disparaît à nouveau. Je vais l’ ouvrir en prenant garde à ne pas tomber.
Tout en bas je vois Sheba , dans son apparence habituelle, cette fois. Elle éclaire la salle, debout près d’ Etan . Il est immobile, sur des caisses.

Je me laisse glisser prudemment sur le sol, en m’ accrochant à ce que je peux; je prends le pouls d’ Etan. Il est toujours vivant ! Incroyable… Sheba est toujours à côté et me regarde intensément. Non, ce n’ est pas elle qui… Elle était avec moi au moment où le vaiseau s’ est écrasé…. Et pourtant… Des éclats de glace gisent sur le sol, et l’ air est frais, un peu comme dans la cabine où je me trouvais . C’ est Sheba qui a protégé Etan ? En même temps que moi ? Comment ? Et pourquoi ?

Bon, une chose à la fois, il faut déjà sortir d’ ici . Je n’ aurais jamais la force de trainer Etan jusqu’ à la porte de sortie.

Finalement, je demande à Sheba de détruire – ce qu’ elle fait le mieux - le mur qui se trouve à côté de nous. Quelque chose me dit qu’ il ne vaut mieux pas trainer ici . Les cris des personnages des séries télévisées criant « ça va exploser !! » me reviennent en tête, et je n’ ai pas vraiment envie de rester ici pour vérifier si c’ est réellement de la fiction.

J’ oubliais une chose : les sacs !

- Sheba, surveille-le, je reviens tout de suite.

Je grimpe vers la porte, retourne dans la cabine, récupère les sacs, et retourne rejoindre les autres.
Une fois la paroi détruite, je prends Etan par dessous les épaules et le traine de mon mieux à l’ extérieur. Je le tire comme ça sur plusieurs mètres, jusqu’ à ce qu’ on soit à une distance raisonnable de l’ appareil en cas de problème.

Etan ne se réveille pas, il est tout blême, et de la sueur perle sur son front. Mais qu’ est-ce qu’ il a ? Il est vraiment juste évanoui ? Il faudrait de l’ eau, au moins. Je jette un oeil autour de l’ endroit où nous nous trouvons , pour la première fois depuis les dix minutes où je me suis misérablement écroulée ici.

Parfait. On a atterri dans un désert. Pas une coin d’ ombre à des kilomètres. Où est-ce qu’ on a bien pu tomber ? Je me souviens que nous dérivions légèrement vers le sud, tant que nous étions suivis, mais après avoir été touchée, ce n’ était pas ce qui me préoccupait le plus. Je me sens vraiment trop k.o. pour réfléchir. Etan se réveille enfin.

Je me rapproche.

- Est-ce que ça va ?
- Bel atterrissage, Capitaine, sourit-il faiblement.
- C’ est ça, fais le malin. Toi, si t’ étais pas à deux doigts de passer l’ arme à gauche, je sais pas ce que je te ferai. Faut être complètement inconscient pour sortir comme ça alors que …
- S’ il te plait, du calme, du calme, gémit-il. Je suis vraiment à deux doigts de passer l’ arme à gauche, alors épargne moi, tu veux.

Il s’ assoit en grimaçant.

- Ca fait combien de temps qu’ on est là ? demande-t-il en se passant la main sur la tête.
- J’ en sais rien. Une demi-heure peut-être.

Il regarde le vaisseau.

- Wow. Là, c’ est une épave.
- Cette fois, il ne décollera plus, c’ est certain. J’ arrive pas à croire qu’ on soit entiers.
- Qu’ est-ce qui s’ est passé ? Toi, tu étais attachée dans la cabine, mais moi j’ étais au milieu des caisses en bois, c’ est un miracle que …
- Remercie Sheba, mon G-force.
- Pourquoi tu me l’ as envoyée ?
- Je ne t’ ai rien envoyé du tout ; c’ est elle qui est venue toute seule, je ne sais pas pourquoi.

Silence. Il se laisse retomber sur le dos.

- Tiens tu devrais manger un peu, dis-je en lui tendant son sac.
- Donne-moi juste ma gourde , ça ira.

Silence à nouveau. Dans quel pétrin on s’ est encore fourrés ? On ne peut apercevoir aucune ville d’ ici ; derrière nous, il n’ y a que la falaise, et derrière cette falaise, la mer. Etan regarde le paysage.

- Tu sais où on est ? je lui demande.
- Comme ça, là, ça ne me dit rien, je suis trop fatigué… Et il faudrait que je sache la direction qu’ on a pris.
- En tout cas, on est pas à Trabia. Je crois bien que ça nous a éloigné.
- Et ça nous aurait éloigné de quel côté , tu crois ? demande-t-il d’ un air méfiant.
- Je n’ en suis pas sûre, mais je crois qu’ on a dérivé vers le sud, et donc …
- Et donc, plutôt du côté d’ Esthar, conclut Etan en se passant la main sur le visage.



***

Et voilà, il en a mis du temps, à arriver, ce chapitre-là ! ^^ Toutes mes excuses, j’ espère que personne ne pensait que je l’ abandonnais. C’ est juste ça me prend beauuuuucoup de temps de mettre tout ça en place ( et puis les chapitres sont tout de même assez long )

Y’ a plein de petites choses qui ne me plaisent pas dans ce chapitre. J’ ai même failli zapper ce chapitre en expliquant rapidement comment ils ont réussit à décoller parce que je trouvais que ça faisait beaucoup de blabla pour pas grand chose, mais j’ ai finalement décidé de le garder comme ça, en incluant des éléments qui permettent de mieux voir comment sont les personnages. J’ ai eu du mal, tout de même ! Après l’ avoir lu, relu et réécrit des dizaines de fois, c’ est encore ce qui me plait le mieux. Je crois qu’ en fait, ce qui aurait le mieux rendu tout ce que je voulais, c’ est un film (pour les sons, ou même le silence, le visage des personnage ), mais bon, faudra faire avec.

Il n’ y a pas vraiment de surprise, ici ; je me doute bien que tout le monde savait qu’ ils finiraient par décoller. Je savais pas comment rendre ça crédible, vu que j’ avais dit que Eva ne savait pas piloter ( ça m’ apprendra ! ) ; donc , je sais pas trop si ça passe bien en fin de compte. Je voulais aussi rendre de façon réaliste ce qu’ elle peut ressentir en conduisant vraiment. Vous me direz si ça va ou non…

Le crash, c’ est sûrement pas une surprise non plus. Je ne me voyais pas les faire atterrir gentiment à Trabia alors qu’ elle ne sait pas piloter.

Avec le vaisseau, de nouvelles difficultés me sont apparues : je n’ y connais absolument rien en mécanique, alors comment décrire le vaisseau ? qu’ est-ce qui est censé ne pas marcher ? qu’ est-ce qu’ il faut utiliser pour faire fonctionner le vaisseau ?? ( Si quelqu’ un a des conseils à me donner pour améliorer ça, ce ne serait pas de refus ). Je ne sais pas si ça se voyait – en tout cas, maintenant que je l’ ai pointé du doigt tout le monde la sait, mais passons …



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Ce n'est pas facile mais il faut être capable d'aimer ses ennemis, ne serait-ce que pour les énerver.
Rae
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   Posté le 19-05-2005 à 22:13:49   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

CHAPITRE 8

Le vaisseau n’ a finalement pas pris feu, nous avons au moins eu cette chance. La dernière chose dont nous ayons encore besoin, c’ est d’ un énorme nuage noir signalant notre présence ici, à quelques kilomètres peut-être d’ Esthar. Nous préférons tout de même ne pas perdre de temps et essayer de mettre le plus de distance entre l’ appareil et nous, des fois que notre crash ait été aperçu.
Comme nous n’ avons pas pu, selon les estimations d’ Etan, dériver assez vers le sud pour nous trouver au sud d’ Esthar, nous décidons de partir vers le nord en longeant la falaise. Évidemment, nous sommes en plein désert, alors il n’ y a pas de route tracée pour nous indiquer un quelconque chemin; par contre, des rochers, du sable à perte de vue. Il n’ y a pas un point d’ eau ni un coin d’ ombre à des kilomètres. Ah, par contre, ce qu’ on trouve, et en profusion, c’ est des monstres, ce qui explique aussi notre empressement à quitter cet endroit. Nos sacs sur le dos, nous avançons avec peine sous la chaleur étouffante. Le choc du crash, le stress, et la fatigue ne rendent pas les choses plus agréables.

-Raconte moi ton dernier voyage ...
-Parce que ça t’ intéresse, maintenant ? fait Etan sans s’ arrêter.
-Non, mais si je pense pas à autre chose qu’ à ma mort prochaine dans ce désert, je crois que je vais devenir dingue.

J’ essuie pour la énième fois la sueur sur mon front en soufflant. S’ il n’ y avait que ça…
Est-ce que ça vaut la peine qu’ on se donne ce mal ? Et s’ ils étaient déjà tous morts ?

-Etan …
-Mmmh ?
-Tu crois qu’ à la BGU… ils…

Je n’ arrive même pas à le dire.

-Oui.
-Tu crois vraiment qu’ ils sont morts ??! Je fais, effrayée.
-Quoi ? Nan, je pensais que tu voulais dire qu‘ ils allaient bien!
-Pourquoi tu réponds sans savoir de quoi je parle, tu m’ as fait une de ces peurs! Comme si tu pouvais avoir la moindre de chance de savoir ce que je peux penser… fais-je, riant presque à l’ idée saugrenue d’ une quelconque « communion d’ esprit » entre cet idiot et moi.
-C’ est quoi cette manie de pas finir ces phrases, aussi… Écoute, fait-il en se tournant face à moi, soudain sérieux. Ils sont vivants, c’ est compris ? Je t’ interdis de penser autre chose. Ils vont bien et on va les retrouver. Sauf si on reste ici à imaginer n’ importe quoi.

Oui, il a sûrement raison, ils sont vivants. Si lui le pense, alors… je pense que je peux m’ autoriser à l’ espérer encore.

Ils me manquent tellement.

Je veux pouvoir encore taquiner Bess avec son béguin pour Ivackas. Je veux voir Casey me sourire et me dire que je suis bête de tout le temps chercher à provoquer Etan. Je veux… entendre Lena rire aux éclats en se jetant sur moi pour me serrer. Et mes parents… Depuis le début, j’ ai été obligée de les mettre tous dans un coin de ma tête pour ne pas devenir folle. Mais c’ est si dur. Alors si au bout du compte, après avoir enduré tout ça, ils n’ étaient pas là…

Nous finissons par atteindre un endroit où la falaise se divise; elle se sépare en deux, et il y a un passage large de trois à quatre mètres entre les deux.

- On fait quoi ? Demande Etan, l’ air sceptique, en observant l’ ouverture. C’ est peut-être un chemin. On va voir où ça mène?
-Encore faudrait-il être certains que ça débouche bien quelque part. D‘ ici, on ne voit même pas s’ il y a réellement quelque chose derrière, le chemin tourne. Et s’ il n’ y avait rien ?
-Écoute, je pense que de toute façon, on n’ atteindra pas de ville avant ce soir. Il n’ y a pas une seule maison à des kilomètres à la ronde, si on observe le paysage; aucun endroit qui permette de faire un campement en sécurité si on continue dans cette direction, avec tous les monstres qui traînent dans le coin. A mon avis, on a pas grand chose à perdre …
-D’ un côté comme de l’ autre, ça paraît plutôt désespéré…

Je scrute son visage, mais il évite mon regard et semble soudain perdu dans la contemplation du paysage.

Ca me tracasse depuis le début: est-ce qu’ on a réellement une chance d’ y arriver? Lui aussi se le demande visiblement, même s’ il fait son possible pour tenir.

-Bon, alors on y va, je soupire en avançant entre les falaises.

Le chemin est pierreux, inégal. Des rochers gênent, il nous faut faire de nombreux petits détours pour dépasser ceux qui nous barrent la route, ce qui ralentit notre avancée en la rallongeant de surplus. Les falaises, qui s’ élèvent de part et d’ autre de notre route n’ ont rien de très rassurant. Elles projettent une grande ombre sur notre chemin, et, bien qu‘ il fasse grand jour, on n’ y voit pas grand chose. Par endroits, on voit que l’ un ou l’ autre des cotés s’ est en partie écroulé. En tout cas, les monstres ne sont pas parvenus jusqu’ ici, alors après tout ce qu’ on a fait avant, c’ est presque un promenade de santé.

Au bout d’ une heure, nous parvenons face à un mur. C’ est bien ce que je pensais. Un cul-de-sac. Des rochers se sont effondrés et barrent totalement la route sur une hauteur d’ une dizaine de mètres. Abattus et épuisés, Etan et moi restons stupidement à observer le mur, comme s’ il y avait la moindre chance pour qu’ il s’ écarte soudain afin de nous laisser passer.

- Il n’ est pas si haut… fait Etan, hésitant, au bout d’ un moment en se tournant vers moi.
- T’ es pas sérieux ?! je m’ exclame, sidérée. Tu ne penses quand même pas qu’ on va grimper ça ??!
- On ne va pas non plus faire demi-tour maintenant. Il n’ y a rien derrière nous.
-Et rien ne dit qu’ il y ait quelque chose devant ! Etan, même si on ne venait pas de marcher depuis des heures et que nous avions le matériel nécessaire, on est pas certains de ce qu’ on va trouver!
-Ecoute, je vois où on est, maintenant. Je me souviens, je crois qu’ il y a un village, juste derrière.

-Tu crois ou tu en es sûr ? Il y a deux minutes tu disais que tu ne savais pas.
- J’ en suis sûr, soupire-t-il. Ca vient de me revenir, c’ est tout. On ferait mieux de se reposer et de reprendre des forces avant d’ y aller.

Il s’ allonge et croise ses bras sous sa tête avant de fermer les yeux.
Etan semble parfois tellement détaché que je me demande si ça ne l’ amuse pas, finalement. C’ est ahurissant. Comment peut-il rester aussi calme dans une situation pareille? Ca me rend dingue, parfois.

Un instant plus tard, nous nous mettons à grimper. J’ ai déjà fait de l’ escalade, j’ aime plutôt ça en général, mais sans équipement c’ est un cauchemar. Heureusement, il n’ s’ agit pas d’ un mur mais d’ un empilement de rochers; les prises ne sont pas trop difficiles à trouver. Quelques siècles plus tard nous arrivons au sommet et je me remets à respirer. Heureusement, nous n’ aurons pas à escalader l’ autre côté pour descendre, la pente n’ est pas très prononcée, en marchant avec prudence ça devrait aller. J’ arrive la première en bas.


J’ aurais dû m’ en douter …

-Etan, il est où ton village?

Je l’ attends, les bras croisés, observant le paysage. Nous ne sommes plus dans le désert, ça c’ est sûr. Il s’ agit d’ une petite vallée verdoyante entourée de hautes montagnes grises, et il y a une forêt juste en face de nous. Mais pas de village.

Etan est juste derrière moi, mais il se tait. J’ ai peur de comprendre.

-Etan ? Fais-je finalement devant son silence. Tu ne te souvenais de rien, n’ est-ce pas ?
-Non, mais tu n’ aurais jamais voulu venir si je …
-C’ est ça, alors c’ est de ma faute si tu m’ as raconté des bobards, elle est pas mal, celle-là. Tu as menti !
-Je n’ aurais pas eu à le faire si tu me faisais un peu confiance et que tu m’ avais écouté quand je te disais qu’ on ne pouvait pas rester là-bas ! S’ énerve-t-il.
-Je suis venue parce que je tu m’ as dit que tu savais ce que tu faisais ! Et moi, comme une idiote, je t’ ai écouté. Ca ne fait que confirmer ce que je pensais, après tout: on ne peut pas se fier à toi! Je ne vois même pas pourquoi ça me surprend…
-Oui, bien sûr: tel père, tel fils, hein ?
-Qu’ est-ce que ça vient faire là, ça ? ce n’ est pas le problème…
-C’ est justement le problème !

Il jette ses sacs sur le sol, furieux.

- De quoi tu parlais, si ce n’ était pas de mon père en disant ça, hein ??! Il va falloir éclaircir certaines choses. Tu te crois sans doute meilleure que moi parce que tu es la fille de Squall, le « héros et sauveur » de la planète? Tu crois que tu as plus de mérite parce que tu es de sa famille que moi qui suis de celle du malade qui a menacé le monde??
-Tu divagues …

Malgré moi, je recule d’ un pas, mais Etan s’ avance.

-Non, pas du tout, dit-il, frémissant de rage. Tout le monde pense la même chose de moi, tu n’ es pas la seule, je te rassure. Tout le monde me regarde comme un pestiféré, partout où je vais; ce qu’ ils voient, ce n’ est pas moi, c’ est toujours le… le fantôme de Seifer. Si je fais quelque chose de bien, on se dit que ça cache quelque chose; si c’ est quelque chose de mal, que c’ est normal et que ça devait arriver! Combien de fois est-ce que j’ ai pu l’ entendre ! Je vais te dire une chose: je ne suis pas responsable si mon père a fait les mauvais choix et qu’ il a pu menacer le monde. Et ça ne veut pas dire que je suis comme lui! Qu’ est-ce que tu crois ? Moi aussi je déteste cet homme pour ce qu’ il a fait, ça n’ aurait jamais dû arriver! Je le sais, tout ça!! Mais qu’ est-ce que je peux y faire? Il est mort, est-ce que ça ne vous suffit pas ?

Il pète complètement les plombs…

-Mais toi, Eva, dit-il en me pointant du doigt, toi, tu es pire que les autres. Toi, tu aurais dû comprendre ! Tu aurais dû être capable de faire la différence, parce que tout les deux on est pareil, que tu l‘ admettes ou non! On a la même histoire et le même but, et si quelqu’ un était à même de comprendre c’ est toi ! Les autres … les autres, ils ne peuvent même pas imaginer ce que ça fait de vivre avec ce poids… Tes parents sont les rares personnes à savoir réellement qui je suis; les seuls à avoir essayé de me connaître moi. On aurait pu espérer un peu plus de bon sens de la part de leur fille. Tu te crois supérieure, mais tu es comme tous ces gens incapables de voir. Alors tes leçons de morales, garde-les pour toi!

Il ramasse son premier sac d’ un geste furieux, le remet sur son dos, se tourne à nouveau vers moi, d’ une voix apparemment calme, mais emplie d’ un mélange de colère contenue et de tristesse:

-Tu sais, s’ il y a une chose pire que de grandir et vivre seul… c’ est de vivre entouré de personnes qui te haïssent sans que tu comprennes pourquoi et qu’ on te laisse la moindre chance d’ y changer quoi que ce soit.

Il prend son second sac et le passe sur son épaule.

-Viens, il faut y aller maintenant, fait-il une d’ une voix neutre en se remettant en marche.

Comme je ne bouge pas, trop ahurie par tout ce que je viens d’ entendre, il s’ arrête à nouveau et se retourne.

-Ca ne m’ amuse pas non plus, mais il faut qu’ on reste ensemble. Ce sera difficile, mais chacun de notre côté on n’ arrivera à rien. Je veux faire quelque chose pour ton père, c’ est faire en sorte que tu rentres chez toi en vie, je ferai mon possible pour ça; je ne le fais pas pour toi. Et ça te passe peut-être totalement au-dessus de la tête, mais moi aussi je tiens à retrouver la BGU. C’ est aussi chez moi.

Je le suis, muette et hébétée. Je n’ avais jamais vu Etan aussi en colère, même quand je cherchais à l’ énerver. Et je ne crois pas m’ être jamais sentie aussi mal. Etan avait-il tort? Est-ce que je suis vraiment comme ça… ?


***


« Tu sais, s’ il y a une chose pire que de grandir et vivre seul… c’ est de vivre entouré de personnes qui te haïssent sans que tu comprennes pourquoi et qu‘ on te laisse la moindre chance d‘ y changer quoi que ce soit... »


Il régnait un désordre inhabituel devant la porte du dortoir des élèves. Les deux enfants, s’ avancèrent jusqu’ au centre du cercle; les « grands » semblaient se disputer, et ce n‘ était pas bon signe. Ils tyrannisaient toujours les plus jeunes, et il ne valait mieux pas être dans le coin lorsque cela se produisait. Mais ces deux enfants ne s‘ en étaient jamais préoccupé. Le garçon, âgé de 5 ou 6 ans, brun, avec un T-short vert et un short bleu, tenait par la main son amie, probablement du même age, brune elle aussi, avec de grands yeux bleus.


-Qu’ est-ce qui se passe ? Demanda le petit garçon en se glissant parmi les autres enfants, tenant la petite fille par la main pour l‘ aider à passer.

Ils arrivèrent au centre de l’ attroupement, où ils virent un petit garçon blond. Il se tenait droit et fier en face des « grands« , mais des larmes perlaient dans ses yeux verts.

-Qu’ est-ce que …

-Laissez-nous, vous deux, ordonna un grand en se tournant vers le petit garçon brun. C’ est pas vos affaires!

La petite fille tomba en arrière, au milieu des rires. Furieuse, elle se releva, et, les poings sur les hanches, elle se dressa face au méchant grand et aux autres qui se tenaient autour de lui et semblaient face à elle former une véritable montagne... Cet idiot était peut-être plus grand et plus âgé qu’ elle, mais elle ferait son possible pour l’ empêcher de faire du mal au petit garçon blond.

Un grand courant d’ air froid entra dans la pièce; les enfants, inquiets, reculaient. Sheba apparut, et une pluie de glace s’ abattit sur les enfants, et pendant un moment, la petite fille les perdit de vue. Lorsque la glace disparut, ils se trouvaient dans la forêt. Surprise, la petite fille eut un mouvement de recul. Des soldats lui faisaient maintenant face, une gunblade à la main, et s‘ approchaient d‘ elle. Elle se tourna vers ses amis pour les appeler au secours. Mais c’ était Seifer, portant les vêtements du petit garçon blond, qui se tenait à présent derrière elle tandis qu’ un immense monstre enflammé s’ élevait dans les airs, emportant le petit garçon brun qui pleurait.


Je me redresse en sursaut, haletante. Il me faut quelques minutes pour me rappeler où je me trouve. Mon cœur bat à la chamade. Ce n’ était qu’ un rêve… Un stupide rêve…

Je vais me rafraîchir à la source à côté de laquelle nous avons planté notre campement. Je mets un moment avant de retrouver mon calme. Ca avait l’ air si réel! Non … pas réel … c’ était comme si … je l’ avais vécu. Mais c’ est impossible, c’ est du délire. Je n’ ai jamais croisé Seifer, ni vu Sheba avant ces dernières semaines. Pourtant, je suis quasiment certaine que c’ était moi, cette petite fille, et le garçon blond, c’ était Etan. Et le troisième ? Casey ? Non, il n’ était pas encore à la BGU à ce moment-là… Ce n’ est qu’ un rêve…

Je retourne au campement. Etan est toujours couché. Je vais m’ asseoir sur une racine pour essayer de manger un morceau, mais j’ ai l’ estomac noué.

Pas un mot n’ a été prononcé depuis hier. Nous sommes entrés dans la forêt; comme la nuit tombait et que nous n’ avions aperçu aucun monstre, nous avons décidé de rester ici. Sans parler. Le visage fermé, Etan a fait un feu, a sorti son sac de couchage et s’ est couché. J’ ai passé la moitié de la nuit à réfléchir à tout ce qu‘ il a dit, à ma façon d‘ agir avec lui. Et… je dois bien reconnaître qu’ à ce sujet, eh bien … il n’ a pas vraiment tort.

Etan se retourne puis s‘ assied, l’ air un peu hagard. Il m’ aperçoit - « b’jour » - et se lève. Il me rejoint de l’ autre côté du feu et s’ assoit pour manger. C’ est le moment de prendre mon courage à deux mains et de mettre de côté ma fierté. Je n’ ai pas arrêté de retourner dans ma tête ce que je pourrais lui dire qui ressemble à des excuses sans trop en avoir l’ air. Je n’ ai pas vraiment d’ expérience dans le domaine.

-Etan euh…
-Qu’ est-ce qu’ il y a ? Tu as envie de parler, maintenant? Fait-il, sardonique. La grande Eva daigne s’ adressa à moi?

Ca va être encore plus difficile que prévu.

-Tu as fait un cauchemar et maintenant tu as peur ?
-Qu’ est-ce que tu racontes ?
-Tu avais le sommeil agité. Ou alors tu vas dire que tu veux faire demi-tour et te taper la montagne à escalader ? C’ est ton problème, moi j…
-Ecoute, j’ essaie de m’ excuser, là ! je m’ énerve.

Il lève des yeux surpris vers moi. Je me mettrais des claques. J’ arrive pas à croire que j’ ai pu être assez bête pour dire ça. Moi, en train de m’ excuser ! Et devant lui ! La première des premières. Il va être insupportable après ça, j’ aurais jamais dû, il va…

-C’ est bon, ça va, dit-il en mordant dans son sandwich.
-Tu me laisse m’ en sortir comme ça? Fais-je étonnée qu’ il n’ insiste pas lourdement dessus.
-On va pas y passer la journée, fait-il d’ un ton las. J’ apprécie que tu te sois excusée , j’ espère juste que tu as compris. Je n’ aurais pas dû m’ énerver comme ça, j’ ai un peu exagéré… ni te raconter des histoires, moi aussi je suis désolé. On a des problèmes plus importants, pour l‘ instant, alors laissons les gamineries de côté. Ca te va ?

Je me vois mal répondre non. Tout de même, je n’ en reviens pas.
Nous levons le campement - si on peut appeler ainsi deux sacs de couchages et un malheureux feu de camp - et nous décampons.
Nous atteignons la lisière quelques minutes plus tard. Etan, qui se trouve devant moi s’ arrête soudain et je lui rentre dedans.

-Qu’ est-ce qui t’ arrive encore ? Tu peux pas faire attention ?!
-Re… regarde, une maison !

Je lève les yeux. En effet, c’ est même tout un village.

- J’ y crois pas, fait Etan. On a passé la nuit dehors à 10 minutes d’ un village!

Nous nous dirigeons dans sa direction en toute hâte. Il nous reste de quoi reprendre quelques provisions, et de quoi aller à l’ hôtel, en prenant une chambre avec deux lits. Après trois nuits passées à la « belle » étoile, c’ est le rêve .
Ce n’ est pas vraiment le genre de petit village touristique, c’ est même assez monotone: murs de briques grises, des rangées de maisons identiques, mais on ne va pas faire les difficiles. Ce n’ est pas très grand. Après avoir fait le tour du village trois fois, impossible de trouver l’ hôtel. Des habitants se mettent à leur fenêtres et nous observent. Je me sens un peu mal à l’ aise, au milieu de la rue.

-C’ est quoi leur problème ? Je murmure tandis que d’ autres personnes sortent carrément de chez elles pour nous voir.
-C’ est peut-être dû au fait que tes vêtements sont pleins de poussière et déchirés par endroits, et que tu es complètement décoiffée.

Après plusieurs jours passés dans la nature, un crash, des combats contre les monstres et des heures de marches, je me doute que nous avons déjà été plus à notre avantage. La veste d’ Etan est déchirée au bras et dans le dos, le bas de son pantalon aussi.


-Tu n’ es pas mieux, je te signale.
-Trouvons vite l’ hôtel; ils commencent à m’ énerver… chuchote-t-il en pressant le pas.

Nous finissons par trouver une boutique; j’ y rentre acheter ce dont nous avons besoin pendant qu’ Etan continue à chercher l’ hôtel ; il me retrouvera ici dans quelques minutes. J’ en profiterai pour demander où nous nous trouvons.

J’ entre dans le magasin. Formidable, il n’ y a personne.

-Hé, je suis là ! Fait une petite voix aiguë derrière le comptoir.

En effet, je n’ avais pas vu la petite fille, dont la tête dépasse à peine le table. Elle grimpe sur un tabouret, croise les bras et me dévisage, la mine renfrognée.

-Tu es venue pour voler ?
-Quoi ?! Non ! je viens acheter des …
-Je suis sûre que t’ as pas d’ argent. T ‘ es bizarre…

Du calme, c’ est qu’ une gamine. Du calme. Souris.

-Je m’ appelle Eva, et toi?
-C’ est pas tes affaires, dit-elle en détachant parfaitement chaque mot.
-Ok… Est-ce que tes parents sont là ?
-Nan.
-Et est-ce qu’ ils rentrent bientôt?
-Nan.
-Est-ce qu’ il y a quelqu’ un à qui je peux m’ adresser pour…
-Nan.

Elle commence à me taper sur les nerfs. Je pose les mains sur le comptoir et me penche vers elle.

-Ecoute, j’ ai passé une nuit épouvantable, et je ne suis vraiment pas de bonne humeur. Alors si ne tu vas pas appeler quelqu’ un tout de suite, je…

La porte s’ ouvre derrière moi, je me retourne. C’ est Etan qui entre. Il me fait les gros yeux.

-Bon sang, je te laisse cinq minutes, et je te retrouve en train de te disputer avec une gamine ; t’ es pas possible, toi.
- Je suis PAAAS une gamine ! Hurle la petite d’ une voix suraiguë en se dressant sur le tabouret pour se trouver à notre hauteur à Etan et à moi. J’ ai SIX ans, TROIS mois et DIX SEPT jours ! Et je suis TRES mûre pour mon age!
-Veuillez accepter toutes mes excuses, mademoiselle, fait-il en s’ inclinant, gentiment ironique.
-Te moque pas de moi !! Toi, t’ es peut-être grand, mais t’ es bête, et t’ es pas beau, et t’ es mal habillé, et t’ es bizarre. Je suis sûre que vous êtes des voleurs tous les deux !
-Nous ne sommes pas des voleurs, faut te le dire combien de fois, je m’ énerve.
-Ecoute, nous ne sommes pas des voleurs, c’ est juste qu’ on a beaucoup voyagé et… tente de lui faire comprendre Etan.

-Vous êtes des vagabooonds ! Hurle-t-elle comme si nous essayons de l’ assassiner.

Elle va rameuter tout le village, ma parole.

-On ferait mieux d‘ y aller, ils ont vraiment un problème, dans ce village !
-On a PAAAAS de problème ! Pleure-t-elle tandis qu’ Etan tente de la calmer.
-Juste toi, c’ est ça?
-Dis pas çaaaaa !!
-Tu as vraiment besoin d’ en rajouter? me fait Etan. T’ as pas cinq ans, merde !
-T’ as pas le droit de dire des gros mooooots !! hurle la petite de plus belle.
-Tu vas me lacher deux minutes, toi aussi ! S’ énerve Etan.

C’ est au milieu d’ un charivari indescriptible que la porte derrière le comptoir s’ ouvre. La dispute tombe aussitôt. Nous restons chacun comme pétrifiés. C’ est un homme. Il ne doit pas être beaucoup plus vieux que nous. Et il est incroyablement beau. Plutôt grand, des yeux noisette, des cheveux bruns coupés courts...

-Lise, qu’ est-ce qui se passe, ici ? Ne me dis pas que tu fais encore des tiennes…
-Mais nan, c’ est eux qui…
-Merci de m’ avoir remplacé, Lise. Tu devrais rentrer, maintenant.

Il passe la main sur la tête de la petite pour lui ébouriffer les cheveux, tandis qu’ elle descend du tabouret et s’ en va en chantonnant. C’ est dingue.
Il se tourne vers nous en souriant. Et en plus il a un sourire magnifique …

-J‘ espère qu‘ elle ne vous a pas ennuyé ? Je devais juste m’ absenter cinq minutes…
-Non, un vrai petit ange, je fais malgré moi en me mettant à sourire comme une idiote, tandis qu‘ Etan me jette un regard ahuri, un sourcil levé.
-Je m’ appelle Zack, fait-il en se postant derrière les comptoir, les deux mains sur la table. Que puis-je pour vous ?

***

Fini ! Fiouuu… Il a mis du temps à arriver, celui là , hein ? Toutes mes excuses, mais bon , la vie étant ce qu’ elle est, avec tous les aléas qu’ elle connaît et que nous devons subir, même si bien sûr nous sommes maîtres de notre destin et pouvons décider de la laisser faire, ou d’ agir pour montrer que nous sommes des êtres libres, grâce à notre pensée, à notre faculté de raisonner et… euh …

Bon, pour faire court et simple, c’ est les partiels, quoi. Alors voilà pour l’ instant. Le résultat est pas terrible ( ça arrive de plus en plus souvent, ça m‘ énerve ). Ca valait le coup d’ attendre autant, hein ? *rolles eyes* Désolée. T_T

Déjà, le passage de la dispute… Ca fait pas un peu trop mélo-dramatique ? Vu que c’ est pas vraiment le ton du reste du fic, je me demande si ça fait pas un peu « trop »… trop décalé par rapport au reste. Eva commence à réfléchir, à comprendre qu’ elle était peut-être un peu injuste et à entrevoir ce qu‘ a pu être la vie d‘ Etan. Pas trop tôt, hein ? On m’ avait fait une remarque, sur un site, qu’ elle n’ évoluait pas assez vite… Mais bon, on peu difficilement changer d’ avis sur une personne qu’ on a passé sa vie à détester passionnément. ^^

Bon, tout le reste autour de ça, dans le chapitre, c’ est un peu du remplissage, en fin de compte. Je me demande un peu si je n’ aurais pas mieux fait de zapper tout ça, arriver directement dans le vif du sujet, et faire avancer l’ histoire ? Bah, je verrai plus tard, quand j’ aurai un peu plus de recul.

Comme je l’ avais dit, j’ avais aussi du mal, parce que d’ habitude, quand je commence un chapitre, la première chose que je sais, c’ est où il doit finir exactement. Ici je savais où ça devait mener en gros, mais j’ hésitais sur la manière de le terminer et je me demandais s‘ il ne fallait pas carrément finir cette scène. Bref, finalement, c’ est pas super, mais il fallait bien finir, alors voilà.

La suite est déjà commencée, donc. Ca ira plus vite, je pense, vu que je suis en vacances, et que j’ ai maintenant mon ordinateur portable chéri que j’ aime et que j’ adore et sur lequel je peux passer plus de temps que sur mon PC sans m’ attirer les foudres de mes parents (aux yeux rivés sur l‘ horloge pour vérifier que je ne reste pas trop longtemps), les regards inquisiteurs de mes crétins de frères, et les hurlements atroces de mon adorable et angélique petite sœur réclamant son Jeu « Pingu ». Oui, ma petite sœur que j’ aime et que j’ adore aussi m’ a beaucoup inspiré à la fois pour le personnage de la petite sœur d’ Eva, Lena, et pour cette petite peste de Lise ( prénom d’ une autre peste que je connais soit-dit en passant; autant s‘ inspirer de la réalité… enfin bref). Le passage de la dispute entre elle et Eva, puis Etan n’ est pas vraiment essentielle; elle est même plutôt stupide et puérile, non ? Je me suis demandé s’ il fallait la garder. Et après mûre réflexion… Ben je me le demande toujours. Help !

Le comportement d’ Eva à la fin du chapitre a dû surprendre ? Je sais pas, ça m’ a pris comme ça… Bizarre , hein ? Lol Dites ce que vous en avez pensé .


J’ ai vu sur mon ordinateur, que les 7 premiers chapitres faisaient 84 pages O_O ! Bon, ok, c’ est comme pour les devoirs : écrit gros en en sautant des lignes, mais je ne m’ étais rendue compte que c‘ était long comme ça, à vrai dire.

Bon. Je vais essayer de ne pas faire un commentaire aussi long que le chapitre, quand même. ^^

Merci d’ avoir lu, n’ hésitez pas à me laisser vos critiques, que vous ayez apprécié ou non - quoique je suppose qu’ il faudrait être sacrément maso pour lire jusqu’ au bout un fic de cette longueur qu’ on a pas aimé - j’ en ai bien besoin!

Biz biz à tous !



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Ce n'est pas facile mais il faut être capable d'aimer ses ennemis, ne serait-ce que pour les énerver.
Rae
Rae
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   Posté le 26-06-2005 à 13:16:03   Voir le profil de Rae (Offline)   Répondre à ce message   Envoyer un message privé à Rae   

CHAPITRE 9

La dernière fois que je me suis sentie comme ça, pour aussi loin que je puisse remonter, ça a été le jour de mon treizième anniversaire. Dimitri je-sais-plus-quoi, un garçon pour lequel je me morfondais d' amour depuis des semaines, m' avait offert des fleurs lors de ma fête - juste avant de me présenter sa petite amie, qu‘ il avait amenée avec lui. Le pauvre garçon n' a sans doute jamais compris pourquoi je lui ai balancé son bouquet à la figure et pourquoi je ne lui ai plus jamais adressé la parole.
Je crois que c' est ce jour-là que j' ai décidé que de toutes façons, l' amour c' était nul et que je m‘ en passerais très bien.
C' est pour ça que j' ai du mal à croire qu' il ne va pas encore m' arriver une tuile.

Derrière le comptoir, les deux mains posées sur la table, Zack nous regarde tour à tour, tout sourire. Il va forcément arriver une tuile.

-Bienvenue à Tréhignac, que puis-je pour vous?

Tréhignac ? Jamais entendu parler. Etan non plus, à voir sa tête. Bon, maintenant, nous savons où nous sommes, mais je ne crois pas que nous soyons tellement plus avancés, en fin de compte.

- Moi c' est Etan, et voilà Eva, dit Etan en faisant un signe dans ma direction. Voilà, nous voyageons depuis un moment, et nous aurions besoin de contacter des amis au plus vite, histoire de les rassurer. Est-ce qu' il y aurait un endroit d' où nous pourrions téléphoner?
- Je suis navré. Le réseau ne couvre que la vallée, c' est à dire les trois villages qui s‘ y trouvent. Les montagnes empêchent toute liaison avec l' extérieur. Le seul moyen de faire passer des nouvelles est le courrier. Vous pouvez toujours nous laisser une lettre et nous la ferons envoyer. Le service aura justement lieu demain soir.

Ca va être pratique, tiens.

-Pas de fax, d' ordinateur avec connexion internet… ?
-Il n' y en a pas ici; le village est trop isolé. Nous sommes dans une toute petite vallée, elle n' est pas desservie par ce genre de réseau de communication.

C‘ est bien notre chance. Mais c' est quoi ce village? Etan souffle et se gratte la tête.

-Très bien, bon… Est-ce que vous pourriez nous indiquer où se trouve l‘ hôtel? Nous avons cherché, mais…
-Euh… Il n' y en a pas non plus, désolé. Nous ne recevons pas beaucoup de touristes. C' est même très rare, en fait. Nous sommes un village très isolé - vous avez dû vous en apercevoir- ce qui fait que très peu de personnes passent par ici.

Je comprends mieux pourquoi tout le monde nous regardait comme des bêtes curieuses. Ca va être difficile de passer inaperçu.

- Et en général, ces personnes finissent par s' installer, termine Zack. Alors, un hôtel était inutile. Est-ce que c' est votre cas?
- Non, nous sommes juste de passage.
- Ah. Un voyage en amoureux, je suppose ? Demande-t-il en me faisant un grand sourire.

Je manque de m' étrangler.

- Non, pas vraiment, rit Etan en me jetant un regard amusé.

S' il n' efface pas tout de suite ce sourire, je lui arrache la tête.

- Oh, je suis navré, s' exclame Zack, désolé. Je ne voulais pas vous embarrasser.
- Elle s' en remettra.
- La ferme.
- Pour l' hôtel, je suis désolé. Mais je peux toujours vous héberger, si ça peut vous arranger. La maison est assez grande, on vous trouvera bien une place.
- Ce serait vraiment aimable. Eva, tu es d' accord ?
- Non, je meurs d' envie de passer une autre nuit sur le sol dans la forêt humide d' à côté, je soupire en levant les yeux au ciel.
- Alors nous acceptons. Merci beaucoup.
- J' appelle chez moi pour prévenir et je vous mène là-bas.

Il sort de la boutique. La voilà, la tuile. Il doit vivre avec sa petite amie ou sa femme et il l' appelle pour la prévenir.

- Il nous a pris pour un couple, tu te rends compte? Fait Etan, me tirant de mes pensées.
- Ca ne me fait pas rire.
- Et puis, à part ça, pourquoi deux personnes voyageraient-elles ainsi? Ca me fait penser… dit-il en baissant la voix. Nous ne devons pas dire pourquoi nous sommes là, ni qui nous sommes. S' il demande, on est frère et sœur, ok? Vu nos relations, ce sera crédible…

Je n' ai pas le temps de répondre, Zack revient.

- Il n' y a personne pour l' instant. Tant pis, est-ce que vous voulez que je vous mène là-bas tout de suite?
- Merci, nous voudrions au moins déposer nos affaires.
- Bon, alors je vais vous y conduire.

Nous sortons de la boutique, que Zack ferme à clé. Immédiatement, des têtes fleurissent aux fenêtres. Zack ne semble même pas les remarquer et, enthousiaste, nous pose des questions sur notre voyage et sur nous. En fait, surtout à moi: nous marchons au milieu de la petite rue pavée, je me trouve entre Etan et lui, alors il s‘ adresse directement à moi et semble ignorer royalement Etan. J' aimerais pouvoir en faire autant.

- C' est marrant, me dit Zack, mais j' ai l' impression de vous avoir déjà vue quelque part.

Il y a en effet peu de chance que ce soit le cas, vu que je n' ai jamais mis les pieds dans ce trou et qu' il n' en est probablement jamais sorti. Je hausse les épaules, ne sachant trop quoi répondre.

Tandis que nous marchons, j' ai le temps de mieux l' observer. Il est un peu plus grand qu' Etan. Il parle en faisant de grands gestes avec ses mains, rit à quasiment chaque phrase, et son timbre de voix est profond, très agréable.

- Eh ben, il perd pas de temps, celui-là, chuchote Etan en levant les yeux au ciel.

Ignore-le, ignore le… Je me retourne vers Zack. Heureusement, il n' a pas entendu l‘ autre crétin.

- Vous n' êtes jamais venue ici?
- Non, je ne connaissais même pas cet endroit.
- Bizarre. Pourtant, en voyant, j' ai un étrange sentiment de familiarité. Comme si j' avais déjà vécu quelque chose de semblable…
-Euh...

A vrai dire, j' ai une impression étrange, c‘ est vrai… Mais je ne saurais pas dire si c' est ça ou non, et ça me provoque plutôt une sorte de… de malaise.

- Alors j' ai dû rêver, finit-il en riant.
- Comme c' est mignon, il a rêvé de toi. La prédestination, c' est ça ? Tu veux que je vous laisse seuls, peut-être ? Chuchote Etan, sardonique.
- Oui, c' est ça, je fais, impatientée, en le poussant d' un bras.

J' essaie de suivre la conversation de Zack qui n' entend heureusement pas le flot de délires de cet abruti, mais je n' arrive pas à entendre le moindre mot.

- Certainement pas. Je plaisantais, pas question que je te laisse pas avec ce type. C' est peut-être un assassin ou un violeur.
- T‘ as pas fini, un peu ?! Fais-je en tentant de mon mieux de me maîtriser pour chuchoter.
- Je rigole pas; en plus, à vivre dans cet endroit, il a probablement jamais croisé de fille de sa vie, ce pauvre garçon…
- Parce que tu crois qu' il faudrait que je sois la seule qu' il ait vu pour qu' il puisse s' intéresser à moi, c' est ça ?
- C' est toi qui…
- Quelque chose ne va pas ? Demande Zack qui s‘ est arrêté. On est arrivés.

Il s' avance vers une maison, ouvre la porte et nous fait entrer. Ce n‘ est pas vraiment grand, mais très agréable et accueillant, ce qui détonne avec l‘ extérieur de la maison, et même de celui de tout le village, où tout est gris et terne. Il nous indique une chambre d' amis à l' étage, où nous montons déposer nos bagages, tandis qu' il va préparer à manger.

La chambre est plutôt petite. Deux lits sont alignés contre le mur et sont séparés par une petite table de nuit en bois. La fenêtre donne sur la forêt et la montagne. En ressortant, je tombe sur quelqu' un.

Lise.

-Qu' est-ce que tu fais là, toi ?

C' est exactement ce que je me demandais à son sujet. Est-ce qu' elle n' était pas censée rentrer chez elle? Zack arrive à ce moment.

-Oh, j' avais oublié de vous dire, je crois… Lise est ma sœur. Lise: Eva et Etan vont rester quelque temps chez nous. Vous pouvez descendre, le déjeuner est prêt.

Puis il ouvre une porte et sort du couloir. Je m' étais trompée, on dirait. La voilà, la tuile.
Je contemple avec horreur le petit visage renfrogné qui me fusille du regard, les bras croisés. Dire que je l' avais complètement oublié, cette petite peste…
J' apprends au cours du repas qu' ici c' est chez leurs parents. En fait, Zack a le même âge qu' Etan et moi et il vit encore ici. Quand son père part dans le village voisin comme aujourd‘ hui, c' est lui qui garde la boutique, et il aide sa mère, qui ne devrait pas tarder à rentrer par ailleurs.
J' arriverais sans doute à me détendre sans les regards hostiles de Lise. Face à moi, elle mange sans me lâcher des yeux comme si elle redoutait que je ne m' enfuie en courant avec une assiette, si bien que sans s‘ en rendre compte elle fait dégouliner la sauce sur sa robe. Et Zack non plus ne me quitte pas des yeux et parle avec animation de tout et n' importe quoi. Et dieu sait pourquoi, je me sens de plus en plus mal à l‘ aise. Y‘ a quelque chose qui cloche... Je me sentais pas du tout comme ça quand je l' ai vu au début. Pas qu' il soit désagréable, pourtant, au contraire. A moins que ce ne soit le cadre, ce village inconnu perdu au milieu de nulle part. Ou les réflexions stupides qu' Etan me fait à mi-voix, à propos de Zack et moi, décrivant notre futur mariage, nos enfants et je ne sais quoi encore. Zack finit par me demander si je ne suis pas malade, parce que je suis toute rouge. Je me jure d' étrangler Etan dès que nous serons seuls.
L' après-midi, Etan va à la boutique avec Zack acheter les provisions pour le voyage. Il est prévu que nous repartions dès le lendemain matin, à la première heure, alors il prend tout de suite ce dont nous aurons besoin, et en même temps, il va se renseigner sur la route.
Lise fait la sieste, Etan et Zack sont partis, les parents sont toujours absents. Je vais profiter du calme pour prendre un bon bain chaud; un quart d' heure plus tard je sors, avec des vêtements propres, et les anciens roulés en boule sous mon bras et qui sont bons pour la poubelle.
Et dans le couloir, je tombe sur Lise, encore une fois. Qu 'est-ce qu' elle me veut, encore? Elle est là, debout, ses bras toujours croisés.

-T' étais pas censée faire la sieste, toi ? Je soupire.
-C' est pas tes affaires.

Voilà qui a le mérite d' être clair. N' empêche que venant de la bouche d' une gamine de six ans, ça a de quoi agacer. Inutile de s' énerver encore. Je la contourne et tente d' ouvrir la première porte. C' est fermé.

- C' est le bureau à Papa, t' as pas le droit d' entrer. De toute façon, c' est fermé à clé, ajoute-t-elle, sans doute pour m' indiquer qu' il n' est pas nécessaire de se fatiguer à chercher quoi que ce soit de ce côté-là.

Elle n' est pas énervée, mais peu s'en faudrait; je sens que je vais encore avoir droit à une crise de nerf. Du calme. Elle n' a que six ans. C' est une petite fille, hein, et moi, je suis adulte. Je respire à fond, et je fais demi-tour.
La porte s' ouvre en bas, Zack et Etan sont rentrés. Je m' empresse d' aller les rejoindre, soulagée pour une fois de voir Etan.

-On a ce qu' il faut, dit-il en montrant les sachets.

Je l' aide à porter les affaires dans la chambre pour tout ranger dans nos sacs. Il a l' air pensif.

- Ca va pas être évident, chuchote-t-il. Je n' ai pas pu obtenir de carte, ni aucune indication, alors je ne sais pas du tout par où on va devoir partir.
- Et Zack, tu lui as demandé ?
- Évidemment. Mais à part pour aller village voisin, il n' est jamais sorti d' ici. Il ne connaît personne qui ait réussi à franchir les montagnes non plus; la seule sortie dont il ait entendu parler, c' est l' endroit par lequel on est arrivés, mais évidemment, ça ne mène qu' au désert alors ça ne l‘ a jamais intéressé, et ça ne nous avance pas.
- Tu ne vas pas me faire croire que personne n' a jamais voulu et réussi à sortir d' ici ?
- A l' écouter, non. C' est incroyable, il ne semble même pas savoir où le village se situe exactement par rapport au continent, et j' ai parlé à d' autres personnes: les rares qui ont bien voulu m' adresser la parole ont été incapables de me répondre.

Je soupire.

- Peu importe comment, on a intérêt à partir d' ici au plus vite, je me sens vraiment pas à l' aise.
- Même avec Zack ? Demande-t-il, un sourire en coin et un sourcil levé.
- Surtout avec Zack, en fait. Je suis sérieuse, pas la peine de rire. Y' a vraiment une ambiance bizarre, ici, mais quand je le vois, y' a quelque chose d' encore plus étrange. Je sais pas ce que c' est… Je ne saurais même pas dire si c' est quelque chose de bien ou de mauvais...

Je me rends soudain compte que j' ai pensé tout haut. Qu' est-ce qu' il m' a pris de lui dire ça …
Pourtant, il semble le prendre assez sérieusement.

-Tu sais, après tout ce serait pas étonnant si…

La porte s' ouvre soudain derrière et il s‘ interrompt. C' est Lise, quasiment suspendue à la poignée trop haute pour elle.

-Zack dit que vous devez descendre, dit-elle de sa petite voix aiguë. Y' a ma Maman qui est arrivée.

Nous la suivons dans l‘ entrée. Zack est au téléphone.

- Non, là, c‘ est vraiment pas le bon moment...
-…
-Y' a vraiment pas d' autre moyen ?
-…
-Très bien, j' arrive, soupire-t-il en raccrochant.

Nous sommes restés sur le pas de la porte pour ne pas le déranger. Il nous aperçoit quand il se retourne.

- Ah, vous êtes là ! Je vais devoir m' absenter pour un moment, je ne peux vraiment pas faire autrement. Un ami de mon père a besoin d‘ aide pour remorquer un chargement jusqu‘ au village voisin, et je dois y aller tout de suite. Ca va prendre un moment, mais de toute façon, même si je ne vous revois pas d' ici ce soir, je serai là demain matin pour vous dire au revoir. Ma mère est dans la salon, vous devriez aller la voir. Si vous avez besoin de quoi que ce soit, demandez lui, n' hésitez pas. Lise, mène les, s' il te plait, et préviens Maman que je dois y aller. A demain!

Et il sort avec précipitation. Nous allons dans le salon, où se trouve une femme assez grande et forte. Ses cheveux roux sont relevés en un épais chignon. Elle range des livres sur l' étagère et elle se tourne vers nous en souriant lorsque nous arrivons.

- Bienvenue, nous dit elle en nous serrant la main avec chaleur. Zack m' a dit que vous étiez de passage ici? Je dois dire que ce n' est pas souvent que nous recevons des visiteurs, nous sommes ravis de vous avoir.
-Merci à vous d' accepter de nous héberger, madame.
-Oooh, non, voyons, rit-elle, appelez moi Maureen, enfin!
-Merci, Maureen. Moi, c' est Etan, et voici Eva, ma s…

En voyant Maureen écarquiller les yeux, il s' interrompt.

- C' est… Non, ce… ce n' est pas possible, bégaie-t-elle.

Elle pose sa main sur sa joue et me fixe étrangement.

-Et pourtant… ces yeux… Eva… Leonheart ?

Là, je frise la crise d‘ apoplexie. Comment connaît-elle mon nom ?

-Etan Almasy ? Oui, c' est bien vous les enfants, n' est-ce pas ?

Elle sourit soudain, l' air radieux, et nous prend dans ses bras.

-Oh, vous n' avez pas changé, mes petits ! Dire que vous êtes là, je n' en reviens pas ! Je suis tellement heureuse de vous voir, cela faisait si longtemps! Mais asseyez vous donc, vous venez de loin.

Tant pis pour la couverture.

-Comment savez vous qui nous sommes? demande Etan.
-Mais enfin, vous ne vous souvenez pas de moi ? Bon, ça n' a rien de très étonnant, après tout, vous étiez tous petits lorsque je suis partie de la BGU.
-La BGU ??
-Mais oui, nous dit-elle, comme si cela semblait tout naturel. Je travaillais avec votre mère, moi aussi j' étais gouvernante là-bas. C' est moi qui me suis occupée de vous lorsque vous étiez tous petits. Enfin, Etan, moins, parce que toi tu es arrivé peu de temps avant que je ne parte de la BGU, mais je me souviens très bien de toi aussi. Vous étiez tout le temps fourrés ensemble, tous les deux avec mon Zack.
-Ensemble ? Vous devez vous tromper, je fais étourdiment, comme s' il y avait pu avoir beaucoup d' autres Etan Almasy et Eva Leonheart à l' époque.

En face de nous, Maureen nous sourit.

- C' est pas possible, j' explique en haussant les épaules pour souligner l‘ évidence. J' ai jamais pu supporter Etan.
-Je confirme.
-Et pourtant, vous étiez inséparables tous les trois. Et vous nous en faisiez vraiment voir de toutes les couleurs.

Elle rit et se lève. Elle se dirige vers un meuble dont elle sort un album. Elle le pose devant Etan et moi, et l‘ ouvre.
A l' intérieur, des dizaines de photos. De la BGU, de Maureen des professeurs, avec Maman, ou avec des tas d' enfants. J' arrive à en reconnaître certains. Là, c' est Greg, et avec les longues tresses, c' est Umi. Et à côté, c' est Meryl, je reconnaîtrais sa tête entre mille. Et moi, je suis là, dans le coin, avec mes cheveux dans les yeux et des écorchures pleins les bras.
Incroyable.

- Pourquoi êtes-vous partis ? Demande Etan en tournant les pages.

Maureen soupire.

- Harl -c' est mon époux- a dû venir travailler ici. Alors je l' ai suivi. Zack était tout petit, il n' a dû en garder aucun souvenir, il ne vous a pas reconnus.
- Quand était-ce? demande Etan en tournant les pages de l' album.
- Il y a presque onze ans. Zack devait avoir six ans. Tenez, une photo de vous trois.

Je me penche, en même temps qu' Etan, et j‘ ai soudain l‘ impression d‘ avoir avalé un bloc de glace. C' est bien moi, là, et à côté, c' est Etan, ça ne fait pas de doute. De l' autre côté, ce garçon … c' est celui que j' ai vu dans mon rêve ! C‘ est Zack. Dessus, nous nous tenons la main en souriant. Etan et moi sommes abasourdis, mais Maureen, elle, se plonge dans ses souvenirs avec un plaisir non dissimulé, et nous montre de temps en temps une photo d' un autre professeur, d' un élève.
Elle sort encore plusieurs albums de photos, dont elle tourne les pages avec émotion, nous racontant la vie à la BGU à l‘ époque, ou les bêtises que nous faisons tous les trois - et visiblement nous n‘ en loupions pas une.
Je prends un album pour le feuilleter et je vais m‘ asseoir sur le côté. Je tombe sur une photo de ma mère. Elle a un gros ventre rond et se tient en souriant auprès de mon père.

- Elle était enceinte de huit mois, me glisse Maureen en passant derrière moi. Moi, j' avais accouché depuis un mois déjà. Zack et toi avez été dans le même berceau, en fait.

Une boule se forme dans ma gorge. J' ai beau essayer de ne pas penser à ce qui se passe maintenant, c' est difficile.
En tournant les pages, je trouve d' autres photos d' Etan, Zack et moi. Tous les trois déguisés, ou en train de jouer devant la BGU, à la plage… En voyant ça, je ne peux que me rendre à l' évidence: Maureen disait la vérité, nous devions bien être amis à cette époque, quoique je me demande comment je peux ne pas me souvenir d' une chose pareille. Je lève les yeux presque malgré moi et je croise le regard d' Etan. Je détourne immédiatement le mien.
Qu' est-ce qui s' est passé depuis ? D' accord, l' utilisation des G-Force a un impact sur la mémoire - et je dois être d' autant plus touchée que j' ai Sheba depuis ma naissance- mais tout de même…

-Ca ne va pas? demande Maureen en venant s' asseoir près de moi.
-Oh si, si. C' est juste que ça me fait bizarre de voir ces photos.
-C' était une si belle époque. J' ai eu beaucoup de mal à partir, mais enfin… Je ne pouvais pas laisser mon mari.

Elle sourit, mais la tristesse dans sa voix est palpable. A voir les photos, elle et Maman devaient être très amies. Pourquoi est-ce que je n' ai jamais entendu parler d' elle et Zack ? Pendant un moment, j' hésite à lui raconter ce qui se passe. L' attaque de la BGU, l' implication d' Esthar, tout ça…
La porte s' ouvre soudain, et un homme entre. Il est grand, plutôt costaud, et de longs cheveux poivre et sel lui tombent sur les épaules. Il stoppe net en nous apercevant, et Maureen se lève vers lui. Avec un grand cri de joie, Lise, que nous avions complètement oubliée, bondit à son cou.

-Oh, Harl, tu n' en reviendras pas! Devine qui nous avons ici.

Il nous salue d' un geste de la tête en souriant, mais fait signe à sa femme qu' il n' en a aucune idée, il ne nous reconnaît pas.

- Mais enfin, c' est Eva et Etan!
-Qui ?
-Eva! Enfin, Harl! Le gronde-t-elle gentiment. La fille de Squall et Linoa, et Etan Almasy! Ce n' est pas incroyable?

C' est aussi ce que semble penser Karl qui nous reconnaît enfin. Mais je ne suis pas sûr qu' il l' entende dans le même sens, ou alors il le cache bien.

- Elle ressemble toujours autant à son père tu ne trouves pas ? S' extasie Maureen en joignant les mains.

Je suppose que dans sa tête il s' agit d' un compliment.

-Ca alors, souffle-t-il en tirant une chaise pour s' asseoir. Mais vous venez d' où ? Et comment êtes-vous arrivés ici ?

En tout cas, c' est pas la joie qui le submerge. Ces deux questions suffisent à me hérisser. Je ne saurais pas trop dire pourquoi, en fait.
Enfin, est-ce que c' est vraiment ce qu' on se dit en voyant des personnes qu' on avait pas vues depuis des années ?

-Euh … c' est une longue histoire…
-On s' est perdus, je fais, pour donner la version courte.

Harl attend visiblement que j' en dise plus, mais je ne suis pas certaine d' être autorisée à dire ce qui se passe en ce moment à la BGU - et je n‘ ai aucune envie de lui en parler à vrai dire. Quelque chose dans mon ton a dû passer, parce que Etan me regarde bizarrement, mais il n' ajoute rien non plus.

Il y a des gens avec lesquels on se sent parfaitement à l' aise dès la première rencontre. Comme avec Maureen ou Zack. On a comme l' impression de les avoir toujours connus - c' est ici le cas, mais passons. En revanche, il y en a d' autres qui vous deviennent immédiatement antipathiques, avant même qu' elles aient ouvert la bouche, même si vous ne savez pas pourquoi. Et c' est le cas avec Harl. Au final, ça peut se révéler être une fausse impression, mais pour l' instant, il ne m' inspire aucune confiance.

-Et ils resteront cette nuit avec nous, fait Maureen, toujours rayonnante.
-Mais nous repartirons demain à la première heure, ne vous inquiétez pas, dit Etan.
-Oh, ça n' a rien de pressé, voyons, restez autant que vous le voulez, dit-il essayant de se reprendre. Après tout, vous êtes un peu de la famille, nous vous avons vus tous petits. C' est bien que vous soyez là. Et tes parents Eva, comment vont … ?
-Ils vont bien, merci, je réponds en essayant d' avoir l' air détendue.
- Ah… Bon…
- En fait, nous voudrions les joindre, mais nous n' avons trouvé aucun téléphone. Est-ce qu' il n' y aurait pas un autre moyen de contacter l' extérieur ?

Là, Etan me fait les gros yeux. Mais oui, je sais bien que Zack a dit que non. Mais c' est sa réponse à lui que je veux.

- Non, malheureusement, ici nous sommes complètement coupés de l' extérieur. Mais vous pouvez toujours envoyer une lettre si vous voulez, nous la transmettrons dès demain.
- Merci, je réponds sachant pertinemment que nous n‘ en ferons rien.

J' ai plus de chance d' arriver à destination avant la lettre, alors…

- Bon… Euh, Je vais aller travailler dans mon bureau, Maureen, dit Harl en se levant. J' ai beaucoup à faire. Et vous deux, eh bien, faites comme chez vous surtout.
-Merci, répondons nous avec ce qu' il faut d' enthousiasme.

Il nous fait un signe de la tête et se rend à l' étage. Lise s' éclipse et va jouer dans le jardin alors que sa mère lui avait demander d' aller ranger sa chambre et Maureen range les albums que nous avons fini de feuilleter.

- Faut que je te parle, me souffle Etan, en me prenant par le bras pour me mener dans la chambre.

Il vérifie qu' aucune oreille curieuse ne traîne, et il ferme la porte.
Moi, je me laisse tomber sur une chaise en soupirant et je me prends la tête dans les mains. Je suis complètement paumée, là. Au sens propre comme au sens figuré, d' ailleurs. La BGU, Maureen, Zack... Ces photos.

-Qu' est-ce qu' on fait ? On leur dit ce qui se passe, tu crois ? Me demande-t-il.
-Tu me demandes mon avis, maintenant? c' est nouveau, ça.
-Ouais, répond-t-il comme s' il n' avais pas compris l' ironie, mais là, je vois vraiment pas quoi faire. Je ne suis pas sûr qu' ils faille les mêler à ça. Mais d' un autre côté, ils ont déjà travaillé et vécu à la BGU…
-Je n' ai pas confiance en eux.
-C' est ce que j' ai vu. Mais ils connaissent tes parents...
-Et moi je n' ai jamais entendu parler d' eux. S' ils étaient amis, je l' aurai su.
-Tu crois qu' ils auraient pu trafiquer les photos et nous mentir sur notre soi-disant amitié avec Zack ?
- Non, je ne pense pas.
- De nos jours, il a de très bons moyens de…
-Je t' ai dit non.

Il me jette un regard interrogateur devant mon ton catégorique. Des bribes de mon rêve me reviennent à l' esprit. Il va me prendre pour une dingue, c' est sûr… Je me lance quand même:

-Tu te souviens, dans la forêt, ce matin… Tu disais que j' avais l' air d' avoir fait un cauchemar.
- Où est-ce que tu veux en venir ?
-Eh bien, c' était presque ça. J‘ ai rêvé de Zack, quand on était petits et… je sais pas comment dire ça, mais ça ressemblait plus à un souvenir, en fait...
-Un cauchemar, avec Zack ?

Le ton est ironique, évidemment.

-Tu étais dedans c' est pour ça, je lui réponds sèchement. Est-ce que je peux continuer? C' était le même garçon que sur les photos, c' était Zack, et on devait te rejoindre pour aller jouer. Quand on est arrivés, il y avait d' autres enfants qui t' embêtaient, j' ai voulu venir à ton secours … et après, c' est devenu complètement flou. Il y avait ton G- Force qui emportait Zack et toi tu t‘ es transformé en… ton père.

Il sursaute.

-Mais… tu n' as jamais vu mon père… ?

Je secoue la tête.

-Et… je n' ai mon G-Force que depuis deux ans, tu n' as pas pu le voir avant.
-Je sais bien, mais ça avait l' air tellement réel…
-C' est souvent comme ça, avec les rêves, fait-il remarquer.

Nous restons une éternité côte à côte à réfléchir. C' est vrai que c' est totalement insensé.

-Écoute, oublie ça, je finis par dire. C' était probablement juste un souvenir qui m' est revenu, comme ça, et au moment où il n' y avait plus rien, ça c'est brouillé, c' est tout.
-Sûrement, fait lentement Etan, peu convaincu par l' explication. Bon, alors on ne leur dit rien, c' est ça?
- Il vaut mieux pas, à mon avis.
-Quoi qu‘ il en soit, ça ne change pas nos plans. On part demain matin, à la première heure. C' était juste pour savoir si selon toi il fallait leur parler de tout ça ou non. En même temps, je doute qu' ils puissent nous aider plus qu' ils ne l' ont fait. Après… toute cette histoire, on n' aura qu' à en parler à tes parents.

Il se lève, avec un sourire optimiste que je soupçonne d' être un peu forcé. Comment savoir si j' aurais jamais l' occasion d' en parler avec eux ? Qu' est-ce qu' il en sait, cet idiot, qu' on les reverra ? Parti comme c' est, tout ce qu' on réussira à faire c' est de nous perdre encore dans les montagnes, si...
Tout à coup, je reçois un oreiller sur la tête. Saisie, je l' attrape et regarde le coupable.

-Interdiction de penser à des bêtises.

Je le lui renvoie à la tête de toutes mes forces et il vacille sous le choc.

-Comme si tu pouvais savoir à quoi je pense, je fais avec mauvaise humeur.
-Je lis un peu dans les pensées, tu sais, ironise-t-il.
-Ben voyons.

Il pose le coussin.

-Disons qu' à voir ta tête, c' était des pensées pas très optimistes, et c' est la dernière chose dont on ait besoin. J' aurais pas dû parler de tes parents, en fait: tu as tendance à faire et dire toujours le contraire de ce que je moi dis. Alors si je dis que tout va bien, tu vas tout voir en noir. Je me trompe?

A voir son regard en coin, il a compris qu' il a touché dans le mille. Ce qu' il m' énerve quand il est comme ça…
On frappe doucement à la porte au moment où je m‘ apprêtais à lui re-balancer un oreiller dans la tronche. Maureen apparaît.

-Je suis désolée de vous déranger…
-Non, pas du tout.
-C' est que… Harl vient de me rappeler que nous étions invités ce soir - et moi, tête de linotte, j' avais complètement oublié, fait-elle avait un petit rire. Malheureusement nous ne pouvons pas annuler. Est-ce que vous voulez venir ?
-Maureen, il faut y aller, fait Harl, qui arrive derrière elle. On va être en retard, dépêche.
-Je leur demandais s' ils ne voulaient pas nous accompagner. Je ne voudrais pas les laisser seuls, les pauvres petits…

Je me demande si elle se rend compte que les « pauvres petits » ont seize ans et sont parfaitement capables de se débrouiller. Même si tout ce qu' ils ont réussi à faire ces quelques jours, c' est de venir atterrir ici, alors qu‘ ils devraient être en train de faire leur possible pour sauver la BGU. Mais ça elle ne le sait pas.

-Ah mais non, c' est pas possible, intervient Harl. Tu ne vas pas imposer deux invités à nos hôtes, enfin, Maureen. Ils ne les connaissent même pas.
-De toute façon, le voyage nous a beaucoup fatigué. Nous nous coucherons tôt, alors.
-Ca m' embête de vous laisser, vraiment… C' est vraiment bête, vous êtes enfin là, et…
-Ce n' est vraiment rien, je vous assure.
-Alors, tu vois ? S' impatiente Harl. Allez, nous allons être en retard. Bon, les jeunes: bonne nuit. Et… Euh… évitez de sortir. Vous savez, le soir, c' est pas très sûr, dehors.
-Et Zack qui n' est pas là… se désole Maureen. Je suis vraiment désolée. Alors on vous laisse, les enfants. Nous emmenons Lise avec nous. Bonne nuit.

Et ils ressortent enfin. C' est vrai qu' il fait nuit, je n' avais pas fait attention. Nous descendons au rez-de-chaussée, sans trop quoi faire. Il n' y a pas de télé, pas de radio, les bouquins sont barbants au possible.

-Je vais faire un tour, dit Etan au bout d' un moment.

Je lui ferais bien remarquer qu' Harl nous l' a déconseillé, mais moi même, si je me sentais d' attaque, j' aurai été la première à lui désobéir. Je n' ai aucune envie de l' accompagner dans sa balade alors je remonte. Je passe devant la chambre de Lise, la salle de bain.
Et le fameux bureau de Harl.
Fermé.
A clé.

Je passe devant plusieurs fois devant avant de comprendre ce qui me tracasse. Il faut que je l' ouvre.
Je tourne la poignée, mais c' est toujours fermé à clé. Je reste un instant devant à lutter contre mon envie de l' ouvrir. Après tout, personne n' en saurais rien si je crochetais la serrure et que j' allais voir, si je ne touche à rien. Je n' aurais qu' à bien refermer ensuite. Non, ils m' ont invitée, ça ne se fait pas… D' un autre côté, quelqu' un qui ferme une pièce à clé cache forcément quelque chose. Et je ne resterais qu' un tout petit peu, pour regarder, c' est pas comme si j' allais le voler. Mes doigts commencent à me picoter, ils ne veulent plus rester tranquilles. Il vaut mieux que je retourne dans la chambre.

Je m' arrête dans la salle de bain, prends une épingle sur le meuble, et je fais demi tour. Je la tords pour la faire entrer dans la serrure et je me penche. J' en viens à bout trente secondes plus tard - grâce à Zell, je suis une pro dans ce domaine - et j' ouvre la porte avec précaution. Il y a un escalier. Je grimpe doucement la dizaine de marches. C' est une petite pièce poussiéreuse. Les murs sont recouverts d' étagères encombrées de livres et de papiers mal rangés. Des feuilles traînent par terre, à côté d' outils, de crayons. Bref, il règne un souk indescriptible ici, et même mon bureau est mieux rangé; ici, des tas de papiers, de livres s' entassent sur au moins un mètre. Dans le coin, un sac en plastique recouvre quelque chose. J‘ en soulève un coin pour jeter un œil dessous, et en voyant de quoi il s‘ agit, je jette le plastique à terre avec précipitation.

Un ordinateur. Et pas n' importe lequel, celui-là je l' ai déjà vu quelque part. C' est un des anciens ordinateurs de la BGU. Ils ont été changés il y a quelques années, et ils étaient exactement du même modèle que celui-ci, j‘ en mettrais ma main au feu. C' est vrai qu' au fond d' une des salles de cours il manquait un ordinateur… Ceux-là sont connectés sur un réseau international, grâce à un satellite spécialement programmé pour les universités et qui permettent de capter de n‘ importe où.

Je me hâte de l' allumer. C' est bien ce que je pensais: l' unité centrale se met à ronronner doucement, signe qu' il est en état de marche. Harl nous a menti, j' étais sûre qu' il nous mentait. Il a probablement volé cet ordinateur, parce qu' ils ne peuvent pas être sorti de l' établissement, et de toute façon, en partant , il n' aurait pas été autorisé à gardé ce genre d' outil, ne serait-ce que pour sa propre sécurité. On va avoir une petite discussion , à leur retour.

Une fois l' écran allumé, je me dirige vers la messagerie. Les messages sont très récents, il y en a même deux qui datent d' aujourd' hui. Alors même la connexion internet fonctionne parfaitement.

Je vais sur la boite d' envoi, et j' envoie un court message sur la boite électronique de Bess. Il me revient quasi instantanément avec un message d' erreur. Pareil avec les autres adresses des élèves de la BGU. Essayons Trabia. Je suis en correspondance avec Debbie, la fille aînée de Selphie, depuis qu' on est toutes petites. Elle n‘ a qu‘ un an de plus que moi, et elle est déjà Seed.
Je tape l' adresse, un court mot et je poste. Quelques secondes plus tard, une fenêtre de discussion instantanée s' ouvre et j' ai une réponse:

Dieu aima les oiseaux et inventa les arbres…

C' est un code dont Debbie et moi sommes convenues il y a quelques années, pour être certaines que nous parlions bien l‘ une à l‘ autre. Je tape fébrilement la réponse, qui est la suite de la citation:

…L'homme aima les oiseaux et inventa les cages.

Quelques secondes plus tard, la réponse arrive:

_ Mon dieu c' est vraiment toi Eva. Tu vas bien ? Nous avons vu ce qui est arrivé. Nous avons reçu un appel au secours de la BGU il y a quelques jours, et des troupes de Trabia se sont immédiatement rendues à Balamb pour venir à votre secours, mais c‘ était trop tard. J‘ étais morte d‘ inquiétude. _ Là, ça va, même s' il se passe des choses bizarres, je t‘ en parlerai plus tard; il faut que je parle à tes parents
_J' ai envoyé ma voisine de dortoir chercher mon père. Où est-ce que tu es ?
_ Tréhignac , ça te dit quelque chose ?
_Connais pas, c' est où ?
_Aucune idée, et ce serait trop long d' expliquer comment on est arrivé là pour l' instant. Mais vous, où êtes-vous ?
_Attends, Papa est là, je te le passe.
_Eva, tu vas bien ?
_Oui, moi ça va, mais vous avez des nouvelles de la BGU?
_Non, je ne sais pas quoi te dire, on croirait qu' elle a totalement disparu, nous n' arrivons pas à la localiser, ni à la contacter.

C' est quand même dingue, un bâtiment de cette taille.

_Qu' est-ce qui se passe, Laguna ? Pourquoi est-ce qu' on a attaqué la BGU ? Et qui a dirigé ça ? On a vu des soldats esthariens.
_« On » ? Avec qui es-tu?
_Etan.
_Qui ?
_Almasy.
_Ah,
répond-il après une hésitation. Nous essayons de te localiser d' après ta connexion, ça va prendre une minute.
_Ok.
_L' ingénieur demande si tu pourrais trouver le code, ça l' aiderait.
_Ok.


Je ferme la fenêtre et ouvre le fichier sur les données de l' ordinateur, pour communiquer le code. Pendant qu' ils continuent à chercher, je jette un œil sur la boîte de réception. Au point où j' en suis, Harl ne pourra pas m' en vouloir si j' ouvre ses messages. Il va falloir qu' on ait une sacrée discussion, et avec toute la famille. Etan a intérêt à rentrer vite fait. L' ingénieur n' a toujours pas réussi à me localiser. J' ouvre le premier message et je le lit rapidement.

Oh merde.

J' ai dû mal comprendre, c' est pas possible...

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Exp. : Erry top 18h47
à : Harl Hendle
(Re) :

Message reçu. Veuillez vider les lieux dans les plus brefs délais. Considérez qu' à partir de la réception de ce message , vous avez une heure pour vous mettre en sécurité. Rendez vous à la base sur le champs. Prenez vos précautions : tout individu restant dans la maison sera considéré comme un ennemi et sera éliminé. Inutile d' emporter quoi que ce soit, tout vous sera fourni sur place. Nous vous recontacterons pour votre récompense. Nous ignorons comment vous avez fait , mais si vos renseignements son exacts, il s' agit d' une prise d' une importance capitale. Si vous avez enfin réalisé votre mission, vous serez également autorisé à récupérer votre grade. Dans le cas contraire, nous devrons agir en conséquence.

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Message d' origine:

Identification : Agent 07589.

J' ai actuellement Etan Almasy et Eva Leonheart sous mon contrôle. En attente des ordres de la base.

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-Ce salaud nous a dénoncé…

Sous le choc, je me rends à peine compte que j' ai parlé à voix haute. Il était 18h47 quand il a reçu le message, et maintenant, il est 18h42. Je me lève en faisant tomber la chaise derrière moi et je cours à la chambre. Il me reste cinq minutes pour dégager, en espérant que ces ordures ne seront pas en avance. Ils doivent déjà être tout près, à l' heure qu' il est. Et Etan, qu' est-ce qu' il fiche ? Je ramasse nos sacs et je descends l' escalier en trombe. En bas, je stoppe. Il y a du bruit et de la lumière dans la cuisine.

Je pose doucement les sacs et j' avance à pas de loup en longeant les murs. J' en profite pour attraper une petite hache qui est sur une étagère dans le sellier et j‘ attends, cachée contre le mur, près de la porte, que le ou les soldats sortent. Les pas se rapprochent de la porte. Je brandis l' arme et un grand cri aigu suivi d' un bris de vaisselle emplissent le couloir.

- Lise ? Je fais, sous le choc, en suspendant mon geste quelques centimètres au-dessus de sa tête.

Elle a de la chance de n' être pas plus grande.

- La… La… bégaie la petite, blanche comme un linge en fixant la hache.
-Mais qu' est-ce que tu fous ici ? J' explose, folle de rage.

Son regard devient plus dur.

-Ce que moi je fais chez moi ? Et toi avec ta hache? T' es pas un peu cinglée?? Espèce de pyscho… de spyca… de psycha… Assassin !!
-Où sont tes parents ? T' étais pas censée être avec eux ?
- J' avais pas envie d' aller chez ces gens, dit-elle en haussant les épaules. Ils regardaient pas, je me suis échappée juste avant qu' on rentre dans la voiture, je suis allée m' amuser en ville, puis je suis rentrée ici pour jouer.

Ses parents sont partis, et les soldats vont arriver d' ici une minute avec ordre de tirer sur tout ce qui bouge. Qu' est-ce que je dois faire ? Qu' est-ce que je dois faire ??!

- Bon sang, mais ça t' arrive jamais d' écouter tes parents, toi ?
- Quand Maman va rentrer, je vais le lui dire, que tu es folle et que c' est à cause de toi que la vaisselle est cassée, dit-elle en se penchant pour ramasser les dégâts.

Ok, c' est une peste. Mais même si elle n' a que six ans, je ne pense pas que les soldats lui feront de cadeaux. Je sens que je vais le regretter, mais je ne peux pas la laisser là. Je l' attrape par le bras, faisant tomber tout ce qu' elle avait dans les mains au passage et je la traîne jusqu' à l' endroit où j' ai laissé les sacs.

-Eeeh, râle -t-elle en essayant de se dégager.
-Ecoute-moi bien, fais-je en stoppant et en la fixant dans les yeux. D' ici une minute, des hommes avec des armes vont arriver. Beaucoup d' hommes qui seront encore moins patients que moi. Et crois moi, ils n' auront pas besoin d' excuse pour tirer sur une petite gamine insupportable comme toi.

Pour le coup, ça l' a calmée. Elle me regarde ramasser mes affaires, toujours la hache à la main.

-C' est … c' est pas vrai ? Tu mens, hein ? Demande-t-elle d' une voix blanche.
- Si tu veux vérifier tu n' as qu' à rester ici.

A mon avis, elle me croit sur parole, parce qu' elle avance d' elle-même vers la porte de la cuisine. Avant que je n' ai pu atteindre la poignée, celle-ce se tourne et la porte s' ouvre. Lise et moi avons en sursaut en arrière, tout comme la personne en face. C' est Etan. Il halète, il a visiblement couru. Il s' appuie sur la porte et tente de retrouver son souffle.

- On a … un problème, parvient-t-il à articuler.
- Ca, c' est rien de le dire.

Les soldats vont plus tarder à arriver, maintenant. Je lui fourre la petite dans les bras, je le prends pas les épaules pour le faire pivoter et je le pousse en avant pour le faire avancer. Puis j' attrape les sacs et la hache, et je le suis en courant.


***


Et voilà ! Je crois que c' est le chapitre le plus long de ce fic, et de loin… Il a mis beaucoup plus de temps à arriver que je ne le pensais; en fait, j' ai probablement dû changer dix fois chaque élément du texte pour savoir comment les amener, et s' il fallait vraiment les mettre finalement. Mais vu que ça faisait pas avancer des masses l' histoire, je n' avais vraiment pas envie de le couper en deux. Déjà que si j' avais pu, j' aurais encore continué. Mais là ça aurait fait vraiment trop.

Et en fin de compte, je crois qu' il va apporter plus d‘ interrogations que de réponses, ce chapitre. Au début, j' avais fait des tas de grosses bourdes, du genre : au début, Etan demande s' il y a des téléphones, Zack répond non, et quelques minutes plus tard il doit appeler chez lui pour prévenir. Ou encore, je voulais faire en sorte que toutes les portes soient fermées à clé pour qu' Eva en défonce une à la hache pour sortir ( eh oui, ma hache, j' y tiens ! lol), mais comment il aurait pour sortir, Etan ?

Bref, merci de votre patience, d' avoir lu et de laisser des commentaires. Biz biz, tous ! Dido



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Ce n'est pas facile mais il faut être capable d'aimer ses ennemis, ne serait-ce que pour les énerver.
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